PEROU ET BOLIVIE.
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halte en arrivant
a
Cnzco. Quant
a
la
cérémome am se taisait dans le palais
du souvera1n. Je soin en était exclusi–
ment réservé au plus agé des oncles lé–
gitimes de l'Inca régnant.
'
Amc
premiers rayo ns de l'aurore,
ils se prosternaient devant le soleil,
et le supptiaient de préserver la viile
et ses llabitants de toute calamité. En–
suite le jeüne éta it rompu, et ils man–
gea ient le pain pétri sans mélanl?e de
sang. Alors on voyait sortir
de
la
forteresse un Inca de sang royal,
richement vetu, et qui
s'annon~ait
com–
me courrier du so leil.
11
portait une
robe retroussée autou r du corps, et
tenait
a
la main une lance garnie de
vlumesdecouleur et de cercles d'or (*).
C'est dans cet équipage qu'il descen–
dait du hnut de la colline appelée
Sac–
sahuamam,
en brandissant sa lance,
qu'il lenait élevée d'un air menacant.
Arrivé sur la princi_pale place de la
ville, il était rejoint par quatre autres
Incas de sang 11oyal, armés de lan–
ces pareilles et vetus de robes égale–
ment retroussées. Le messageu céleste,
apres avoir touché de
~a
lance celles
des quatre Incas, leut· disait que le
so leil leur ordonnait, comme
ii
ses
agents et
a
ses lidel es seniteur , de
chasser de la capitale et de ses envi–
rons tous les fléaux et toutes les mala–
dies qu'ils y trou veraient. Aussitot les
Incas se met taient en marche, en s11i–
vant les quatre chemins qui aboutis–
saient
a
Cuzco et par lesquels les habi–
tan ts croyaient qu'on allait aux quatre
parties du monde appelées
Talmantin·
S?1!J1¿.
Eu
voyant passer ces courriers,
tous les hab1tants,hommes
tt
femmes,
jeunes et v1 eux. se mettaien t
a
la
fe–
nl:\tre
Oll
a
la porte de leurs maisons,
e~
poussaicnt de bruyan tes acclama–
t1ons, en secouant leurs robes, comme
s'ils e11ssent voulu se débarrasser des
miasmcs pestilentiels qu'elles étaient
censées contenir. Da ns leur crédule
en thou siosme' ils s'agitaient comme
des possédés, posant leurs mains sur
(•) Celle lance, ou une at•lre ornée de la
meme maniere, seJ'Vait d'étendard en temps
de guerre.
leur tete ' se frottant tour
a
tour le vi–
sage, les bras, les cuisses et les jambes,
pour les purger de tout atome morbide.
Ceci se pratiquait non-seulement sur
le passage des courriers, mais encore
dans les autres parties de la vi lle. Enfin
les
messa~ers
gagnaient la campagne,
·et se renelaient
a
un quart de lieue de
la capitale, dans un lieu désigné, ou ils
trouvaient quatre autres Incas. Ces
derniers, s'armant de leurs lances, fai–
saient, comme eux, une course d'un
quart de lieue. En se relayant ainsi les
uns les autres, ils faisaient cinq ou six
lieues dans quatre directions. Enfin,
arrivés au but de leur marche, les
derniers messagers plantaient leurs
lances en terre , pour montrer que les
ca la_mités publiques ne dépasseraient
pas cette limite.
La nuit venue, les habitants par–
couraient les rues, armés de tornhes
cnflammées (*), pour chasser les maux
rle la nuit, comme ils avaient expulsé
ceux du jom·. Puis, quand leurs tor–
ches étalent presque enti.érement con–
sumées, ils allaient en foule les jeter
dans la riviere ou, la veille, ils avaient
foit leurs ablutions. Si, le lendemain,
qu elqu'un trouvait au bord de l'eau
des'fragments de ces flambeaux consa–
crés, il s'en éloignait avec horreur, de
peur qu 'ils ne luí communiquassent les
germes de contagian dont on les sup–
posait chargés.
A
pres avoir ainsi mis en fuite, par
le
fer
et par le feu, les lléaux qu'i
Is
re–
doutaient, les Péruviens sacrifiaierit
au soleil et
a
la lune un certain nom–
bre d'agneaux, dont ils jetaient le sang
et les intestins dans les llammes , et
dont ils mangeaient la chair en signe
de réjouissance. Le reste de la journée
et les suivantes se passaient rn festins
anosés de libations quelquefois beau–
coup trop copieuses, et égayés par les
chants qui sortaient de mille poitrines
vigoureuses.
.Nous avons parlé plus haut des vier–
ges con ·acrées au soleil. Le Pérou
avait, en effet, ses vestales. Quinze
t•)
Ces torches, faites de paille natlée,
s'appelaient
poncw1cu.