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E LI

mais la perite ttoupe qu'elle

avo.it

raifemblée,

f~t

battue, mife en fuite par le r

égent ;

&

Marie fe v1t

abandonnée de tout le monde ,

&

meme du lache

Bothwel qni

s'étoit

refugié en

Da nema ~ck_ ,

Otl

il

vécut dans le mépris,

&

mourut dans l'mdtgence.

Marie fon époufe , croyant

fa vie menacée en

Ecoífe, fe retira fur les córes d'Angleterre,

&

envoya demander

a

Eliz.abetlz

un afyle daos

{es

états.

La reine

d~

Anglerer:e {acrifiant fa géné,rofité ?at'u–

relle

a

l'atroce plalÍir de

{e

venger

d une n

vale

humiliée , oublia que Marie étoit reine

com.me

elle,.

malheureufe

&

fuppliante: elle la fit en

fermet' a

Tur–

bury , d'oi1, quelques

mois

apres , elle fut ti"ansférée

a

Cowenrry' p-lace forre íituée au centre de l'

AA–

gleterre , oit l'infortunée Marie fut íi étroitement

enfe rmée, qu'elle perdit jllfqu'a

l'efpérance de

s'évader.

Paífons rapidement fur

les procédés

iniques

d'

E li{_abetlz

envers Mar

ie : ces

faits font tr0p con–

nus' pour queje pelilfe

devo.ir

m'y arreter: je dirai

feulement que les moy

ens emp

loyés par

Elitabeth,

flétriífent fa mémoire: je dirai que Marie plus im-

'Prudente que coupable,

&

comprant trop fur

le

nombre de íes partifans , eut torr de fe liguer avec

les chefs de la conjuration qui fe forma contre la

reine d'Angleterre,

&

de r épondre, du fond de {a

prifon, aux di verfes propofitions

&

aux brillantes

efpérances qu'on luí donnoit. Je conviendrai encore

que Marie étoit coupable des plus honteux déborde–

mens

&

du plus horrible des crimes, de l'aífaflinat

de {on époux; mais enfin, Marie étoit l'égale

&

non

la fujette d'

Elizabeth :

celle-ci en fe vengeant, mé–

connoiífoit fes propres intérets; elle compromettoit

les privileges attachés au rang qu'elle occupoit,

&

elle. av ilifi'oit de la plus étrange maniere les droits

fac rés de la royauté.

Tandis

qu'Elitabeth

éteignoit dans le fang de

Marie la haine que cette

f<~uveraine

coupable

&

malheureufe lui avoit infpirée, Charles

IX

&

la

France égarés par le fanatifme, o.ffroient a l'Europe

étonnée le fpeaacle du maífacre des Protefians,

indignement trompés par Catherine de Medicis,

égorgés par leur prince

&

leurs concitoyens. Afin

d'amener plus facilement les Protefians daos le

piege infernal que Catherine leur avoir préparé,

Charles IX affeéta de rechercher avec empreifement

l'atliance d'une reine protefiante,

&

il porta fa

noire diffimulation jnfques a faire demander la main

d'Elitabeth

pour le duc d'Alen<;on. Moins perfide qt1e

Charles, mais plus poli tique encore,

Eli{_abeth

diffi–

mula avec art, parut écouter volontiers cette pro–

pofition'

&

fournit en meme tems des fecours

d'armes

&

d'argent aux Protefians Fran<;ois prof–

crits ,

&

foulevés contre leur prince par le mafl'acre

de leurs freres. Lorfqu'a fon tour

Elizabeth

n'eut

plus ríen

a

craindre, foit du coté de la France, foit

du coté de l'Ecoífe, ou relativement

a

la reine

Marie , elle termina par le refus le plus

a~folu

, la

négociation entreprife pour fon mariage a vec le dnc

d'Alen<;on ,

&

réponclit qu'elte vouioit vivre

&

mGurir célibaraire. Toutefois, ni la mort de Marie,

ni les troubles qni agitoient la France , ni la fou–

miffion des Ec9ífois ne laiífoienr poinr jouir

Elitab~th

d'une fécurité parfaite : il lui refioit

a

craindre

ll..O

ennemi pui!fant, un rival d'autant plus formidabl e ,

qu'a

des forces fup érieures'

a

l'éclat de fes viaoires;

il uniifoit une profonde politique, une habileté rare,

une ambition ourrée,

&

une haíne perfonnelle

&

implacable contre la reine d'Angleterre: cet ennemi

fi

redoutable éroit Philippe 11, qui , toujours en–

flammé du deíir de monter fur le trone d'Angleterre,

en vertu des droits que lui donnoit fa defcendance

de la maifon de Lancafrre, p.rofira avee adreífe du

mécontentement

des

Catholiques ,

&

de l'impreffion

ELI

qu' avoit faite fur eux la rnort tragique de Marie;

Afi_n, de s'aífurer du fucce_s de fes _vafies pmjets ,

Ph1hppe demanda

&

obt1nt de SlXte-Quint qui

rempliíi~it

alors le

íi :g~

pontifical, une bulle , par

laq_u elle 1l

exco~mumo1 ~

la reine

Eli{_abeth ,

ordon–

nolt

~ux

Anglo1s cathoh,ues de

f~couer

le joug ,

de defarmer la colere celefie , ex¡)ler leurs péchés

&

s'aífurer 1<: paradis, en fe baignant dans le

fan~

de leurs conc1toyens attaches au protefiantifQ1e

&

donnoit

a

Philippe l'invefiimre du royaume d' Angle–

terre. Dans tout autre tems, cette bulle eut opéré

fans doute les plus grandes révolutions : mais le

~ef~o:ifme

<?ppreffif dt_t pouvoir pontifical avoit

echure les r01s

&

les nat1ons fur leurs vrais intérets.

Elizabeth

méprifa \a bulle de Sixte-Quint, fe rit de

fes menaces,

&

ne

1

s'attacha qu'aux moyens d'éloi–

gn~r

des cotes Br.itanniques l'ambitieux Philippe ,

qm ne

dout~nt

J?Omt

~u

fucces de fes projets d'in–

vafion, avolt fa n fortir de fes ports, fous les ordres

du duc de Medina-Celi, la flotte la plus formidable

qui eftt encore {>aru fu.r l'Océan: elle étoit compofée

de

1 )O

gros vatífeaux _de gnerre, montés de

19000

hommes

&

de

1 2

3o pteces e canon :

a

eerre armé·e

navale devoit fe réunir une flo t e de Flandres fur

laquelle devoit s'embarquer 1e duc de Parme

~vec

une armée de

30000

hommes.

,

Ces forces réunies, loin de déconcertet

EiizabetTt

1

ne firent au contraire qu'ajouter

a

fa vigilance

&

a

fon aétivité.

P~ur

s'oppof:r

a

la defcente des EfpJi–

gnols, elle av01t fur les cotes une armée de 8oooo

hommes,

&

la mer étoit gardée par une petite tlotte

qui a·v<?it pou.r amiral Howard duc d'Effingarn,

&

pour V1ce-am1raux les fameux Drack, Hawkin

&

Forbi~her,

officiers .intrépides,

&

qui s'étoient <léja

fignai:s. plufieurs fo_1s contre les

Efpag~ols.

L'arniral

de Ph1hppe entra l1bremenr daos la Manche; mais

il ne put

y

etre joint' comme il s'y attendoit ' par

la flotte du duc de Parme;

&

a

peine il fe fut

engagé plus avant' qu'il eut

a

combattre tout-a–

la-fois contre

les vents

qui devinrenr contraires

contre les rochers

~11 fe~

vaiífeaux alloient fra pp er:

&

contre les Anglots qut, profitant habilement des

circonftances, triompherent, apres quelques mo–

mens de combar, de cette énorme flotte. Tous les

vaiífeaux Efpagnols furenr pris , coulés a fond ou

brifés

c~>ntre

les rochers ; enforte qu'il n'en écha?pa

aux vamqueurs que deux on t · .is , qui eurenr la

plus grande peine a arriver ' défemparés

&

hors

d'état de fervir davantage, dans les ports d,Efpaone.'

Cette viétoire fut le premier aéte de

venge~nce

qu'

Elif..abeth

jufiement irr.itée exer<;a contre Phi–

lippe Il , dans les états duquel elle porta le feu d'e

la guerre, tandis que l'intrépide Drack

&

le che–

valier de Nowis furprenoient la Corogne,

incen~

dioient la ville baífe , s'emparoient des vaiífeaux:

qui étoient dans le port, battoient

la

garnifon E!–

pagnole,

&

alloient fur le Tage, fignaler leur valeur

par les memes exploits. Peu fatisfaite encore

~

Eli-

zabeth'

afin d'humilier l'ennemi qui l'avoit forcée

de s'armer, fe ligua avec Henri

IV,

&

détourna

les coups que l'Efpagne

&

Mayenne fe flattoient de

poner a la liberté Fran<;oife. Irrité de la réfifiance

que 1'Angleterre oppofoit a fes entreprifes, Philippe

ne ·pouvant fonmettre par la forceJa fiere

Elit.abet!z,

eut recours

a

la plus odieufe des voies ; il corrom–

pit par fes ambalfadeurs le premjer méd ecin de la

Reine, que le traitre ébloui par une promeífe de

soooo écus, s'engagea d'empoifonner. Mais le com–

plot fut découvert peu de tems avant fon exécu–

tion ,

&

le perfide médecin fut, avec fes complices,

attaché au gibet. La découverre de ce tte trame

honteufe, qui eut du décourager Philippe II, ne iit

que l'attacher encore plus érroitement au projet

qu'"l avoit formé de

.réd üre l'Angleterre ;

&