ANA
de les énoncer ; car -elles fe fuivroíent dans un te!
ordre, que ee que l'une ajoí'tteroit a celle qui l'au–
roit immédiatement précédée
>
feroit trop fimple
pour avoir befoin de preuve : de la forte on
arriv~roit aux plus compliql1ées,
&
)'on s'en aíflLrerolt
mieux que par toure autre voie. On établiroit
me~e
une fi grande fubordination entre totltes les connoif–
{ances qu'on auroit acquifes , qu'on pom'roit
a
fon
gré aller des plus compofées auxylus,fimples, 01.1
.(les plus fimples ame plus
com~ofees;
a
peme, po~roit-on les oublier, ou du rnOlns , fi cela arnvolt,
la liaifon qui feroit entr'elles faciliteroit les rnoyens
de les retrouver.
Mais pour mieux faire fenrit l'avantage de
l'ana~
lyfl
fur la fynthefe, interrogeons la nature ,
&
fui–
vons l'ordre
~u'elle
indique elle-meme dans l'expo–
iirion de la venté. Si toures nos connoiífances vien–
nent des fens) il eíl: évídent Cj11e c'eíl: aux idées firn–
pies
a
préparer l'inrelligence des notions abíl:raites.
Ea-il raiConnable de commencer par l'idée du poffi–
ble pour venir
a
celle de l 'exiaence, ou par I'idée
au point pour palTer
a
celle du Colide
?
Il ea evident
'que ce n'eíl: pas-la la rnarche nantreUe de l'eCprit
l1Umain: fi les Philofophes ont de la peine a recon–
nOltre cette vérité ,
c'ei!
paree qu'ils Cont dans le
pr¿juaé des idées innées , on parce qu'ils fe lailTent
preve"nir pour till uCage que le rems paroít avoir con–
{acré.
Les Géometres rnernes }qUl devroient rnieux con–
nOltre les avantages de
I'analyje
<jue les autres Phi–
lofophes, donnent fouvenr la préférence a la fyn–
thele ; auffi , Cj11aml ils fortent de leurs calculs pour
entrer d'ans des recherches d'une nature différente
>
on ne leur trouve plus la rneme c1arté , la rnerne pré–
cifion> ni la meme étendue d'efprit.
Mais
fi
l'analy¡¿
efi la méthode Cj11'on doit fuivre
dans la recherche de la vérité, elle efi auffi la rné–
thode dont on doit fe fervjr pour expofer les décou–
vertes qu'on a faites. N'efi-il pas fmgulier que les
Philofophes , Cj1li fentent cornbien l'
aruzlyfl
eíl: utile
pour faire de nouvelles découvertes dans la vérité,
n'aient pas recours a ce rneme rnoyen pour la faire
entrer plus
facilement
dans ['efpnt des auo'es? Il
femble Cj11e la rneilleure rnaniere d'iníl:ruire les hom–
mes, c'efi de les conduire par la rourequ'on a dl\
tenir ponr s'iníl:ruire foi - meme. En etfet, par ce
mo/en , on ne paroltroit pas tant démontrer des vé–
rites déja découvertes, que faire chercher
&
trou–
ver des nouvefles vérités. On ne convaincroit pas
feulernent le Leél:eur , mais encore on l'éclaireroit;
&
en fui app'renant a faire des découvertes par lui–
meme, on lui préfenreroit la vérité fous les joms les
plus intérelTans. Enlin, on le mertroit en érat de fe
rendre raifon de toutes ú:s dérnarehes : il fauroit toti–
jours orl il efi, d'ou il vient, Oll il
V.l.:
il pourroit
donc juger par lui-meme de la route que (on gtúde
lui traceroit,
&
en prendre trne plus ft\re tomes les
fois qu'il verroit du danger
a
le fuivre.
Mais pom [aire ici une
e~'Plication
de
l'analyfl
que je viens de propofer, fnppofons-nous dans le cas
d'acquérir pour la premiere tois les notions élémen–
taires des MathématiCj11es. Comrnent nous y pren–
drions-nous
?
Nous commeneerions >fans doure , par
nous faire l'idée de l'uniré;
&
I'ajolltant plufieurs
fois
a
elle-rneme , nous enforrnerions des colleéhons
que nous fixerions par des lignes ; nous répererions
cette opération,
&
par ce moyen nous anrions bien–
tot fur les nombres autant d'idées complexes, que
nous fouhaiterions d'en avoir. Nons réfléchirions en–
fuite (ur
la
maniere dont elles fe font formées ; nous
en obferverions les progres,
&
nous apprendrions
infaüliblement
l~s
rnoyens de les décompofer. D es–
:Zors nous pOllTrlons cornparer Jes plus complexes
ANA
avee [es plus fimplcs,
&
d ·couvtir les
proprict~s
des unes
&
des autres.
Dans cette rnéthode les opérations de l'e(prit n'au–
roient pour objet que des idées limpies ou des
¡dée
complexes que nous aurions formée
,&
dont nous
connoltrions patfaitement les générations : nous ne
trouverions done point d'obíl:acle
a
découvrir les
premiers rapports des grandeurs. Ceux-la connu ,
nous verrions plus facilemcnt CetLX qui les fuivent
immédiatement,
&
Cj11i ne manqueroicnr pas de nous
en faire appercevoir d'autres ; ainfi apres avoir
commencé par les plus funples , n01l5 nous
éleve~
ri<?ns inCenfiblemenr aux plus compofés ,
&
nous
nous ferions une fuite de connoifr¡tnces qui dépcn–
droient fi fort les unes des autres , qu'on ne pour–
roit arriver aux plus éloignées que par eelles qui les
auroient précédées.
Les autres Sciences, qui font égalcment
a
la lor–
tée de l'efprit humain , n'ont pour principes que des
idées fimples, qui nous viennent nr lenlation
&
par
'téflexion. POlLr en acquérir les notions omplexcs,
nous n'avons, comme dans les Mathématiques, d
'¡¡U–
tres moyens que de réunir les idées ftmples en dífli!–
rentes colleaions :
il
y faut donc fuivre le meme or–
dre dans le progf(!s des idées,
&
apporter la meme
précaution dans le choi:" des fignes.
En ne raifonnant ainfi que fur des idées fimples ,
ou fur des idées eomplexes Cj1ú feront )'ouvrage de
l'efprit, nous aurons deux avantages ; le premier ,
c'eH Cj1le connoilTant la génération des iclées fur lef–
quelles nOU5 méditerons , nous n'avancerons point
que nous ne {acllions orl nous fommes >comrnent
n0115 y fommes venus,
&
cornrnent nous pourrion
retomner fm nos pas : le feeond, c'efi que dans cha–
que matiere nous verrons fenftblemenr <[uelles Cont
les bornes de nos connoiífances ; car n01lS les trou–
verons 10l{Cj11e les fens ceiferont de nons fOllrnir des
idécs,
&
que, par conféquent, l'efprit ne pourrlI
plus forrner de nOlions.
Toutes les vérités fe bóment aux rapports Cj11i
{ont entre des idées ftmples , entre des idées com–
plexes,
&
entre une idée limpIe
&
complexe. Par la
rnéthode de
l'nnalyfi,
on pourra éviter les erreurs
ou l'on tornhe dans la fecherche des unes
&
des au–
tres.
Les idées fimples ne penvent donner lieu a aucu–
ne rnéprife. La caufe de nos errenrs vient de ce que
nOllS retranchons d'une idée quelCj11e chofe qui hú
appartient , paree que nous n'en voyons pa5 toutes
les parties ; ou de ce que nous lui aJolltonSquclqllC
chofe q¡Ú ne
lui
appartient pas, parce que notre ima–
gination jllge précipitarnrnent ql1'elle renferrne ce
qu'eUe ne contient point. Or, nOllS ne pouvons rien
retrancher d'une idée fimple , puifque nous n'y dif–
tingllons point de partie5 ;
&
nous n'y pouvons rien
ajollter tant que nous la cotIfidérons cornme funple,
punCj1\'elle perdroit fa fimplicité.
Ce n'efi que dans J'uCage des notions complexes
qu'on pOllrroit fe tromper, foit en ajoutant, í6it en
retranchant Cj11elque chofe rnal-a-propos : mais
fi
nous les avons faites avec les préc3utions que je de–
rnande,
il
fulJira , pour évirer les mépri'fes , d'en re–
prendre la génération; car par ce moren nous
y
verrons ce qu'elles renfertnent ,
&
rien de plus
ni
de
rnoins. Cela étant, quelques comparaifons que nous
faffions des idées limpIes
&
des idées complexes,
nous De lem attribuerons jamais d'autres rapport
Cj11e ceux qui leur appartiennenr.
Les PhiloCophes ne font des raifonnemens fi obf–
curs
&
fi confus, <fUe parce qu'íls ne
foup~onnent
pas
Cj11'il y alt des idées qui foient l'ouvrage de refprit, oa
Cj11e
s'ils
le
foup~onRent
, ils (ont incapables d'cn
clé–
COllVrÍT la géneration. Prévenus que les idées lont
lIt–
n 'es / ou qt1e , telles qu'elles fom, elles OM
lit
bIen