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faire une impreffioR auíli vive (ur nous , q\le celles

dont I'obje[ eíl: en nous-m&mes: de forte que pour

nier les premieres , il faud roit etre hors de (oi;

&

pour nier les alltreS , il ne fau[ qu'etre hors de la rai–

Ion.

C'efr une maxime parmi les (ages, direz-vous,

&

comme une premiere vérité, dans la morale , 9;ue

la

,,¿ridn'ejIpoint pour la multitude.

Ainfi il ne paroH pas

judicieux d'établir une regle de véri[é (ur ce qui eíl:

jugé vrai par le plus grand nombre. D onc le

fins

commun

n'eíl: point une regle /infaillible de la vé–

rité.

Je réponds qu'une

vérit~

préci(e

&

métaphyfique

n e (e me(ure pas

11

des maximes eommunes , dont la

vérité eíl: toujQurs fujette

a

différentes exceptions :

t émoin la maxime qui avance, que

la voix du peuple

ejl la voix

d.

D iw.

11 s'en fam bien qu'elle (oit uni–

verfellement vraie; bien qu'elle (e vérifie a-peu-pres

a\lili {ollvent que eelle qu'on voudroit objeaer, que

la

virúi n'ejl poim pour la multiwdc.

Dans le (ujet

meme dont il s'agit, touchant les premiers principes,

cette derniere maxime doit pa{[er ab(olument pour

~rre

fauíI'e . En elfer , fi les premieres vérités n'é–

toient répandues dans l'efprit de tous les hommes , il

feroir impoffible de les faire convenir de rien , pui{–

Cju'ils auroient des principes dilférens {ur

rout~s

{or–

tes de {ujets. Lors donc qu'il efr vrai de dire que la

"érité n'efl poiru pour la fnlllútude,

on entend une (orte

de vériré, qui , pour etre

apper~l1e,

{uppo{e une

attention , une capacité

&

une expérience parricu–

lieres, prérogatives qui ne font pas pourla multitude.

Mais eH-il queíl:ion de premiere vérité, tous {ont

philo(ophes

a

cet égard. Le philo{ophe contempla–

tif avec touS (es rai(onnemens n'eíl: pas plus parfai–

teI1)ent convaincu qu'il exiíl:e

&

qu'il penie , que l'e{–

prit le plus médiocre

&

le plus fimple. Dans les cho–

fes ou il faut des connoiíI'ances acqui{es par le rai–

fonnement,

&

des réflexions particulieres , qui {up–

po{ent certaines expériences que tous ne {ont pas ca–

pables de faire,un philo(Qphe eíl: plus croyable qu'un

autre homme : mais dans une chofe d'une expéri ence

manifefre,

&

d'un {enti(l1ent commun

a

tous les hom–

mes, touS a cet égard devieonent philo(ophes: ee for–

te que dans les premiersprincipes de la nature

&

du

fins commun,

un philofophe oppofé au refre du genre

humain, efr un philofophe oppofé a cent mille autres

philo(ophes; parce qu'ils (ont auiIi bien que lui in{–

tnlÍts des premiers principes de nos fentimens com–

muns. Je dis plus; l'ordinaire des hommes eíl: plus

croyable en certaines chofes que plufieurs

philo{o–

phes; parce que ceux-lil n'ont point cherché a forcer

on

a

défigurer les {entimens

&

les jugemens , que la

nature in{pire univerfellement a tous les hornmes.

Le fentiment commun des homrnes en général ,

dit-on, efr que le foleil n'a pas plus de deux piés de

diametre. On répond qu'il n'ea pas vrai qHe

le

{en–

timent commun de ceux qui font

a

portée de juger

de la grandeur du foleil, foit

qu'il

n'a que deux Otl

troi6 piés de

diamet.re

. Le peuple le plus gronier

s'.e~

rapporte fur ce p01l1t au cornmun, on a la [otalite

des philofophes ou des afrronomes,

pl~ltOt

qu:au

t~moignage de fes propres 'yeux. Auíli n

a-H~n J~~als

vu de gens, meme parrnlle

p~uple, . fo~temr

{i

n eu–

fement qu'on avoit toft de

CrOlnl

le tole!l plus grand

qu'un globe de quatre piés. En effet '. slil s'étoit ja–

mais trouvé quelqu'un alfez peu écJ¡uré pour con–

tefrer la-deíI'us

la

contefration auroit pu ce1fer au

moment mame' avec le (ecours de l'expérience ; fui–

fant regarder

a~ ontr~~f3lilt

un objet

or~nai re ,

qui,

a

proportion de (on eloJgnement , paron aux yeux

incomparablement moins grand , que quan? on s'en

approche. Ain{¡ les hommes les plus ftupldes {Ont

perfuadés que leurs propresyell:" les trompent (ur la

,vraie étenc4te des Qbjets. Ce JugemeIU

n'ea

done

SE N

p3S un fentiment de la nature , puiCqu'au contraire il

eíl: univer(ellement démenti par le (entiment le plus

pur de la nature

rai(ol1l~able,

qui eíl: celtli de la ré–

flexiono

- SE -S MORAL, (

Moral.)

nom donné par le favant

Hutche(on

11

cette faculté de notre ame, qui di(cer–

ne promptement en certains cas le bien

&

le mal

moral par une {orte de (en(ation

&

p;¡r gota, ind6.–

pendamment du rai(onnement

&

de la réflexion.

C'eíl:-la ce que les autJ'es moraliíl:es appellent

injlinél

moral,

{entiment, e(pece de penchant ou d'inclina–

rion naturelle qlÚ nous porte

a

approuver certaines

cho(es comme bonnes ou louables,

&

a

en condam–

ner d'autres comme mauvai(es

&

blamables, indé–

pendamment de toute réflexion.

C'eft ainfi, qu'a la vue d'un homme qui (oulfre ..

nous avons d'abord un Centiment de compaffion, qlÜ

nous fa-it trouver beau

&

agréable de le (ecomir.

LI! premier mou vement, en recevant un bienfait,

efr d'en {avoir gré,

&

d'en remercier notre bienfai–

teur. Le premier

&

le plus pur mouvement d'un

homme envers un autre , en fai{ant abaraaion de

toute rai{on particuliere de haine ou de crainte qu'il

pourroi[ avoir, eíl: un (entiment de bienveillance ,

comme envers {on (emblable , avec qui la conformi–

té de nature

&

de befoins liento On voit de meme

que, fans aucun rai(onnement, un hornme groiIier

{e récrie {ur une perfidie comme fur une aaion noire

&

injuíl:e qui le bleíI'e. Au contraire, teoir (a paro–

le, reconnoltre un bienfait, rendre a chacun ce

<¡tú

lui efr dtl, {oulager ceux qui (oulfrent, ce (ont-Ia

autant d'aaions qu'on ne peut s'erupecher d'approu–

ver

&

d'efrimer , comme étant juíl:es, bonnes, hon–

netes

&

utiles au genre humain. De-la vient que

I'e{prit {e pla!t a voir

&

a entendre de pareils traits

d'équité, de bonne-foi, d'humanité

&

de bénéficence;

le creur en eft touché , attendri_ En les li(ant dans

l'hifroire on les admire,

&

on loue le bonheur d'un

fieele, d'une n¡¡tion, d'une famille oh de

fi

beaux

exemples {e rencontrent. Mais pour les exemples da

crime, on ne peut ni les voir, ni en entendre par–

ler fans mépris

&

fans indignation.

Si I'on demande d'Oll vient ce mouvement

du

cceur, qlli le porte

a

aimer certaines <la ions,

&

a

en détefier d'autres fans raifon Rcment

&

fans exa–

men , le ne puis dire autre chofe , fi non que ce moa–

vement vient de I'autcur de notre etre , qui nous a

faits de eette maniere,

&

qui a voulu que notre na–

ture

fttt

telle , que la dilférence du bi en ou du

mal

moral nous alfetHIt en certains cas, ainfi que le fait

celle du mal phyfiql1e. C'eíl: donc la une (orte d'inf.

tina, comme la nature nous en a dooné pl1i{ieurs

auu'es , afin de nous déterminer plus vlte

&

plus for–

tement la ou la réflexion (eroit trop lente. C'efr,ainli

que nOllS fommes avertis par une (en(ationintériell–

re de nos be(oins corporels , pour nous porter

a

faire promptement

&

machinalement tout ce que

demande notre con(ervation. Tel efi auffi cet in(–

tina qlli nous attache a la vie ,

&

ce

de~r

d'erre hell–

reux , qui efr le grand mobile'de nos aaioos. T elle

efr encor e la tendre{[e prefqu'aveugle , mais tres-né–

cefiaire, des peres

&

des meres

po.ur

leurs enfans.

Les be(oins pre{[ans

&

indi{pen(ables demandoient

que l'homme

fUt

conduit par la voie du (entiment,

roujours plus vif

&

plus prompt que n'eíl: le raifon–

nement.

D iel1 done a jl1gé

a

propos d'employer autli cette

voie

11

l'égard de la conduite morale de I'homme,

&

cela en imprimant en nous un fentiment

Ol!

un

goftt de vertu

&

de juíbce , qui décide de nos pre–

miers mouvemens ,

&

qui fuppl ée heureufement

chez la plupart des hommes au défam de réflexion;

car combien de gens incapables de réfléchir ,

&

qui

íO.Qt

remplis

el$;

e~. (~POlent

de

juili~!

Il

~toit

bien