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COM
La
comldie
efl: beaucoup plus propre que la
trag~dic
a
donner des fcenes infl:ruCl:ives. Les evenemens
tragiques font hors. du cours ordina_ire de la nature,,
au lieu qu'il fe prefente tous
Jes 3ours des cqs ou
l'heureux fucces depend du bon fens , de la prudence ,
de la moderation, de la connoilfance du inonde ; de
la droiture ou qe quelque
va tu
particul iere ,
&
oll
l'oppofe de
c~s
qualires produit le defordrc
~
l'em–
barras. II
n'y
a point d'homme qui, par fes liaifong
civiles
&
morales, ne puilfe
a
tout moment
fe
trou–
ver dans des conjonCl:ures ou fon precede envers Jes
l!Utres,
&
fa
fa\'.on <le perifer en general, aient uno
influence fenfible fur fon
fort. Si notrt: curps di: ch<1-
que jour expofe
a
divers accidcns , nocre ecac moral
pe
l'e!l pas moiris. Pouvons-nous un feu l moment nous
promecm: de n'avoir ni proces, ni infulces, ni difpu–
tes , de ne nous point faire d'ennemis , ou de n'emi–
pas la duppe d'aucrui
?
Tanroc pour noqs epargner
des embarras
&
des chagrins, la prudence exige quo
nous fachions plier, tantot que nous ayons unefer–
picre convenable ,
&
que nous fachions memc confro–
carrer des perfonnes que nous n'ofons ni ne voulons of–
fenf r. Tancoc ii s'agit da nous calmer nom-memes,
tancoc de calmer les autres ; ici c'efl:
a
nom
a
faire en–
tendre raifon
a
une perfonne prcoccupee'
Ht
c'efl:
a
nou~
a
ecouter Jes avis d'autrui ,
&
a
Jes pefrr avec impar–
tialite ; .un jour nous Commes appd!es
a
pacifier. Jes
_HUPrelles des aurres ;
le
lendemain
n~us
cjevons nou5
Jailfer reconcilier.
f/eniam dare
petereq"'e
vici/Jim ,
~'c{t
Iii
plus freq4ente occupation de la vio
fo~i;ile.
~1i
feroit l'hommc alfez depourvu de raifori, on
pourroir dire alfez brutal , pour ne pas ddi rer d'avoir
fous Jes yeux des modtles exacts
&
bien deffine , 9ui
".Jui indi9uent d'une maniere ·lumineufe ce qui lui con–
vienc de faire
&
d'eviter en mille ronconrres cl'ell de–
pendent
fa
rranquilli~e ,
fon honneur, fouvent tour le
bonhcur de fa vie ? Cc feroic vaincn1·nt qu'il voudroic
confuher Jes traices de morale; ces ouvrages,, quel–
que excel\ens qu'i ls foien c, s'6noncent d'une
mani
.;r~trop genhale
1
l'applicatian de kur$ precepres , au c.is
.pariiculier qui
fr
prefonre , n'dl: ni ft1re ni
faci~e.
lJn'y
a quc le
chea~rn corniqu~
qui , po\lr
totlte~ le~
fccoes de la vie humaine , puif\e fqurn ir les
vrai~
mo–
-~:ltles
clt1
bon
&
du mauvais; d'un procede rdifonna,ble
~
d'µn procede fou ; d'a'llnir
le<
cas
y
font deccrmi–
n6.< par des circqnllances fi pr.:cifes , q "" -le fpcCl:atc;tlt
p'y
apprenq pas fim
lemenr ce qu'il doir fqire,
m~iJ>
e,ncore con1ment ii doit
le
faire; la
comfdie
ne fe b0rne
pas.~
un jugcment
lpeculmf, ellc joint
le
jug~me
c
p ranque, qui dt
le
frul utile dans la vie.
_ Perfonne ne
douc~ra
que ccs imporraos objecs door
.nous venons de p<1rler, ne
foient les vericabics fujec-s
donr la
comidif,
<levroit s'occupcr. C'cfl:
~
l'intclligc,nce
~
a\l genie du poere com•que
:.
lcs rraicer de ma01c:–
re qu'ils dev1ennenc cres-infhuetifs,
&
par confequent
.Jre~
intertlT.
n.~
pour tout homme qui aime a reflechir;
{11a1s comrn,e d'apres ceue notion la
com.Edie
ne feroit
que la philofophie prarique mife en aCliun , ii ell clair
que pollr y travailler avec iucce
, lcs tJlens du poen:
<loivem fare accompagnes des connoi!fances du
vrai
p hilofophc moral ; c'ell:
i~i
9u'on peuc dire avec f!orace;
• '. . :
Neque
~nim
co11cl1idere ver/um
1Jzxents ejje fqtu
.....
·
Le genie poerique denuc d'autres focours
feroic
d'une foible rdfource, fi
l'auceur ne fait pas 'embraf–
fer d'un coup d'reil l'enfemble de la vie civde s'il n'a
pas a(fez <1ppprofondi la nature: hum.iine , s'il
~econ:
noic pas tous les replis du ere r de l'hom ne , s'il n'a
pas k don <l'apprecier la
fag~lI'c
, la
v
·rcu ,
l'honne–
!ete , fous
q~el9u~
form_e qu'd les paroilfenr ;
&
s'il n'a
pas encore demele
lcs lources morales
&
pfycholoai–
ques d'ol\ decoulent le. craver< , les folies
&
les 16c.
tifcs des fiommes, il ne !era jamill.S un excellent poe-
~i;
comiq
ue!
·
CO M
Faut-il s'etonner
~pre<
cela que ce
tJlcpt
foit·
Ii
ra:
re ? II
n'y
a que les meilleures retes de la nation qui
puilfent excellcr <lans
cc
genre.
rous ne parlons
pa~:
ici du genie, car le genie feu l , fans unc grande ex.
periencc du monde , ne fauroir donner
tout
ce que le·
theatre comique exige
1
ii demande des <;onnoilfances
qu'an o'acquiert point dans la recraice d'un qbinet.
four les acquerir , il fauc avoi r vu les hommcs fous
leurs diverfos
relations mucuelles , avoir obfcrve lrnrs
aCl:ions
&
leurs mouvemcns en
"lie renconrres ,
&
avoir ere foi-1nen1e aeteur avcc eux : fans cecce rccon.
noilf3nce praciqqe , on auroic ecuE113 touce
la .vi;, les
regles du theatre, qu'on ne pourroit pas compofcr unQ
fcene vrairnenc bonne. Les
regle9 nc font utiks qu'a
~elui
qui a fa rrcivifion de maceriaux,
&
q11i
n'~(k
plus occupe qu'a leur donner une forme r' guliere.
A pres cc que nous avons die juf(lu'ici fur la natu .
ro de la
(omidie,
ii feroit tres-foprrflu de trairer au
long de fon ucilice. II en evident qu'e!le ne lo cede
Ct)
importance
a
aucun autre genre de pofjfie. Si la
coniir/io
1,1'ell: encore nulie part tout ce qu'ellr:
dev,roi~
ecre ,,pa
ne peut l'amibuer qu'a la neglig,.;ire de ceux 9ui ont
en leur main
le fort des b•aux am,
~
qur ne
fenti! nt pas alfez !'importance de cem: heureufe
in~en
tion pour egayer
&
inOru1re les homrne<. On env1fage
le
thearrn comme un amufernenc: cr n ell: un ;
fa
cha–
fe eO hors do ,doure ;
m~i pui fq u<'tf~n~
rie(\ <limihll.U
sle l'arnufeiner.t qp'il prnc.urc,
ii
pp~moit
avoir pne
puilfante
influen~e
fur
\es maittrs, <jU'il
ferv irgit;
a
~tendre
l'r;rnpire de la raifoo ,
&
le§
r~ncimcns
qe l'ho.n:–
n~tete,
a reprimer les
fo.lie~ ,
&·
a corriger les
vi~,
?e~
hommes , ne pas en
t~re(
un _p0rri
n.
u~i!c:;, i:·~
1m1ter cec ernpereur roroam , q:.11 m_eno1c a granc&
frais unc:
bell~
armee dans
les Gaules pour ne l'OC'•
cuper qu'a rarn.alfer des coqqili.ages .
r · , o.
~ant
a l'origine de
111
G.Pmidie
,
on n'a pas der_d.1·
tion bien fUres du liou
&
du rems de cecce 1nvenr1on.
Les"Ath 'niens fe l'attribuoient; rnais Arrltore a
a€jii
obferve qu'on n'avo1c
p~<
de<
rn~m~ires ~u(Jj
rerroios
fur l'originc: de
la
co111tdi~ ,
qu'on en avu1t
~
l'egard
de la crngedj.;_, II nous apprend qu'Epicharme
&
Phor•
mys .
TO\l!I
deux Sicili<'nS ' avoienc cte \es
premitrs .;~
inero_duire dans la
comedie
une atlion fu iv1e
&
d6cec•
.minee. C'eft
a
leur imica,tion que
C rar~
Arhenien , qui
n'a precede Ariil:ophanc que de qud ques anne 5,
COID·
pofa des pieces. .comiques d'unc forme regulicrc.
Juf.
qu'alors ce n'av•>it 61e apparemmcnc qu'un fimple di·
verciffemen t clc feces Bacchanal.:< , comme prd que rous
les peuples librcs c:n ant
tU
dan< rous ks rems.
JI
eft
vrailen1bJablc: que ces divercilfcmens dans lefquels on
fe permeuoit , •cornme on
le fai r encore aujourd'hui
en divers heux , d'auaquer par des bracards
&
des
injures cous
le< paffans ; ant donne. la pmniere idee
de la
comidie.
C'efl:
dU
m ins la plus ancicnne formr:
fous laquelle el
le
parut
a
A1henes ; Ari!lophane
re·
proche aux poeres comiqucs qui l'avoicnr precede,
&
meme
a
fos cancemporains dd
faire confifl:er kui'$
comtdieJ
en pure bouffonneries ,
&
en farces propres
a
faire rire !es enfans.
11
fe peut encore
qu~
la
comidi~
tire
fa
premiere origine des feces que
le
pcuple
f
i!oit
apres la recoltc de l.i moilfon'
&
des faryres pedon–
nelles qu'on
y
toleroir , pour lailfer un cours
libre
a
la gaicce groffiere des rpor[onneurs 9ui fouvent
n'c~
pargnoienc pas lcurs propre_s
maitre~.
.
La
fOtnidie
proprernenr dire euc lucceffivement tro1s
formes differences
a
Athe·ncs. J.,'anciennc
comEdie
s'y
introduifit vers la quarre-vingt-dcuxieme olympiade.
fforact ne no!ls nomme que rrois paeces qui fe foienc
dj!lingucs dan' cc genre, Eupolis , C:ratinus,
&
Ari•
ftophane. II ne nous re!le que des pieces de ce der•
nier ,
&
en petit nombre; mais elks fuffifeot pour
donner une idee de ce premier genre, L'aCl:ion y roule
fur des evenemens reels, arrives clans
le
terns rneme.
Jes perfoonages y fo'nt defignes par leur veritable nom,
&
ks mafquc:s imitoient meme leurs traits , aum exa.
Cl:ement que la
~hofe
pO\lvoit fe fore, On
y
jouoit
~