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LETTRES
jamais
le
sc11isme et l'infidélité n'offroient de pareils.
spectacles. On nous rendit mille actions de graces.
Nous donnames aux autres familles chrétiennes ·le
ternps et les soins nécessaires ; mais cet événement
singulier füt ce qui sig11ala notre course apostolique;
nous ne pouvíons nous lasser de l'admirer, et
a
notre
retour , ce fut pendant tout le chemin le sujet de
nos entretiens. Mon compagnon m 'avoua que jamais
en sa vie il n'avoit ressenti une joie plus douce et
plus pure , et que ce seul moment ne l'avoit que t.rop
bien payé de ses fatigues passées ; je le crus aisé–
ment,
a
en juger seulement par ce qui s'étoit passé
dans mon propre creur.
Un Grec de cette bourgade, qui faisoit voyage
avec nous) et qui, comme nous, venoit
a
Damas,
m e dit que j'avois paru curieu:x de savoir pourquoi
Mahomet avoit ·particuliement recommandé les reli–
gieux chrétiens
a
ses sectateurs : si vous voulez,
1
ajouta-t-il , en savoir la raison ' et pénétrer
a
fond
ce mystere , je vous adresserai
a
un habitant de la
ville ou nous allons; il est en état de vous en
ins–
truire ; e'est un homme savant dans la loi , fort versé
dans l'histoire du pays, et qui volontiers vous fera
part de ses lum1eres. Il me nomma le docteur en
question; l'avis me parut bon; je ne crus pas devoir
le n égliger;
j'
étois bien aise d'éclaircir un point dont
j'avois déj:l oui· parler si diversement. Lorsque j'étois
encor€'. en France , et que je me disposois
a
ces mis–
si ns , j'avois lu avec attention ce que nos doctes
rapportent et de Mahomet et de l'alcoran; j'avois lu
en particulier l'article de Bayle sur ce prophete•
. J
voulns done me metn·e au fait, et mon premier
soin depuis mon retour
a
Damas, a été d'approfo11-
clir
!'affaire. Voici ce que j'ai déconvert par mes
recherches.
Je me rendis chez rh<J mme que l'on m'avoit
i!J-–
diqué : c'étoit un Chrétien , et en cette qualité
je-