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686

DEC

f ut une mala die dont la contagien fe communiqua

a

to ure cette famille.

e

T

-K.)

DÉCLAMATION,

f.

f. (

Rhitor. B!!lles - Leures.)

Ce

mot fe prend en mauvaife parr, pour exprimer

nne fauífe é oquence: chez.les Crees,

c~étoit

l'art des

fophiftes;

il

confifioü fur- tout daos une dialeaiqne

fubrile & captieufe,

&

s'exer~oir

a

fairc

q~e

le faux

partu

vrai; que le

vra

i parur fa ux; que le

b~~~

parut

mal; que ce quí '

lO.Ít

juile

&

louable pana InJufie

&

criminel,

&

vice v erfá :

c'étoit la

char~atanerie

de la

logique

&

de la morale.

Qu

~tn fophi~e

progontt une

chofe facile

a

perfuader'

011

{e

moquolt de

hu

&

a vec

rai fon:

a

celui qui ouloit fa ire

l

éloge d'Hercule on

dem ndoit:

Qui efl- ce qui Le bláme?

Mais que le me me

homme fe vantat de prouver anjourd hui une chofe,

&

demain le contraire; les Athéniens, ce

p euple

é

ou–

t

ur,

alloient en foule

a

fon école. La fageífe de So–

era te fut l'écueil de la vanité des foph ifies; il oppofa

a

leur déclamation une dial -él:ique plus faine

&

auffi

{u.btile que la leur.

11

les attira de piege en piege juf–

qu'a

les faire tomber dans l'abfurde ;

&

fon plus

grand crime' peut- etre' fut de les avoir confondus,

&

d'avoir appris aux Athéniens, long-

tems

féduits

par

d~s

paro les , le digne ufage de la raifon, l'art de

douter,

&

d'a-pprendre

a

connoitre ce qu'il importoit

de favoir, le vrai, le bien, le beau moral, le jufie,

l'honnete

&

l'utile.

Chez.les Romains la

déclamation

n' ' toit pas fophif–

t'ique, mais patbérique; & au lieu de féduire l'efprit

&

la raifon, c'étoir l'ame qu'elle e!fayoit d'intéreífer

&

d'émouvoir. Ce n'eft pas que daos des ouvrages

de morale , comme les

P

aradoxes

de Cicéron

&

fon

Traité fur la

vieill~,

on n'employat, comme chez.

les Grecs' une dialeéliqt,Ie tres- déliée'

a

rendre po–

pulaires des vérités fubtiles,

&

fouvent oppofées aux

préjugés rec;:us: eétoit meme ainíi que Caron avoit

<:outume d'opiner dans le fénat.fur des quefiions épi–

neufes; mais cette fubtilité étoit celle de la bonne-foi

ingénieufe

&

éloquente : c'étoit la dialeétique de

So erare,

&

non pas celle des charlatans dont Socrate

s'étoit joué.

La

déclamation

étoit aRome l'apprentiífage des

orateurs,

&

d'abord ríen de

p~us

utile; mais quand

le gol'tt daos tous les genres fe corrompit,

1

'éloquence

éprouva la révolution générale. Pérrone nous donne

une idée de cette école d'éloquence,

&

des fujets fur

lefquels les jeunes orateurs s'exerc;:oient dans fon

tems :

J'

aire fu ces

pl,zi~s

pour la définfe de L' Liberté

publique;

j'

ai perdu cet aúl en combattant pour vous;

dvnnet.-moi

unguid~

pour me menu ver; mes enfans,

Cflr

mes

j

ambes affoiblies ne peuvem plus me fouunir.

Ces

déclamations

qui fembloient fi tidicules

a

Pétrone,

pouvoient, felon Perrault, avoir leur milité.'< Com–

~

me il faut rompre, dit- il, le corps des 1eunes

" gens par les exercices violens du manege, pour leur

" apprendre

a

bien manier uncheval dans une marche

»

ordinaire ou daos un carrouzel; il ne

faur

pas moins

,. rompre, en quelque forre, l'efprit des jeunes ora–

" teurs par des fujers extraordinaires,

&

plus grands

" que nature' qui les obligent

a

faire des efforrs d'ima–

,.) gination

&

qui leur donnent la facilité de traiter

.>'

enfuite des fujers communs & ordinaires

; ca

r ríen

" ne difpofe davantage

a

bien faire ce qui

e.fi

aifé '

,) que l'habitude

a

faire les chofes difficiles

H.

C

e rai–

fonnement de Perrault eft lui-meme un fophifme: car

un jeune deffinateur qui n'auroit jamais copié que

des modeles d'acad

1

mie daos des attitttdes contrAintes

&

des mo1.1vemens convul:fifs, feroit tr ' s -loin de

favoir modeler ou peindre

la V

énus pudique , o

u

l'Apollon, ou le Gladiateur moL ral)t;

&

quand

il

s'agit de paífe r de la nature forcée

a

la nature fimp le

&

naive, c'eíl: abufe r des mots, que de dire:

qui

peut lep lus peut

ü.

moins.

Dans tous les arts, en 'lo–

quence

&

en po ' fie comme

en

peinrure,

l'exog ' ra-

/

DEC

tion efi:

le moins;

&

L~

p lus,

c'eft la

vérité, Ja

con·

venance

~

la d cence: e efi: cette }jgne dont parle

~orac.e

au d la

&

n

dec; de laquelle rien n peut

etre b1en.

Il

eft done vrai qu'a Rome

la

d 'c!umation

co.r~

ro~pir l'~! oquence

; il el encore vrai qu elle

1

au.

roH d cnee quand m"me elle ne l'auroü pas cor–

rompue. Elle la corrompit en ce que l'orateur exercé

a

des mouvemens ex traordinaires' le

employoir

a

tous

~ro.pos_,

.pour ufer de fes a antages:

il

accom–

~o

Olt ÍOn

J~ljet

a

fon

é!oquen~e,

au

l~eu

de propor–

tlOnner fon eloquence

a

fon UJet. Mat cet exercice

de l'art oratoire tendoic fur- tout

a

le d .cr ,di ter. car

llll

peuple accoutumé a ce jeu des

lamutiorzs'

on

il

fa voit bien que ríen n'

1

toit fiocere, d voit ;ller

encendre fes orateur --comme autant de comédiens

habiles

a

lui en impofer'

&a

1'

1

mouvoir par artifice:

ce qui devoit naturellement lui óter cette confiance

{¡ '

rieufe qui fe ule difpofe

&

concluir

a

une pleine per–

fuafion.

Nos avocats ont long- temps imité les déclarna–

teurs: e'

fr

le granel déhwt de le Maitre,

&

ce

qui

corrompt dans

f es

plaidoyers le don de la vraie élo–

quence.

J

ufqu'a Patrules avocats eurent le défaut de

le Maitre,

&

n'en eurent pas le talent.

Les Plaideurs

de Racine furent pour le barreau une utile

&

forre

lec;on,

&

le ridicule actaché

a

la fauíf-e éloquence en

pr ' ferva du moins cenx qui, nés avec nne raifon

droite

&

ferme, une fenfibilité profonde,

&

le doB

naturel de la parole, fe femirent doués du vrai ta·

lent de l'oratenr.

Le gofn de la

déclamation

n'efi pourtant pas en–

core abfolument banni de

1'

lloquence moderne;

&

l'éducation des colleges ne fait que le perpéruer. Rien

de plus rid. cule dans nos livres de rhétorique, que

les formules d'éloquence qu'on

y

donne fous le nom

d'amplification,

de

crie,

&c.

&

les exercices qu'on

y

fait faire aux jeunes gens reífemblent forra ceux dont

íe

moque Pétrone.

lL

y auroit , je crois , pour formeL·

des orareurs, une méthode plus raifonnable

a

fui vre

que de faire déclame r des enfans

fúr

des fu jets bifarres

ou abfolument étrangers aux mreurs

&

aux affaires

d'a

préfent: ce feroit de prendre parmi nos canfes

célebres celles

qni

ont éré plaid ' es avee le plus d'é–

loquence,

&

de n'en donner aux jeunes

~ens

que les

matériaux, c'efi-

a-

dire, les faits, les ClrConfranceS

&

les moyens; en leur laiífant le foin de leS' ranger,

de les difpofer

a

leur gré' de les enchainer l'un

a

l'autre, d'y meler' en les expofant 'les couleurs

&

les

mouvemens d'une éloquenee naturelle,

&

de prther

a

la vérité toutes les forces de la raifon. Ce travail

achevé, on n'auroit plus qu'a mettre fous

les

yeux

du jeune homme la meme canfe

plaid

1

e éloquem

ment par un homme célebre;

&

la

comparaifon.qu'

il

feroit lui meme de fon ptaidoyer avec celui

d

'un

Cochin, d'un le Normaod, d'un de Genes, feroit

ponr

lui

la meitleure

le~on:

au lieu que le theme

tl'un régent de college donn é pour modele

a

fes éco–

liers, eil bien fouvent d'auffi maÚvais gout,de plus

mauvais goftt que le leur.

Déclamation

fe prend auffi en mauvaife part

dans

l'éloquence poérique

~

elle confifie dans des moyens

forc

1

s qu'on empbie pour émauvoir, o

u

daos un

pathérique qui n'efi point

a

{a

place : c'efi:

le

vice le

plus commun de la haute poéíie,

&

fur- to ur du

genre tragique.

n

vient communémenr de

ce

que le

poete

n'o u blí~

pas aífez que l'aétion a des fpedateurs ;

car toutes les fois que, malgré la

foible!Te

ou

la

froi–

deur de fon fujet, on veur

e

cirer de grands

monv e~

mens dans 1'auditoire, on force la narure,

&

on donne

dans la

d.fclamation.

i

au contraireon pouvoit fe per–

fuad er que

les

perfonnages en aétion feronr feu ls , o n

ne leur feroit dire que ce qu'ils auroien t d it eu x–

me.mes, d'apd:s 1 ur (;ara

a

ere

&

leur íituarion. U