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CAR

donnerons dans

1'

article

PASSION, dans ce

SuppU~

ment,

tous les détails néceífaires fur cet art. Nous

ajouterons en paífant, que le favant M. de Buffon a

i?féré

d,an~ f~n.

Hifloire natztrelle,

quantité d'obferva–

tiOns tres-Jndicieufes fur cette matiere..

Il eút été

a

fouhaiter

lG.

Que le Brun eút fait

graver de grandeur naturelle, les

caraéleres

des paf–

jions ;

2.

0 •

qu'il eih completté fon cours des paffions

fimples,

&

enfuite celui des paíiions compofées,

telles que l'opiniatreté , l'ambition, la malignité ,

la fourberie, l'orguea,

t?c.

I1 efl: a préfumer que

tot ou tard

L10

habile deffinateur philoíophe perfec–

tionnera l'entreprife de le Brun, en étudiant la na–

tur61', o

u

du moins en copiant exaél:ement les tetes

des figures les plus favames qui ont été deffinées par

les plus célebres artifl:es

~

par exemple daos la _gale–

rie du Luxembourg a París, Rubens a donné des

1110-

deles

a

imiter; toutes les perfonnes intelligentes con–

viennent que le génie qui foutient le voile au-deífus

de Ma-rie de Médicis, exprime un rire moqueur

~

fatyrique. Dans le tableau du fond de la galerie,

Marie de Médicis fait femblant de refufer le gouver–

nemeot deJa France, que les courtifans

a

genoux la

fupplieot d'accepter: tnais le menton avancé de Ma–

rie de Médicis , fes yeux faillans, pleins de fe u ,

fi–

xés, démentent viíiblement le figne du modefl:e refus

que fes mains femblent indiquer. On voit dans cette

tete un modele de l'ambition la plus dévorante ;

&

dans celle des courtifans qui l'envitonnent l'on

y

re–

connoit les

caraéleres

des différentes efpeces de baf–

feífes

&

de duplicité. On trouV"era quantité d'autres

paffions fimples ou compofées, qui font parfaitement

exprimées dans cette galerie.

Il nons reile

a

faire encore quelques obfervations

'détachées en faveur des jeunes peintres qui ont la

noble ambition de vouloir exceller dans Ieur art.

ll

{emble

que voici le plan le plus facile qu'ils doivent

fuivre pour

y

parvenir. Des que l'on íait deffiner

avec facilité

&

avec exaél:itude, il faut

1°.

lire les

defcriptions des paffions de le Bn,m;

2e1

s'habituer

a

<opier, en grand

l~s

caraaeres

des

p~ffions

fimples '

deffinees par Ie meme auteur; 3

f!.

hre le

Traité des

phyjionomiesde

Jean-Baptiíle Porta;4°. copierlesca–

raéleres

d'apres nature: dans cet objet un peintre doit

_deffiner tomes les paffions au fimple trait, en imitant

un rres-habile aél:eur, un Garrick, un Cepadin, un

d€ ces hommes íinguliers qLti ont aífez de force dans

.l'ame pour conferver pendant

20

m_inutes les traits

de la paffion qu'ils veulent jouer;

5P.

on pourra en–

iuite lire les vi es des premiers empereurs Romains;

6o.

copier

&

recopier cent fois leurs traits d'apres

leurs médailles; 7"· enfin d'apres leurs fiatues. Par

€eS

moyens on parviendra,

1<".

a

connoitre les phy–

:fionomies;

2.

0 •

a

les tracer; 3

~.

enfin' on acquerra

l'art merveilleux d'adoucir les duretés des traits ca–

raaérifiiques; en un mot' l'art de défigner l'étendue

.Ces paffions

&

de l'efprit, quoique l'un

&

l'autre

fuient voilés par la politetfe ou par la politique.

(V.

A. L.)

CARACTERE , (

Beattx-Arts.)

c'efl:-ce qui confH..

tue le propre d'une chofe ,

&

qui la difiingue des

autres chofes de la meme efpece.

Les beaux-arts qui préfentent

a

notre réflexion les

-objets viíibles

&

inviíibles de la nature, doivent

défigner chacun d'eux de maniere qu'on connoiífe

a

quel genre il appartient,

&

pa.r quelle propriété il

fe -difl:ingue de tout autre objet de fon efpece. Le

talent de démeler ave e précifio.n les trairs caraaérif–

tiques, fait done une des partí es capitales de l'art.

Le peintre doit donner

a

cbaqne partie viíible de l'ob.

jet 1e

caraGlere

dn genre '

&

meme le

caraae,re

indi–

viduel , lorfqu'il ell: queílion de portrait

s, & cha

_que artiíl:e en doit favoir faire autant

a

fa

manie.re.

CAR

n

faut pour cet effet qu'il foit doué d'un efprít

d'o_bferv~tion

tres-pénétrant; qn'il ait

a

l'égard des

obJets

V1íibles, ce qu'on nomme le

coup-d'ceil du

pe:ntre;

~

qu'a l'imitation de ce derni r, il fache

fa1íir rai?xdement les traits efTenttels d'un objet,

&

. les expnmer avec v érité. C'efi dans cette habileté

que femble confifrer le génie propre aux beaux–

ans; le don de bien faifir les

caraReres

eíl peut- étre

la marq':le la plus sfire du génie d'un artifre.

,Parm1 la grande variéte d'obj ets dont les beaux–

arts s'occupent' les

caraéleres

des etres penfans íont

fans comredit, ceux qui intéreílent da vantage.

'ex:

pref?on des

caraaeres

moraux eft la plus 1mportante

parne de

~~art,

&

c'eft ea particulier le premier ta–

lent du poete. Dans les principaux genres de poéfie

l'épopée

&

~e

drame, ce font les

caraileres

des per:

fonna~es

qm

formei?t la_Partie effentielle du poeme.

Sont-1ls bten deffines , 1ls nous mettent en état 'de

lire dans le

cce~r

des

h,o~mes

, de preffentir l'im–

preffion

~es

obJets exteneurs fur eux, de prévoir

l~u~s

fenumens , leurs réfolutions ,

&

de conno!tre

d1fimél:ement les reíforts qui les font agir. Les ca–

~aél:e~es

font proprement le po.rtrait de l'ame, l'ob–

Jet

re~l,

do_nt

~e

portrait du cerps n'efi que l'ombre..

Le poete qm fa1ttracer avec exaé1itude

&

avec force

les

caraéleres

moraux,

flOUS

enfeigne

a

connoitre les

hommes ,

&

en méme-tems a nous bien connoitre.

nous-memes. Mais l'effet que des

caraaeres

bien def–

finés font fur les facultés de notre ame ne fe borne

pasa cette connoiífance. Car de

me~e

que nous

partageons la douleur des perfonnes affligées nous

reífento~s

a

u~

tous les autres fentimens, des'qu'on

les expnme VIVement

&

dans le vrai. Toute

repré~

fentation fort.e de l'état d'une ame, nous fait éprou–

ver auffi fenfiblement ce qui fe paífe en elle que

fi

1~

chofe fe

pa~oit

en

nous~.memes.

Par-Ia, ies pen–

fees

&

les fentlmens des autres deviennent en quel–

que maniere des modi:fications de notre propre étre .

d

.

1

'

nous

evenons

I~pe:u.eux

avec

A

chille, prévoyanr

avec Ulyífe ,

&

mtrep1des avec Heél:or.

~es po~tes

peuvent done'

a

l'aide des

caraéleres

qu 1ls ch01fiífent, exercer nn tres-grand empire fur

l~s

creurs. Les perfonnages qui ont notre approba–

twn

nous touchent le plus fortement. Nous raífem–

blo~s

toutes nos forces pour éprouver les memes

fenumens, que l'on nous dépeint dans ceux dont le

caraél:ere ?ous a

c~armés.

Ceux qui nous déplaifent .;

au contra1re, exc1tent en nous une forre averíion

~arce

qu'étant, ponr ainfi dire, néceffités de reífen:

t1r auffi leur fituation, il s'éleve en nous-rnemes un

combat

_int~rieur

qui

~ous

les rend défagFéables.

L_a prmc1pale

attent~on

du poete épique ou dra–

matlque dolt par confequent s'attacher aux

caraHe–

res

de fes perfonnages. Pour fe hafarder· dans ces

deux genres, il faut bien connoitre les hommes. Le

poete épique a

la.

fa~iüté

de développer en entier le

caraélere

d~

fes

p~mc1pa~x,Perfonnages

, par le nom–

bre

&

la d1veríite des evenemens , des incidens

&

des ·p~~fonnes.

que

l'ét~~due

de

f~n

aél:ion lui per–

met d mtroduJ"re; le poete dramat1qne au contraire

do!lt l'ailion eft refl:reinte

~

un objet précis, ne pe

u~·

pe1_ndre le

c_araO.ere

des hommes que par quelques

tra1ts finguhers de leurs vertus, de leurs vices ou

de leurs paffions. Il eíl rarement poffible dans un

tems auffi court que celui auquell'aél:ion

du

drame

efl: bornée ,

&

dans un événement unique de faire

connoitre le

caranere

entier d'un perfonnage.

11

y

a des gens qui, dans leur maniere d'agir

&

de

penfer, ne marquent aueun

caraélere

décidé. Ce font

~es girouett~s

qui

.font

indifférentes

a

toutes les poú–

tlOnS '

&

qt~I·

fe I;nífent

~llera

toutes les impulfions.

11 femble qu tl n y a poxnt en eux de force interne

capab~e

de fe?tir, de,

~e

déterminer

&

d'opérer.

IJs vo1ent arnver les evenemens fans

s'y

intéreífer·

'

ti