'55
2
STY
par l'autre , pour effacer quand on le
vOtilo~t
: c'eíl:
ce qui a faít dire a
Horace,fi2peftylum vertas,.
effacez
fOllvent.
Il
fe prend aujourd'hui pour la mamere , le
ton la couleur qui regne fenfiblement dans un ou–
vrage ou dans quelqu'une de fes parties.
n
y a trois fortes de
les,
le íimple , le moyen
&
le fublime , ou plutót le
ftyLe
élevé.
.
.
Le
ftyle
fimple s'emploie dans les entretIens, faAmr–
liers, dans les lettres , dans les fables.
Il
¿Olt ; tre
pur,
clair, fans ornement,
app~rent.
Nous en deve-
lo'pperons les cara8:eres
~l-al?re~.
,
L
eftylefublime
eíl: cehu qm falt regner
la
nobleífe,
la dignité la majeíl:é dans un ouvrage. T outes les
penfées y'font nobles
&
élevée.s : toutes les expre.f–
fions graves, fonores , harrI}orpeufes "
&c. .
Le
J/yle
fublime
&
-ce qH'on appelle le
fabúme.,
ne
font pas IjJ meme chofe. Celui'-ci eíl: tout ce qUl en–
leve notre ame, qui la [aifit -' qui la trouble tout,-A–
coup ': c'eíl: un éclat d'un momento Le
ftyle
fubLtm~
peut fe {outenir long-tems : c'efr un ton élevé, une
marche noble
&
majefrueufe.
J'ai vu l'impie adoréfur la (erre:
Pareil au adre
~
il pOTloit 4ans les cieux
oS
on
front q.udacieux :
Jlfemhloit
a
Ion gré gou'Yerner le ton
n
erre
,
Fouloit aux piésfls ennemis vaincus :
le n'aifait que pa.f!er, il n'Ítoit déja plus.
,Les cinq premiers vers {ont
duftyle fitblime,
fans
€tre {ublimes ,
&
le dernier efr fublime fans etre du
fiyle f ublinte.
Le
ftyle mUioue
tient le milieu entre les deux : il
a toute la netteté du
ftyle
fimple ,
&
re~oit
tous les
órnemens
&
tout le coloris de l'élocution. -
Ces trois fortes de
ftyLes
{e trouvent fouvent dans "
un meme ouvrage, parce que la matiere s'élevant
&
s'abaiífant, le
ftyle
qui efr comme porté fur la
,matiere, doit s'élever auffi
&
s'abaiífer avec elle.
Et comme da¡:¡s les matieres tout {e tient, fe lie par
des nceuds {ecrets , il faut auffi que tout {e tienne
&
fe
lie
dans les
flyles.
Par conféquent il faut y ména–
g,er les paífages , les liai{ons , affoiblir ou forti6er in–
{en'fiblement les teintes, a-moins que la matÍere ne
fe brifant tout-d'un-coup
&
devenant comme e{car–
pée, le
flyle
ne {oit obligé de changer auffi brufque–
mento Par exemple , lorfque Craífus plaidant contre
un certain Brutus qui deshonoroit {on nom
&
{a fa–
mille, vit paífer la pompe funebre d'une de (es pa–
rentes qu'on portoit au bucher , il arréta le corps,
&
adreífant la parole
a
Brutus , il lui 6t les plus terri–
bles reproches:
fe
Que voulez-vous que Julie an-
" nonce
a
votre pere ,
a
tous vos ayeux , dont vous
" voyez porter les image:;? Que dira· too elle
a
ce
»
Brutus qui nous a délivré de la domination des
>/
rois)/
&c?
n
ne s'agiífoit pas alors de nuances ni
de liauons hnes. La matiere emport,oit le
ftyle ,
&
c'efr toujours
a
lui de la fuivre.
,
Comme on écrit envers ou en profe , il faut d'a–
bord marquer quelle- efr la différence de ces deux
genres
dejlyle.
La profe toujoUfstirhide, n'ofe fe per–
mettre les inverfions qui font le fel du
Jlyfe poétique.
Tandis que la profe met le régiífant avant le régime,
la poéfie ne manque pas de/faire le contraire. Si
l'a8:if efr plus ordinaire dans la prOfe , la poéfie le
dédaigne,
&
adopte le,paffif. Elle entaífe les épi–
thetes, dont la profe ne fe pare qu'avec retenue ': elle
n'appelle point les hommes par leurs noms , c'efr le
hIs de Pélée, le berger de Sicile, le cygne de l)ircée.
L'année efr chez elle le grand cercle , qui s'acheve
-par la révolution des mois. Elle donne un corps
a
tout ce qui efr fpirituel ,
&
la vie
a
tout ce qui ne
l'a point. En6n le chemin dans lequel elle marche
eil: couvert d'une pouffiere d'or , ou jonché des plus
belles fleurs.
Voye{
POÉTIQUE
,jlyle.
S T
Y.
Ce l}'efr pas tout, chaque genre de poéi1e a fo n
t011
&
fes couleurs. Par exemple , les qualités prin–
cipales qui cQnviennent au
jlyle épique
font la force' ,
l'élégance , l'harmonie
&
le coloris.
'
Le
,fiyl-e dramatiqtte
a pour regle gén..érale de de–
voir etre toujours contorme
~ l'~tat
de celui
qui
,parle. Un
1'01,
un limpie partIcuher ,
un
commer_
<,:ant, un laboureur, ne doivent point parler du meme
ton: mais ce n'efr pas aílez; ces memes hommes font
dans la joie ou dans la douleur , dans l'efpéranceou
dans la crainte : cet état a8:uel doit donner encore
une {econde 1:onforn:at!on
-a
teur
jlyle
,
laquelle fera
fOI1clée 1l'lr la prelpiere , comme cet état aUuel
el!:
rondé {ur l'habituel;
Qc
c'efr ce qu'on appelle
La
Con_
dilion de la perfonné. Voye\:
TRAG
ÉDIE.
P.our ce qlJi regarde ltl comédie , e'efr aífez
d~
dire
que
{o~ftyle
doit
~tre
fimple , claiT , fanúlier ce–
pendant jamais bas, ni rampant. Je fais bien
q~e
la
comédie doit élever quelquefois fon ton, mais dans
{es plus grandes hardieíles elle ne s'oublie point ; elle
efr roujours ce qu'elle doit etre. Sielle alloitjufqu'att
tragique, elle feroit hors de fes liinites :
fonjlyLe
de–
mande encore d'etre aífaiífonné pe p'enfées fines
délicates;
&
d'expreffions plus vives qu'éclatantes. '
Le
ftyle iyrique
s'éleve comme un trait de flamme;
~
tient par fa chaleur au [entjment
&.
au gOltt : il efi:
tout rempli de l'emhoullª.fme que lui infpire l'ob–
jet préferit
a
{a Iy re ; fes images {ont fllblimes,
&
fes lentim/ns
plei.nsde feu. D e-la les termes riches ,
forts, hardis ,
l~s
(om harmonieux, les figures bril-'
lantes, hyperboliques ,
~
les tours
fingul~ers
de ce
genre de poéfie.
Voye\:
O~E ,
POÉSIE
LYRIQUE
t;.
P OETE
L
y RIQUE.
.
L~
ftyle'bucofique
doit etre fans
appl~t,
fans fafie,
doux, limpie, naIf
&.
gracieux dans fes defcriptions.
r
oye\:
PASTORALE ,
poéjie.
Le
ftyle de l'apoLogtte
doit etre fimple , familier,
riant, gracieux , naturel
&
palf. La fimplicité de ce
fiyle·
confifre
a
e1ire en peu de mots
&
avec les ter–
mes ordinaires tout ce qu'on veut dire.
11
ya cepen–
dant des fables 011 la Fontai¡1e prend l'eíIor ; mais
cela ne lui arrive que qHand les perfonnages ont de
I~
grandeur
&
de
l~
nobleiIe. D 'ailleurs cette éléva–
tion ne détruit point la fimpli cité qui s'accorde , on
ne peut miellx, avec la dignité. Le familier de l'apo'"
logue efr un choix de ce qu'il y a de plus fin
&
de
plus délicat dans le langage des converfations ;
k
riant efr caraétérifé par ion oppofition au {érieux
>
&
le gracieux par {on
oppofit~on
au defagréable :
fa
mqjejlé fourréé
,
une
HéLene au beau plltmage,
{ont
du
fiyle
riant.
Leftyle
gracieux peint les chofes agréa–
bies avec tout l'agrément qu'elles peuvent recevoir.
L es lapins s'égayoient ,
&
de thim parfwnoiem Leurs
banquets.
Le paturel efr oppo{é en général au recher–
ché, au forcé. Le nalf l'en au réfléchi,
&
{enible
n'appartenir qu'au
{entim~nt,
comme la fable de la
laitiere.
J,laífons
aufiyle
pe
l~
profe : il peut e-tre périodique
ou coupé dans tout genre d'ouvrage.
Le
ftyle périodique
efr cell1i 011 les propofitions ou
les phrafes {ont liées les unes aux autres, foit par le
fens mem,e , foit par des con.jon8:ions.
Le
fty Le coupé
~fr
celui' dont toutes les parties font
indép.endantes
8{.
fans liaifon
r~ciproque.
Un exem–
pie fuffira pour les daux e(peces.
H
Si M. de Turenne n'avoit
(l!
que combattre
&
"
va~ncre,
s'il ne s'étoit élevé au-cleífus des vertus
" humaines, fi fa valeur
&
fa pruclence n'avoient
'/ été animées d'un efprit de foi
&
de charité, je le
') mettrois au rang des Fabius
&
des Scipions
)l.
Voi–
la une période qLlÍ a quatre membres, dont le fens
efr {ufpendu. ·Si M. de T urenne n'avoit
[f¡,
que con¡–
battre
&
vaincre,
&c.
ce fens n'efi: pas achevé . parce
que la conjonUion
ji
promet au-rooíns un fecond
membre