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......
pour les loix
&
le bien de fes fujets, que ne le font
communérnent les ufurpateurs. Son regne fut tres–
orageux : la guer:re que fes concurrens lui déclare–
rent; les complots que
les
grands formerent cont1·e
lni; les foulévemens executés par les prélats ' irri–
tés de la réfifiance qu'il oppofoit a leur cupidité
&
a
leur ambition' ne l'empecherent point de travail–
ler, autant que les circonfiances le luí permirent,
au bien-etre
&
a
la
gloire de la narion. Henri I,
peu d'années avant fa mort, fe voyant fans enfans
habiles
a
lui fuccéder, avoit obligé fa fille Matbilde,
veuve de l'empereur Henri V, crépoufer Geofroi,
comte d'Anjou , furnommé
Plantagenet ,
fils de
Foulques, alors roi de Jérufalem ; Henri
l
crut
avoir fixé le fceptre daos fa rnaifon, lorfque Ma–
thilde eut un enfant de fon nouvel époux. A peine
cet enfant fut né que fon aieul Henri exigea de tous
fes fujets, Anglois
&
Normands, qu'ils pretaffent
au jeune prince ferment de fidélité, fe défiant fans
doute de la validité d'un . femblable ferment qu'il
avoit fait pretera fa fille
Mat·hilde ; mais les Anglois
n'eurent pas plutot vu Heo.ri daos le tombeau,
qu'oubliant leur ferment, ils regarderent comme
in–
digne de la nation d'obéir au fils de
G~olfroi,
qu'ils
croyoient
incapable de gouverner fagement
le
royaume pendant la minorité de fon fils. D'ailleurs,
quoique douée de talens peu communs, Mathilde
n'avoit point celui de faire aimer fa puiífance ; elle
ne favoit au contraire que fe faire craindre & hal'r,
par la hauteur
&
la fierté de fon caraétere.
Etienne,
comte de Boulogne , fut celui fur lequella nation
entiere jetta les yeux pou!é- remplir le trone vacanr.
Adele fa mere, filie de Guillaume le conquérant,
avoit en du cornte de Blois, fon éponx, quatre en–
fans: l'ainé, par des défauts naturels qui le rendoient
Íncapable de tour, fut condamné, des fon enfance,
a
vivre dans l'obfcurité; Thibaud , qui étoit le fe–
cond, recueillit la fucceffion paternelle;
&
Etienn~,
qui étoit le troifieme, fut envoyé, avec Henri fon
jeune frere,
a
la cour du roi d'Angleterre,
fop
on–
de.
Henri I, enchanté des talens
&
des grandes qua–
lités du jeune
Etienne,
eut pour lui la plus vive
tendreífe
&
s'attacha a l'enrichir
&
a
le rendre l'un
des plus puiífans feigneurs de fes états. Cene fut
m eme qu'a fa follicitation qu'il retira Henri dn mo–
nafrere de Clugni pour lui donner l'abbaye de Glaf–
ton,
&
quelque tems
apr~s
l!éveché de Winchefier.
Etienne ,
pénétré de reconnoiífance , parut entiére–
ment dévoué aux volontés du roi fon oncle,
&
fut
le premier
a
preter fermenta Mathilde, ainíi qu'a
fon fils ; mais, comme le refre des Anglois, il ne fe
fouvinr plus, apres la rnort du roi, de ce meme fer–
ment , qu'il prétendit n 'avo· r donné que forcément;
&
il entrevit que
fi
des-lors il afpiroit au treme, il
eut trop mafadroitement agi' s'il eut rnanifefré fes
vues. Quoi qu'il en foit, avant meme que Mathilde
fe doutat que fon fils put avoir des concurrens , les
éveques qui s'étoient montrés les plus empreífés
a
jurer une inviolable fidélité au fils du comte Geoffroi,
furent les premiers a donner l'exemple du paqure :
ils s'aífemblerent ;
&
gagnés par les émiífaires
d'Etienne,
en venu du pouvoir fpirituel, qui dans
ces terns de fuperfiition étoit indéfini, ils délierent
les ciroyens du ferment de fidéliré qu'ils avoient
preté au jeune
Henr~,
&
proclamerent
Etienne
de
Blois fouverain d'Angleterre
&
duc de Norman–
die. Cette infidélité, qui de nos jours feroit ati·oce,
neparoiífoit alorsavoir ríen de répréhenfible, puifque
-les éveques ne faifoient que fuivre l'exemple ,
&
t.rop fouvent, les ordres abfolus du fouverain pon–
rife qui prétendoit avoir le droit de difpofer
a
fon
gré des couronnes; d'ailleurs, la hauteur de Ma–
thilde
&
fon indocilité aux fuperfiitions, ne luí con–
~ilioient
pas les fuffrages des éveques, perfuadés
1
ETI
que.; par.
reconr:o~ífance,
_le
roi qu'ils procla•
rnozent , aJ?.utero1t a le_ur pmífance,
~éja
trop éten.
due,
&
qu 1lleur ferolt part des affaireS les plus im–
portantes du gouvernement. Leurs conjeéhues
étoient bien réfléchies, rnais iis furent tromp
' s
;
&
la. douleur qu ils eR re:ífentirent, les porta dans la
fmte aux exces les plus violens de haine
&
de ven–
geance.
Cependant
fi
le clergé Britanique fe vit frufrré
dans fes efpérances ' le peuple eut des graces a ren–
dre a
u~.
éveques
qt~i
avoient dépofé le fceptre dans
les
ma1ns les plus d1gnes de le porter.
·ses
ennemis
meme les plus envenimés 'ne ponvoient s'empecher
de
r~co~noitre
fes
bellesqualités. 11 emptoya le
prem~er
JOUr de fo?
reg.nea
r 'p.a ndre fur }es grands
&
le peuple, des b1enfa1ts que tout autre fouverain
etn regardé peut-etre comme des {acrifices nuiíibles
a
la royauté; car il permit aux grands de fortifier
leurs
ch~teaux;
&
cette permiffion , dont ils abufe–
rent enfuite, devint funefie par les troubles que ces
forts perpétuerent. Il rétablit auffi toutes les chartes
populaires accordees 'par fes prédéceffeurs, tornbées
en défuétude, ou révoquées n différentes circonf–
t;nce~, L~
rébellion des Normands l'obligea, des
1
annee fmvante' a paífer dans cette province ott
fa préfence éteignit les
~aétions,
&
qu'il·céda
~
fon
fils Eufiache, ne voulant s'occuper déformais que –
du foin de gouverner
ton
royaume.
Tandis qu'
Etienne
prenoit les moyens les plus mrs
de remplir fes projets, Marhilde n'attendÓit que l'oc–
cafion de le renverfer du trone
&
de fa ire valoir fes·
droits , ou plutot ceux de Henri fon fils. Elle avoit
en Angleterre un grand nombre de partifans;
&
le
roi d'Eco:ífe fon parent, qui s'étoit ligué avec elle,
entra
inopin~ment
a
la tete d'une formidable armée
daos le Nortbumberland ' Otl il fe préparoit
a
mettre
tout
a
feq
&
e\
fang, lorfque Thurfion, arch v eque
d'Yorck arreta fes progres. Thurfton, homme fier,
fanguinaire ,
&
plus fait au métier des armes qu'exer–
cé
a
rnanier la croífe ' fe mit
a
la tete"de l'armée
d.'
Etienne,
marcha contre les Ecoffois, les combat–
tit, remporta la viétoire;
&
abufant avec autorité
de l'état des vaincus, déshonora fon triomphe par
la férocité de fa vengeance ,
&
par les cruautés qu'il
comrnit de fang froid fur les malheureux Ecolfois,
que la mort n'avoit point dérobés a fa barbarie. Pen–
dant que l'archevequeThurfion repouífoit le roí d'E–
coífe ,
Etienne
diffipoit les faétieux qui s'étoient at–
troup€s dans le fein de fes états ;
a
force de fageíre.
de vigilance,
&
fur-tout par fes bienfaits, il parvint
a
rétablir le calme. Mais ces jours de tranquillité
durerent pe u : la défaite des Ecoífois n'avoit pas Jé–
couragé Mathilde qui fondoit toujours fes
efpéran~
ces fur les droits de fon fils,
&
plus encore fur l'ef–
prit faél:ieux des partiúms qu'elle avoit en Angle–
terre,
&
qui attendoienr avec impatience que les·
circonfiances leur permiífent de fe déclarer haute–
mene,
&
de prendre les armes contre
~eurs
fouve–
rains. Sans y penfer,
Etienne
fournit
a
cette foule de
mécontens, les moyens de fe réunir
&
de couvrir
d'un voile refpeél:able la véritable caufe de leur ré–
bellion. Irrités de n'avoir daos l'état d'aurre fonél:ion
que celle de leur rninifiere' les prélats cherchere"nt
a
fe confoler du défaut de conúdération par un luxe faf.–
tuemt , par l'orgueil le plus révoltant,
&
par une
magnificence qu'ils affichoient avec d'autant plus de
hauteur lorfqu'íls paroiífoient
a
la cour ' qu'ils
croyoient par ce ton d'infolence en impofer au roí
,
comme ils en impofoient au peuple. Mais
Etienne,
moins jaloux qu'indigné de cet exces d'ofie ntation '
entreprit de réprimer les évequ es'
&
de les obliger.
a
une modération plus honn et e
&
plus analogue
a
leur
état. Les réglemens qu'íl prefcrivil a ce fujet fouleve–
rent le dergé: les
éveque~ fur-to~t,
accountmés a
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