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C 0
M
.
des feenes ·<letachees pour en former une
eomidie.
I..:e
poi!te peche toujours contrc l'unice d'aCl:ion, des qu'il
fopp!)fe des evenemens qui ne font pas une fuite na–
turelle de la po!ition des chofes clans l'aC\:ion principa:
le, quoiquc ces evenemens repondent 'exaClement au
caraCtere de fes
perfonnag~s;
.car c'efh:carter le fpeCl:a.
teur de l'aetion qui feule doit l'occuper. Ain!i clans
l'Eu–
·nt1q11e
de Terence, la premiere fcene du troilieme aCl:e
a ce defaut ; die c!l rres-propre
a·
bicq carat.l:erifer
Thrafon, mais elle ne tient point
a
l'a'Clion.
Le but des
comedies
de caraCl:ere pcut etre'
OU
!im–
plement d'amufer par
la
bifarrerie du caraCl:ere , ou
d'infpirer du mepris
&
de l'averflon pour les caraCtc–
res ha'ilTables , ou de montrer ceux qui fon t bons
&
nobles, fous un jour propre
a
les faire aimer.
II
ell:
done aife de voir que cecre premiere efpece de
comidie
'cft fufceptible d'uryc grande variete.
La feconde·efpece ell: la
comidie
des mreurs. Elle a
pour objet de mettre fous les yeux du fpeCl:ateur On
t ableau frappant
&
vrai des ufages du du genre de
vie particulier, que Jes hom111es d'un Certain etat
OU
condition ont generalemenc adopt'es. Ce fera, par exem–
ple; le tableau de la cour, celui des mreurs des gens
·opulens·, celui d'une nation entiere. Les ·
comedies
de
tomes Jes efpeces rc:prefentent
·a
la verite des mreurs;
mais cette ef13ece particuliere faic fon objet prin•ipal
de ttacer les m<?:urs d'un genre de vie determine. C'eft
'ainli que Gay , dans fon opera des
Beggars ,
<iu des
G11utx,
qui a eti cant de fucces en Angletem:, donne
le
tableau des mreurs de l'etat le plus vii clans la fo.
ciete, celui des mendians. I:.es fpeClacles faryriques des
Grecs etoient des
comldie.r
de ce genre: on y
rnpr~fen-
to.itles mc:eurs des fatyres.
·
·
Cette efpect
'd~
comidie
admet une grimde variete de
caratleres ,
&
elle ell:
fufc~~tible
de beaucoup d'agre–
mens. Les mreurs des diverfes nations ,
&
des dilfe–
ren
s etats de la vie civile font un des plus agreables
&
cl.esplus intereffans objets de nos
reflexions. II
y
a -des mceurs ridicules , ii
y
en a de detdtablcs; mais
ii y tn a aum d'i.ngenues
&
d'aimables:
ii .
y
c:n a
merne dont
la defcription enchante. On peut, fans
fair~
de grands efforts d'efprit ,
imaginer um: 'acbon
propre
a
bien peindre Its mceurs qu'on fe propofe de
reprefen~cr.
I I
n'eft pas befoin de detailler i<:i. l'avan–
tage quc de pareils tableaux peuvent produire , inde- .
pendamment du plaifir qu'ils donnent. Chacun . font,
pnur ·ne cicer· que ce feul exemple, de quelle utilite
ii feroit de reprefenter fur
la fccne
Jes mceurs
&
le
fore de certe claffc de perfonnes perdues, que H ogarth
a
.(i
bie:n deffi nees clans fes eftampes , connues fous le
nom de
Harlof's-Progrejf.
T erence ·avoit deja fenti cet
avantage ,
&
l'a adm1rablement bien cxprime dans ks
vers que nous croyons devoir rap.peller ici.
Id
vero
e.ft,
quod ego
rnihi puto palmarium
M e rep
eriffe,
quomo4o adolefw1t11lt1s
Meretricrms ingmia
&
mores poffet 110/arc :
Mature ut eam cognorit, perpettto oderit
!f<gtl!
dum Joris funt
,
nihil videtttr mundius,
Nee 111agis C011ipojit11111 quidquam' nee magis elegmu
fll~
cum amatore fuo cum c1E11a11t
,
ligttriunt.
Harum videre ingluviem , fardes
,
inopiam,
f12.!.iam
iahonejld! fold!
jint
domi , atque avidte cibi;
!fluo patio ex jur1 hejter1111, panem atrum verrent :
Nolfe omnia hrec , Caius eft adolefcentulis.
Eunuch.
at/..
Tl.
Jc.
4.
Mais pour retirer cet important avantage de la
c11-
midie,
ii faudroic fans douce que le poece
&
les atlrn rs
excellalfent egalement clans l'art de peindre; clans cette
fop polition , on croit pouvoir dire que de
tous les
fpectacles dramatiques , la
comidie
des mc:eurs feroit la
p l. s utile.
Une
tl'oi!iem~
efpece de
comidie
feroit celle qui s'at–
tacheroic
a
reprffenta une licuacion parciculiere
&
in.
terelTante. Celle d'un pere malheureux , d'un homn_ie
C 0 M
Ceduit·
a
}'indigeflce ,'
OU
auffi Ja ficuation plus parti.
Culiere
a
laquelle peut Conduire tolle
OU
tdle a tion
bonne ou mauvaife.
II ne femble pa's difficile d'inventer une aetion qui
donne lieu .au poere de mertre clans tout 'fon jour la
ficuatiori qu'il aura choi!ie. Des
comidres
clans cc aot)t
formeroient mi tableau vivant des b1ens
&
des
n~aux
de la vie humaine,
La ·moindre efprce de routes , c'e!l la
comidie
d'in–
trigue; l'atlion n'en eft erablie ni fur k
carat1r~c ,
ni
fur la licuation des perf\mnages; elle n'incerclli:: que
par la fingularite des
~vC:nemens
,
&
le merveilkux de
!'intrigue
&
des incidens, une fuite vari.:e d'avcntu.
res extraordinaires ; inattendues , fou venc romnnefque; ,
qui fe fuccedent coup fur coup ,
&
qui
font croicre
l'cmbarras, font tres-propres
ii
foutenir l'atrrntion .Ju
fpetlateur jufqu'au moment ou l'acbon fe cerm1ne pur
un denouement imprevu. Ce genre 'eft
le plu< tau.e
de tollS;
ii
exige plus d'imagination q mi de
jogcmc.tt.
II ne faut meme qu'un degre d'imagination affez
m€.
d iocre, pour crouver urn;. foule d'incii.Jens, qui en
fe
croifant reciproquement' mectent obtlaclt:
a
des def.
feins precs a
s~accomplir,
donnent lieu
a
des inJrigues
bizarres,
&
retardent ainli l'atlion pendant quelques
aCles. Les
comedies
de cene efpece ne font geanmoins
pas
a
rebuter ; elles
fervent
a
l'amufement'
&
a
la
d iverfite ; elles
font d'ailleurs propres
a
fournir de
tres-jolies fcenes
a
tiroir. .
c!=
petit nombre de remarques peut fuffire' pour
montrer quel vatle champ eft ouverc au poece comi–
que,
&
quels font les a-vantages
&
les plai!irs v_aries
qu'on pcm retirer de cctte feule branche d, s beaux arts.
Touces ces remarques ne roulenc encore quc fur le
fujet general de la
comidie.
En examinant la chofe de
plus pres , ii
fe
trouvera· peuc-etre que le pn x de la
comldie
depend moins du fujet, que de la manicre de
le traicer. De la mei,llcurc piece qui aa jamais ece·
mife fur la fcene, on pourroit aifemenc fa ire unc piece
cleceftable fans rien changer. ni au fujet' ni memc
a
l'ordonnance,
&
a
la ph'1parc des
!ituaiions. Tout
comme un traduCl:eur mal-adroit fcroit de I'
l/iade
une
mauffade epopee; ou comme un mau•ais pcintre
fi::–
roit d'un des meilleurs tableaux de Raphael , une co.
pie infupportable aux yeux des connoiffcurs.
II rffulte dela que !'invention , le pl n
&
l'ordon–
nance du fujet ne font encore que Id rnoindre parcie
de l'ouvrage; ce n'elt que la charpente d'une
com/die.
11 lui faut fans doute un corps ,
&
ce corp$ dorc avoir
une fornie agreable,
&
des membres bien proportion-'
l)es. M ais ii lui fa ut principalemerrt de la
vi~, u~e
ame qui penfe,
&
qui aic du fentiment. Or cette vie
fe
manifdl:e par le dialogue , par la maniere done les
perfonnages expriment ce qui le pa!Te en eux, par des
imprellions exaCl:ernent conformes
a
la nature des cir–
conftances. Un fpeCl:ateur intelligent frequente
le
fpe–
Cl:acle, bien moins pour y voir des evencmen
~ema~quables , ou des. fituations lingulicres qu'i l in'Mgrnero1t
lui -meme en cent manieres tout aum amufances, que
pour obferver l'effet q ue .ces evenemens ou ces !icua–
cions font fur des hommcs d'un certain genie , ou d'un
certain carafure.
II
fe plalt
a
remarquer
l'atticude,
les gell:es , la phy!ionomi.e , les difi:ours
& .
I~ cont~nance entiere d'une perfonne done l'ame don ecre agt·
· tee par tel le ou ·telle paIlion.
..
D e la nailfent les
princip~les
regles que
le
~ode
comiquc: doit fuiv re dans fon
travail. La
premier~.·
&
la plus importante, c'eft que ces
~erfonnages
fu1-
veot exaCl:ement la nature clans leurs d1fcours
&
.dans
leur' aCl:ions.
II faut que dans. tout
fpeCl:a~le
dra,rna–
tique , le fpetl:ateur puilfe oublter _que ce n.ttl qu
~ne
produCtion de' !'art qu'il a fous ks yeux; 11 ne f Jute
parfaitcrnent le plailir du fpetlacle qu'aut-ant qu
ti
n.e
voit ni le poece , ni l'aCl:eur. Auffi\ot qu'il ai;iper\: 01 t
quelque chofe qui n'rft pas clans l'ordrr: de
la natu–
re
ii fore de foo aareable illufion, ii fe recrouvt au
chJam: ;
le
fpeCl:acle
0
fait place
ii
la criti uc; coutcs