SUB
Les quarre aurres vers fuivans, ne font guere mains
foblimes.
L' Eurne/ eft.fon nom, lt monde efl.fotl ou1Jrage,
JI
mtend les .foupirs de flmmb_le 1"'on.outrage'
Juge to11s
/ej·
mortets
A
ave~
d'ega/e,· /ou,
.
Et du hatst de
fon
tro11~
mterroge les Roti
·
Un raifonnemenr , quelque beau qu'il foic, ne
f~i r
poinr le
fisblime ,
mais il peuc y ajouter quelque cho–
fe. On connoit le fermenr admirable de
Dén~~f\hc
ne;
il
avoit confeillé au peuple
d
1
~thenes
de latre la
guerre
ii
Philippe de Macédoine,
&
quelque tems
apres il fe donna une bdtaille ou les Athémens furent
' d éfdits: on lit la 11aix ,
&
daos la fui ce l'orateur .Ef–
chine reprochd en juf\ice
a
D émoflhenc fes aot.¡Íetls ,
&
fa conduite dans cette guerre, done le mauvats fue–
ces avoit été fi funelle
a
ron pays. Ce !\rand homme,
roalgré fa ditg race, bien loin de fe ¡ufblier de ce re–
proche , comme d'un crime, s'en ¡ufhlie devane
le~
Athéniens
m~me,
fur l'exemple de leurs
anc~tres
qtH
avoient combattu pour la liberté de la Grece, dans
les o.:ca fi ons les plus périlleufes;
&
il
s'écrie avec
una hJrdiefle héro"ique:
notl, Mef/ieurs,
110tii
t¡'pvez
poínt failli, j 'en j"re,
&c.
Ce crJit , qui ell e trémement
foblime,
ren(erm.e
un cai[onnement invincih le ; mais ce n'ell pas ce rat–
fonn.:ment qui en fai t la
fisblimit¿,
c'ett cette foule
de g rands objecs, la g loire des
:"'-chénien~,
leur amour
pour la ltbercé'
1~
valeur de leurs ancetres' que
l'ordteur traite comme des
dieu~ ,
&
la magnanimité
d e D émoflhene , aum élevée que toutes ces cha–
fes enfemble; enfin
e~
qui en augmente la
~eauté,
c'ef\ qu'on y trouve en petit toores les perfeé\tons du
d ifcours raf!crnblées, la noble{fe des mouvemens,
beaucoup de délicatefle , de g randes imagei, de grands
fentimens , des figu res hardies
&
naturelles; une for–
ce de raifonnement:
&
ce qui e{\ plus admirable en–
care , le creur de Oémofihene élevé au-def! us des mé–
chans fucces par une vercu égale
a
celle de ces grands
hommes par lefquels il jure.
Il
n'y avoit que luí
a
u
monde qui puc ofer, en préfence des Athéniens, juf–
tilier pa r les combats
m~me
ou ils avoient .été vifro–
r.ieux, la def! ei n d'une guerre ou ils avoient été de–
faits. P:trlons
a
préfeot ou
fi•blime des ftntimens.
Les fentimens fonc
{tsblimes
quand fondés fur une
vraie vertu , ils paroi{fent
~ere
prefque au-delfus de
la condition humaine,
&
qu'ils fon t voir, comml!
l'a d>t Séneque, daos la foiblcífe de !'humanicé, la
confl~nce
d•un D ieu; llunivers tomberoit fur la
t~te
d u juf\e, fon ame feroit cranquille dans le cems
m~me de fa chute. L'idée de cecee tranquill ité, corn–
parée avec le fracas du· monde encier qui
f~
brife,
efl une image
fisblimc,
&
la tranquillité du JUfle ef}:
un iencimenc
jublime .
Cette elpece de
fisblime
ne fe
trouve point
daos
l'ode' paree qu' il tiene ordinaire–
ment
~
quelque
~~ion,
&
que daos l'ode i!
o'
y;¡ point
d'afrion . C'elt daos le poe 1e épique
&
d~ns
)e dra–
marique qu'tl regne principalement. Corneille en ef}:
rem¡ol i .
Daos la Scene !V. du
T.
aél. de Médée, cette prin–
cefle p:trlant a
13
conlidenre, l'alfure qu' elle
faur~
b ien venir
ii
bouc de fes ennemi> , qu'elle compre
m~•ne
ince!Fdmmenr s'en venger ; Nérine fa
conndent~
)ui dir:
Ptrdez 1'aveugle dj>oir. done votts ltes .(édt!Íte,
Pour voir
m
que/ etat le jort vo11s a red,.tte .
Votrc pays vo"s bait, votre épou>: efl.fims foi;
Co1tfre taut d'ennemis que v ou.- re.fle-t-i/1.
A quoi
répc¡~d
Médée,
Moi;
Moi , tlir-je,
&
c'efl affiz,
Q ue Médée eGt répondu:
mon art
&
mon cpurage;
cela lero1; tres-noble
&'
couchanc au grand; qu'elle
dile fim plcment ,
moi:
voila du grand; mais ce n'efi
point encare du
Ji•blime.
Ce monofi llabe annonceroit
de la n13rpere
la
plus vi11e
&
la plus rapide , jufqu'ou
va la grandeur du courage de Medée; mais cene Mé–
dée ef\ une n1<!'chanre fco1me, done on a pris foin de
me fJi re connoirre cous les erimes ,
&
les moyens done
~lle
$'e{\ fervi pour les commettre .
]e
ne fui s done
point é¡onné de fon audace; je la vais g rande ,
&
je
¡n'attend9is. qu'.eUe
le devoi t etre; mais quand elle
; épete:
11101,
du:Je,
&
c'ejl alfer:. ;
ce n'efl plu' une
f épot.tfe
vive~ ra~ide
1
fruit
d'un~
palijon
~v~u~le
&
SUB
turbulente; e'e{\ une répbnfe vive,
&
pourt3nt de
fang-froid; c'e{\ la
réRexion, c'efl le ra1 fonnemenc
d'une pallion éclairée
&
rranquille dans f
a violence:
moi,
je ne vais encare que Médée:
moi,
dis.jt,
je
ne vots pl,us
qu~
fon
coura~e
&
1~
joui{ia
nce deIon
art ; ce
q~
ti a d odteux a dtiparu ; ¡e commeoce ¡¡de–
venir
elle-n~ém.e,
je réRéchi.s
,avec
eUe,
&
je conclus
avec
elle;
& •·
•fl alfoz:
votla le
jisbüme;
e'
e{\
pa rri–
culfer€ment ce
c'efl lljfez,
qui rend
fi•blime
rou
te la
répon[e .
]e
ne dauco porn t un intbnt que
M¿dée
feule ne doive
~tre
t'upérieure a tous fes enncmis;
el le en trtomphe aéluell ement daos ma penféc ,
&
malgré moi, fa ns m'en apperce voir
m~me,
je panagc
avec ell e le plaifir d'une vengcance aflurée . C'e{\ ce
que le
moi
tout feu l n'eilt peuc. erre 11as fai t. J e fais
que
Ñf.
Defpréaux, fuivi
p~r
plufieurs critiquq, fem–
ble faire confifler le
jtsblime
tle la réponfe de M;é–
dée, daos le feul monofiltdbe
moi;
mais
j'ofe
~ere
d'un avis contraire.
Vous trouverez un autre trait du
(tsbtime des {.tl–
ti~t~ms
daos la V
l.
[cene
du 111.
afr. des Horaces .
't.Jne
femme qui avoit af!if\é au combar des crois Horaces,
centre les rrois Curia
ce' ,
ma is qut n'en ava ir point
vu la fin , vient annqncer au vieux H t•race pere, que
deux de fes lils avoient été ttJés ,
&
que le uoifieme
fe voyant hors d'érat de réfift,·t·
contre croi>, avoit
pris la fui te ; le pere alors le monrre outré de
la
11-
cheté de fon lils, fur quoi
la
ÍCilur qui étoic la
pré–
fence , die
ii
Ion pere:
Qu•
vot~liez-'IJOUs
q11'il f ít contre trois?
I1
répond vivemenr:
!2!!'it 11(0111'1/t.
Oans ces deu,: exemples, Médée
&
Horace tone
rous deux agicés de paflion,
&
il e!l impoflible qu'ils
exprimene ce qu'ils fentent, d'une fac¡on plus pathé–
tique. Le
moi
qu'emploie Médée ,
&
á
qoi elle don–
ne une nouvelle force , non-feulemenr en le répé–
tant, mais en ajoutant
ces
deux mocs,
&
c'efl ajfez,
peine
a
u-dela de tout, la hauteur
&
la puiflanc" de
aecte enchanteref!e. I.e fentiment qu'exprime Hora–
ee
le pere , a la
m~me
force de heauté; quand par
bonheur un mot, un feul mor peine énerg iquement
un fencimenr, nous famme ravis, paree qu'alors le
fen timcnt a été peine
avec
la
m~me
vitelfe qu'il a é¡é
éprouvé;
&
cela e{\ fi rare, qu'il faut nécef!diremenc
qu'on en foit furpris, en
m~me
cems qu'on en efi
charmé,
Ne dooFons point encare que l'orguei l ne prere de
la
beau t~
aux deux traits de Corneille . Lorfque des
gens antmés fe parlenr, nous nous
m~trans
mdchi na–
lement
ii
leur place: ainfi quand Nérine dir
a
Mé.lée,
contre tant d'ennt:mis, que
YO'IS
rd le-c-il? nous fom–
mes eHafiés n'encendre ce
moi
fuperbe,
&
r~pété
fu–
perbement. L'argueil de M¿ lée éleve le norre, nous
lurtons
nous-m~mes,
fans nous en appercevoir , con–
rre le fort,
&.
lui faifons fa ce comme Médée . Le
tps'il
mo,.rtlt
du vtetl -H orace, nous enleve: car comme
nous craignons
extr~m~ment
la more, il e{\ C<!rtai n
qu'en nous mettanc
ii
la pldCC d' Horace ,
&
nous trou–
vant pour un moment animés de la meme grandeur
que lu í, nous ne fa urions nous empecher de nous
~norgueillir
taaicemenr d'un courage que nous n'a–
vions pas le bonheur de connoltre encare. Avauans
done que les impreflions que fa ir fur nous le
ji;blimr
done nous venons de parler, nous les devons en oar. ·
rie
a
noere org ueil, qui fouvenr efi fart fot
&
fort
ridicule.
Une épaifle obfcuriré avoir couvert rout-a-cou);)
l!armée des Grecs, en(orte qu'il ne leur étoit pas pof,–
Gble de combattre; A¡ax qui mooroit d'envie de dol\–
ner baraille, ne fachanr plus quelle réfolu tion pren–
<lre, s'écrie alors, en s'adre!hnt
ii
J upicer:
Grand ditu, rends-nous le jo11r,
&
combats co11tre nous ,
<;'efl
ici af!Qr¿ment le rriomphe de l'org oeil daos
un crait de
fi•blime;
car en goilcant une rodomonra-·
de
(¡
gafeonne , on e{\ charmé de voir le rpairre des·
dieux délié par un limpie morrel . Nés tnus avec un
fond de religiop, il arrive q.. notre fond d'impiéré
[e
revei lle chez nous
avec
une forre de plaifir; la rai–
fo n viene enfoite condamner un pareil
pl~ifir,
mdis
felon fa coutume, elle viene rrop rard ,
Corneille me fournic encare un nouveau' crair de
Ji!blime des {e111imms,
que je ne puis
p~{fer
fous
4-
¡~nce .
Sq,