MEXIQUE.
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jusqu'a la grande place, au centre de
la vi lle. Le temple du dieu de la guerre
était alors en leur pouvoir. Cortes
monta sur la plate-fomre de ce haut
édifice, et contempla de ce point <!levé
l'étendue de sa conquete et les progres
du siége. 11 vit que des huit quart1ers
dont l\'1exicp se composait, un seul
restait encore a prendre.
JI
br(lla d'a–
bord le temple des faux dieux, et
fit
de
nouvelles instances aupres des assié–
gés, qui, pour toute réponse, jurerent
de périr jusqu'au dernicr.
n
ne restait
done plus qu'a exécuter le terrible ar–
ret de la Providence contre des hom–
mes que rien ne pouvait fl échir, qui
repoussaient comme un outrage la
clémence du vninqueur, et portaient
le délirc et In bnrlrnrie jusqu'a sacri-
1ier a leurs dieux les Indiens envoyés
comme ambassadeurs pour traiter de
la paix ('). L'ordre fut donné d'attaquet·
sur tous les points, sur les canaux,
sur le tac, dans les rues et sur les mu–
railles. :En quelques heures, quarnnte
mille hommes furent tués ou pris;
quinze mille malheureux qui venaieút
se
rendre
furent
impito~·ablement
égorgés. Les creurs étaicnt .brisés aux
cris déchirants de ces paavres victi–
mes. Les Tlascalans et les autrcs na–
tions ennemies des Azteques se ven–
gea ient
sur clics
de deux sicclcs
d'outragcs. En vain Cortes et ses Es–
pagnols, le chef de Tezcuco et ses sol–
uats essayerent -i ls d'arretc1· le car–
nage,
il
ne cessa qu'avcc la nuit. On
remit au lendemai n
it
s'empnrer de ce
qui re tait de la place. Dans cette der–
nierc journée du drnme, les l\Jexicains,
tristes et abattus, étaient sur les tcr–
rasses de maisons attendant la mort.
Le enfants, les vieillhrds et les fem–
mcs pleuraient; quelqucs nobles guer-
(') Panni ces dcruiers
é1ait un
oncle
d'Ix1lilxochi1l au se1•,•ice des Mexicains, qui
avait cté pris dans les derniércs journées.
Cortes le chnrgea d'allcr lraiter de la paix;
Je malheureux
s'y
r~fusu
d'abord et finit pur
se rendre aux inslancrs de son ne,·ei1. Les
gardc
le laiJ;scronl pénéu·er auJ1res du roi;
mais il n'cul pas pl11tól cxpo e l'ohjet de
sa mission, qu'il
fnt
saÍ>Í et immolé en grande
cérémonie.
9°
I.ivraison.
(
1\IEXIQUE.)
riers se défendaient encore sur les
plates-formes des palais et sur les chaus–
sées pavées, d'ou ils se précipitaient
da ns les llots plutot que de'se rendre;
d'autres, échappant a la mort, s'étaient
réunis
a
leur roi qu'entouraient sa
fa–
mille et quelques officiers de sa cour.
lis le déterminerent a fuit• sur des ca–
nots tenus en réserve dans une petite
anse du lac, du .coté de Tlatelolco.
Pour masquer une faite tres·difficile,
on avait essayé d'arreter Cortes par
un simulacre de négociations; mais
cette ruse était trop grossiere pour
tromper l'reil du vieux guerrier. Dans
la prévision ,de ce mouvement, il avait
ordonné a Sandoval, qui commandait
les briga ntins, de .bloquer ce petit port
d'embarquement,
et
de ne laisser sor–
tir aucun canot. l\"falrrré sa 'vigilance,
quelques-unes de ces légeres et:nbarca–
tions étaient parvenues
a
s'échapper.
Sandoval le3 ayant apercucs glissant
rapidement sur les eaux dÜ lac et cher–
chant
a
gagner la terre opposée, les
fit
poursuivre par Garcia Holguin, un
de ses capitaincs; et telle fut la promp–
titude de ce dernier, qu'r.n moins
d'une heure il se vit
a
portée ele
fu–
sil des bat:eaux ennemis. Un l\lexicain,
son prisonnier, lui désigna le canot
royal, et celui-ci fut a l'111stant serré
de pres. En ce moment les rameurs
s'arreterent; et le roi, qui d'ahord
avait pris son bouclicr et sa macana
pour combattre, mis en joue par les
E~pagnols,
donna l'ordre de n'opposer
aucune résistancc. Holguin sauta dans
le l.Jateau l'épée
it
la main; aussitot,
un jeune homme d'une haute stature
et de l'air le plus nobl e s'avanca vers
lui, et lui dit avec dignité: " Je suis
Quauhtemot:zin, le souverain de
l'A–
nahuac; trahi par le sort, je me rends
i:t
toi; épargne les insultes
a
la reine
et a mes enfants, et n'épargne pas
moins le sang de mes sujets, tu n'as
plus rien a craindre d'eux.
)) L'illus–
tre pri3onnier, avec sa fomille et sa
s·oite, conduit devant Cortes, ne mon–
tra ni la foroc ité sombre d'un .barbare,
ni l'abattemen t d'un suppliant. L'Es–
pagno l, de son coté, le rccut avec tous
les égards que l'on doit aux grandeurs
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