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MEXIQUE.

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ce qu'ils ne pouvaient pas emporter.

lis se chargerent d'or et d'argent avec

une imprudente avidité. Elle cot1ta la

vie

a

plus <l'un brave. I1 était prés de

minuit lorsque les E pagnols sortirent

de leurs quartiers; ils marchaient dans

le

~lus

grand silence,

a

Ja faveur des

t énebres et de la pluie, suivant la

chau sée qui condmt

a

Tlacopan, la

moins endommagée de toutes. Déja

ils étaient parvenus

a

la premiere cou•

pure sans lltre inquiétés; déjil l'avant–

~arde

était. houreusernent passée

a

l'ai<le du pont volant. Lo tour du centre

arrivé, l'artillerie et les úagages s'a–

vancerent lontement sur la lourde ma–

chiue; leur poids la lit enfoncer dans

la boue, tlont nul effort humaio ne put

la dégager. Dans le temps meme ou

cette di vision du centre, commaodée

par Cortes,opérai t son passage, hommes

et chev

aux f

urent tout

a

coup alarmés

par les

cr.is

sauvages, par leson rauque

des trompettes deguerredesMexicains.

Eux aussi avaient mis le temps

a

profit;

saos se montrer, ils av ient suivi tous

les mouvements:des 'Espagnols avec uóe

dissimulation dont on na les avait pas

crus capables. Leurs canots couvraient

le lac des deux cótés de la aigue. Aus·

sitót qu' ils avaient vu leurs

ennemi~

engagés , ils avaient commencé ratta–

que, avec tant de mesure, avec un

ensemble si parfaitement combiné,

qu'au mllme instant les pierres et les

fleche· partirent de tous les points, et

qu 'ils s'élancerent, oomme un seu l

homme, sur les troupes de Cortes ;

celles-ci, enta sées sur un étroit espace

et daos les ombres de la nuit, ne pou–

vaient ni faire usage de leurs armes,

• ni employer ·Jes ressources de cette

tactique qui leur donnait une si grande

supériorité. Leurs rangs se rompirent;

ce

Cut

un affreux pfüe-méle, qne l'arri–

vée de I'arri ere- gar<le, poursuivie par

cl'autres corps d'I11diens, vint aug·

m<'nter encore. Les trois divisions

e pagnoles

e voyaient

éparées les

unes des autres par de ma es d'en–

nemis, et chacune d'elles succom–

bait sou

le nombre. Tous les ha–

bitants de

Iexico s'étaient mis

a

la

poursuite de leurs oppresseurs, et

se précipitaient

sui

eux comme des

hommes ivres de vengeance, qui payent

en un jou1-. toute Ja dette d'une vieille .

haine. Le désordre deviot général; et

si les Mexicains avaient eu la préeau–

tion de foire occuper la tllte de la chaus–

sée, pas un Eseagnol n'et1t échappé.

Les deux dernieres breches de cette

chaussée forent enfin franchies par

Cortes, suivi d'une centaine de sol,dats

et de quelques cavaliers. Parvenus sur

la terre ferrue, ils se rangerent en ba·

taille, et retournerent plusieurs fo is

a

Ja charge pour faciliter la retraite de

Jeurs malheureux camarades. lis al–

lerent ensuite prendre position

a

Tia–

copan, ou ils furent rejoints par quel–

ques Espagnols et un grand nombre de

Tlascalans qui s'étaient sauvés

a

la

nage et cachés .daos les champs. Le

jour vint éclairer en fin cet épouvanta–

ble désa tre, et montrer l'étendue des

pertes qu'on avait faites.

11

m¡rnquait plus de deux cents Es–

pagnols, plus de mi lle Tlnscalans, et

tous les prisonniers mexicains. !L'artil–

lerie, les bagages, les munitions , le

trésor de l'armée, étaierlt tombés au

pouvoir de l'ennemi; et cette armée,

déja si fai'ble avant le départ, n'était

plus

qu'~ne

poignée d' homrues déroo–

ralisés, couverts de blessures et ha–

letants de fatigue. L'ame de Cortes

était úrisée de douleur : il avait vu

tornber ses braves compagnons d'ar–

mes; il avait eritendu les oris déch.i–

rants des Espagnols pr

isonn

ier.s, en–

tra'inés par les l\Iexi'cains

po

.ur lltre sacri–

fiés aux dieux. Bon nombre de ses offi–

ciers avnit péri ; il regrettai t surtout un

de ses meilleurs lieutenants, Velasquez

deLéon, son intime ami, cet homme de

guerre si Joya! daos ses attachements,

et qu'on regardaít comme la seconde

personne de l'armée. Ses tristes pen–

sées luí arracherent des lnrmes; assis

sur une pierre, il pleura sur tant de

morts; et ce témoignaue de sensibilité

d'un courage si forme le

fit

chéri1· de

ses gens, autant que sa prudence, son

habileté, sa valeur l'en avaient tou–

jours fait respecter.

Toutefois, dans cette grande infor–

tune,

iJ

eut au moins Ja consolation

8.