co
M
)~!
)mpremons
fo
diffipent
a
l'innant' parce que le
.!pell:ateur fent que d'un monde red qu'il penfoit ob–
fcrver, ii a 1JaBe dans un monde imaginaire.
Si le fimple doute, fur la realice de ce que le fpe–
ll:acle nous moncre, fuffit deja pour produire lln
fi
mauvais effet, qlle fera-ce lorfqu'on
y
rernarquera des
chofes qui lont rnanifellemenr oppofees
a
la nature?
L e fpedaceur en fera indigne ,
&
il n'aura pas torr.
,Voila pourquoi on n'aime point
a
voir des perfonna–
ges affell:er de la g ece , lorfqu'ils n'ont aucun fujec
de rire ,
&
qu'on ft: depite conrre le pofae qui veut
emporter de force ce que nous ne pou"·ons accorder
qu'a l'adre!fe.
~'un
auteur ait ell en certaines ren–
conrres une
heur~ufe
fai ll1e , une penfee
ingenieufe,
un fentiment vif
&
dcilicat , cela elt tres-bien ; mais
pourquoi fam-il
9
u'il mette ces belles chofes clans la
bouche d'un de ces perfonnages, qui par fon cara–
Clere,
OU
par fa
fituat10n acruelle" ne devroit point
1es dire? Qu'y a-t-il, par exernple , de plus infipide
que cette froide plaifanterie que
l~laute
met clans la
bouche d'un amant affiige de la perte de
fa
rnaitre!fe?
]ta wihi
i11
peElore
&
i11 corde
f
4cit (lt11or i11cendi11m
Nt
lacrnmtl! os defendant,
Jttm
ardeat credo caput.
• Chaque ditcours, chaque mot qui n'a pas un rap–
'J>Ort ft:nfible
&
naturel au carachre
&
a
la firnatiOfl
'de la perfonne qui park, blelfe un auditeur intelligent.
· JI
ne 'fuffic pas meme que les penfees , les fentimens,
.Jes aCl1011s foie nt naturdles , la maniere de:
lcs expri–
<fi1er doit l'c!tre encore ; ii · faut que l'aB:eur, fur
la
fcenl: , s'exprlme precifemenu comme celui qu'il
re–
pr6Cente a
<
u
s'cnoncer. Un foul
terme crop haut,
trop reoherche , ou qui a!fortit mill
a11
caraCl:ere du
:Perfonnage, gace touce unc fcene;
fi
le con du dia–
logue n'dt pas nature! , la piece entiere
l'clra ftolde,
c·cn l'un des points les pins difficiles do l'art drama–
tique. Peu de
perfonn~s
meme, dans les converfations
.ordinaires , favent rendre
le
dialogue imfreffant. La
.plupart manquenc dans leur ; maniere de s'enoncer , ou
de brie,,,ete ou de precifion., ou d'energie;
leur di–
.fcours en langui(fant,
OU
vague,
OU·
fans
force. Le
ipofo: qui font ces defauts ,
&
qui
voudroit mieux
faire , tombe fouvent dans
l'ex es oppofe; ii donnc
.dans le fublime, le precieux, le mechodiqu<l<,
&
s'e–
-Carte du vrai. Horace a raffemble dam ks vers que
nous allons citer, tout ce qu'on peut prefcrire d'ef.
fcntiel fur
le
ny le
&
le
ton do la
COl)leaif.~
Efl
brevitale apus, ut currat fente111ia 11et!
fe
l mpet/.iat verbis laJ!as omra11tibus aure;.
Et fer111011e opus
eft
modi tri/li, f<1pe jorofo
J)efendente i•icem modo rhetoris, atq1le poe't.e
,
]11terdu111 urbani, parcentis viribus , atque
li.,xte111w11tis
~as
cQnfu/10.
Sermon.
l, XX.
Si
la
comMie
exige que tou-c
y
foit nature! , elle ne
demande pas moins que couc y foit interelfant.
Ma~heur au
poet~
comique qui f;:ra bailler une feule fois
Jes fpecrateurs.
11
n'efr cependant pas j'>«ffibk que !'a–
ction foit dans tous les rnomens de
fa
dureeegalemmt
vive
&
egalemen.t digne d'attention. II
y
a nece!faire–
ment des fcenes peu important<•, des pafonnag-.s
fu–
balcernes, de petits incidens qui n'iofluent que foible–
rnenc for l'aB:1on principale. Tous ces acceffoires ncan.–
moins doivent
incerdfcr chaeun d'eux '\
fa
maniere.
On fait comment s'y prennent les poeces mediocres •
Jes bons meme lorfque quelquefois ils s'oublient, pour
~epandre
de
l'iateret fur ces petits derails. lls imagi–
nent quelques fcenes epifodiques qui ne ciennent poirit
au fujet ,
ils dorrnent aux perfonnages fubalternei; des
caraCler7s. burlefques , pour amufer le fpt:B:3teur pa-r
!eurs
fatlli~s
pendant que !'action languit. De-la la plCl–
part de ces fcenes
toujours au
,fond
tri:s-infipides,
encre
~es valet~
&
Jes fuivantes qui s'epuilent en plai–
fantenes. P e-la lcs caracfrercs d'arlequin , de fcaramou.
cbe;
&c.
qu'on retrouve clans cant de
m11idiu,
quGi-
'Iome
II.
C 0
M
49~
que leurs habits o'y paroi!fent pas. II ne fuffit pas pour
excufer le poi!te de
di.reque ces fcenes
d~tachecs fo~t
dans la nature: , que lcs domdtiques en ont fouvcnt
de telles, tandis que leurs maicres s'c.ccupent dos plus
grands interecs ,
&.
que ceux-ci au milieu de !'action
principale font qudq llefois incerrompus par des alfai–
res ecrangeres. L'auteur n'en ell pas plus autorife.
ii.
faire entrer ces epifodes dJns Con
plan~
on ne lui de–
mande pas de nous mantra les chofes de la manierc
commune doot elks arrivenc tous les jours, avec tout
l'accornpagnement qui pem s'y
trouver , mais on cxi–
ge de lui qu'il les reprffeme de la maniere qu'elks o
0
t
pll
Ce
palfer,
&
qu'elles ont du le faire pour produire
fur un fpectateur intelligent
{3l
de bon gout le plaifir
le
plus vif
&
la facisfaaion la plus complttte.
Ces defams de recourir aux fcenes epilodiques , ou
a
des remplitfages languiffans , po>Jr cacher le vuide
de l'at1ioa ,
font pour l'prdinairc la fuire d'un man–
que de jugement ou de talent comique dans !'auteur
de la piece. Pour reuffir dans ce genre , ii fallt plus qu'en
tom amre un grand fond d'idees
&
d'imagination. Si
en developpant l'aCl:ion dans l'ordre naturel, il ne
s'o~fre rien
a
l'efprit du poete que ce qui fe prefentero1t
a
l'cfprit de tout le monde'
fi
fon intelligence ne pe–
netre pas plus avant dans l'interieur de fon fujet, que
jufqu'ot1 le fimple bon fens peut aller fans effort ; fi
les objets ne font fur fon imagination
&
fur fon creur,
que des
impref!jons ordinaires
&
communes , ii peut
en epargner le d_etail aux fpeClaceurs. Ceux-ci s'atten–
dent
a
voir fur la fcene des perfonnages qui dans toute_s.
les conjonchires,
les
firn ations ,
les eirconfl:ances
(e
difl:inguent du commun des hornmes par leur raifon, leur
efpric, ou leurs fentimens ,
&
qui pal' ce moyen pa–
roi!fent dignes de nous incerdfer. De tels
p~rfonnages
font toujours ftirs de plaire ; on
les voit' on les e.cou–
te avec fatisfact1on;
&
bien que leurs occupation, ac–
:rnelles n'aient rien d'imerdfant , leur maniere de penfer
&
de .fencir
repand du l'inceret fur la fcene la moi1:is
importance. L'intdligence , l'efpriE, l'humeur jovidle ,
tie '
caraCl:ere
font des chofes qlli excitenr notre
atten~
tion ' meme dans les evenemens de la vie les plus coi:n–
muns. Les moil)dres at'Eions d'un homme
fingul1er
amufent,
&
chaque mot d'un homme diCl:ingue par
fon efprit ou par fes
lumieres, fai c une
imprcffiun
agreable. Ainfi les
fcenes accc1Tu1res, pourvu qu'd–
les tiennenc reellernenc
a
l'acrion , peuvcnc tres bien
fC>U·
·tenir l'amntion dt:s fpeB:aceurs.
11
dl meme po!I_ible
de donner de l'importanee
a
des fcenes qui au
tond
ne font placees que pour remplir
le
vuidt: de l'aB:ion
lorfque celle-ci
ell:
arretee par quelquc: caufe inevita–
·b le. On peut employn ces fcenes
a
faire rai.fonner un
ou plufieurs pcrfonnages fur ce qui a _preced€ , fur la
pofition aB:uelle des chafes , fur ce qm
v~
fo1vre , ou
fur le c-aracl:erc: des autrcs at\:ems. C'e(\:. la le lieu prCT–
pre
a
placer des
reflexions lumintufes fur ce que
fa
piece concient de moral
&
d'in!huctif; mdis ii faut que
le pocte foit afrcz judicieux pour mcnre dans la bouche
de fes perfonnages , all lieu de penlees
crivi~les
_&
co_m–
munes, des rcmarques fines,
&
d'une applicat1on.b1e_n
juCl:e qui , rtpandanc un nouveau jour fur ks vemes
morales
&
philofophiques ,
&
l·eur donnant un
· pl~s
hauc degre d'energie, pu1!fent les
g~ave~
d.nsl'cf~nt
&
le
creur d'une maniere forte
&
1neffa
~able.
C en:
clans ces fceries la que les brlles maximes,
l~s
fencences
memorables , que lcs bons juges regardent
comi;i7
l'ob–
jet le plus
intere!fant de la pot'fie, font vemabl:–
ment
a
leur place
Il
y
a en effet tres-peu de
c~s v~rites praciques, qu'il importe tam
a
l
'hornn:i.ed
avo~r
confl:amment prHences
a
l'efprir,
qu'u~
poete·
co_m1~
que ne puilfe devefoppcr d'une inaniere egal,ement fiap–
pante
&
convaincanre, d;ms des fcenes de l efpece
~ont
nous parlons.
~oique
peu vives , ces fcenes ?ev1en–
nent tres-intere1Tantes pour des
fpeB:ateurs qui cher–
chent quelque chofe de plus quc
le
fimplt:
amuf~ment
des yeux
&
de l'imaginarion. Ce n'on que dans le
b~s
comique oll l'oa ae fauroit fupporter des fccnes
vm~
des d'acrion.
9.
q q
2