DE LA BONITE .
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bilement dans l'intéret de leur reuvre, mais qui se gar–
dent bien de compromettre la puissance morale qu 'elle
leur assure en heurtant l'autorité dont ils la tiennent, ou
meme en négligeant d'en faire usage au profit des chefs
sous le nom desquels .ils regnent de tait sur le pays.
Ainsi la mer est tabou (ou interdite) le mardi aux ka–
nakas.
Mais si les missionnaires se font de cette maniere les
auxiliaires de l'autorité indigene, ils ne manquent pas
d' employer les memes moyens pour étendre leur propa–
gande et hater la transformation apparente de ce peu–
ple, qui, en adoptant leurs lois et leurs innovations, se
dispose tout doucement
a
les considérer comme ses vé–
ritables maitres. Le tabou est la garantie de
l'
observa–
tion des préceptes de la religion nouvelle, et cette garan–
tie doit etre d'autant plus efficace qu'il y a toujours une
sanction pénale au bout de chaque interdiction . C'est de
cette maniere qu'on est arrivé en si peu de temps
a
chan–
ger la physionomie extérieure du peuple des Sandwich.
Comment les missionnaires se sont servis du tabou pour moraliser la population.
Autrefois, quand paraissait un navire dans les eaux
qui baignent ces iles, la premiere chose qui frappait les
nouveaux arrivants était la multitude de femmes qui ve–
naient l'assaillir, soit en pirogues, soit
a
la nage, et qui
se disputaient les libéralités des étrangers , en faisant pres
d'eux assaut de graces et de séductions.