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LETTRES
Galata et
a
Péra , cependant tout ce
qu'il
y
a parmi
eux de uoblesse et de gens de distinction résident
dans la ville impériale au-dela du port, qu'on ap–
pelle proprement Coustautinople. Les plus qualifiés
habitent le quartier appelé le
Patriarcat
, ou le
Phanal.
Il y a des familles qui prétendent
~tre
issues des anciens empereurs grecs, d'autres qui ont
des alliances avec les heys de Moldavie et de Vala–
chie. La famille des Scarlati,
a
laquelle le fameux
Alexandre Scarlati, connu sous le nom de Mauro
Cordato, a rendu sa premiere splendeur, est aujour–
d'hui celle qui se distingue le plus par son crédit et
par les honneurs dont elle est revetue. Mauro Cor–
dato a laissé deux fils, dont l'a1né est pour la seconde
fois bey de Moldavie; l'autre est grand drogman
de l'empire. Nous sommes fort bien regrni, de tous
ces messie'urs. Le bey de Moldavie ,
a
qm le pere
Jacques Piperi a autrefois appris la langue latine, a
prié qu'on lui donnat encore un Jésuite, pour l'ap–
.prendre a son fils. Nous sommes aussi fort bien au–
pres du patriarche des Grecs. Nous lui rendons de
fréquentes visites, et il nous comble de caresses.
La conversation tourne quelquefois sur des points de
religion; il nous dit ses pensées , et sans sortir des
bornea du respect , nous luí disons aussi les notres.
Avant que de passer au
Leva.nt , jem'étois formé
une idée magnifique de
la
majesté .dece patriarche
de la nouvelle Rome. La
premiere fois que j'allai
hu
rendre visite, je demeurai tout surpris de le voir
logé et scrvi dans la derniere simplicité. Sa chambre
est pauvre et dénuée de tout. Ses domestiques con–
sistent en deux valets asscz mal en ordre, et en dcux
'
ou trois clercs. Quand il sort pour des visites parti–
culierrs, c'est toujours
a
p ied. Ses habits n'ont rien
qui le distingue des autres religieux grecs. On ne le
connoh que parce qu'il cst accompagné de quelques
prélats vetus aussi simplcmcnt que lui, et de
qu~lques