ÉDIFIANTES ET CUR'iEUSES.
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c:leux grands Albanais, armés d'un gros baton crochu
et ferré: ils s'approcherent de nous, et d'un ton
fé–
roce , ils nous demanderent en jargon italien , qu!
nous étions
,
et ou nous allions. Nous leur répon–
dimes , mais d'un ton plus radouci, que nous étions
Fran!;ais, que nous allions dans
l'
Archipel et que
notre vaisseau étoit au rnouillage.
Ces hommes sans .nous rien dire nous quitterent
hrusquement, et nous les vimes gagner une hauteur ,
d'ou ils tachoient de découvrir notre _vaisseau.
A
notre retour nous contames notre aventure
a
nos
voyageu.rs.Le lendemain un d'enx , qui ne crai–
gnoit point, disoit-il, ces sortes de messieurs, eutla
curiosité de descendre dans l'lle pour les apercevoir.
A peine y eut-il mis le pied, que nos deux Arabes,
nccompagnés de deux atl:tres d'une aussi peu agréable
figure, vinrent se jeter sur lui, le prirent au collet,
et le lierent
a
un arbre les mains derriere le dos.
C'
est
done "ous,
lui dirent-ils,
ozt un de "oiú autres, c¡ui
aPez tiré sur nos che"res; il "ous en coutera la
"ie. ,
Alors l'un d'eux lui mit le couteau sur la gorge ,
pendant qne les autres fouilloient ses poches : ils
prirent tout ce qu'ils
y
trouverent, le déshabillerent,
et ne lui laisserent que sa chemise. Cette expédition
faite, trois d'entr'eux s'enfuirent avec leur butin, et
le quatrieme délia le patient et s'enfuit
a
son tour.
Notre voyageur qui s'étoit piqué d'une bravoure
a
toute épreuve, revint au vaisseau avec le seul habil–
lement que les quatre Arabes luí avoient laissé. Il fu.t
assez heureux pour
y
trouver des hommes plus cha:-–
ritables, qui lui donnerent des habits ; dont il avoit
grand besoin.
Apres cette derniere aventure , nul de nos voya–
geurs ne fut tenté d'aller se promener dans l'ile, pen-.
dant les quatre jours que nous attendimes le vent
pour nous remettre en mer.
Nous mimes
a
la voile le
20
janvier
a
six heures.,