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s o e

non en tant qu'elle e!t péché , ou qu'elle s'éloigne

des regles prefcrites par la r6vélation extraordinaire

de la volonté divine , mais en tant qll'elle eíl: crime,

c'eil:-a-dire

a

proportion de la malignité de ron in–

fluence, relativement au bien de la

foúété

civile_ Si

1

T

on en demande la raifon, c'eil: que la

Jociété

a pour

but non le bien des particuliers, mais le bien pnblic,

qui'exige que les lois déploient toute leur févérité

contre les crimes auxquels les hommes font les plus

enclins ,

&

qui atraquent de plus pres les fondemens

de la

Jociété.

Différentes raifons

&

diverfes circonfl:ances ont

contribué

a

faire croire que les foins du magiíhat

s'étendoient natureHement

a

la religion, en tant qu'–

elle concerne le falut des ames. Il a lui-meme enCOll–

raaé cette illufion flatteufe, comme propre

a

augmen–

te~

fon pouvoir

&

la vénération

de~

pr;'uples

p~llr

fa

perfonne. Le mélange conflls des mterets

,ClVll~

,&

religiellx, lui a fourni les moyens de pouvolr

le

falre

ave:: ¡¡ífez de fa cilité.

Dans l'enfance de la

Jociété

civile, les peres de fa–

mille qui rempliífoient toujours les fo nétions du fa–

cerdoce, étant parvenus ou appellés

á

I'admini~ra­

tion des affaires publiques, porterent les fontbo'ns

de leur premier état dans la magiíl:rature,

&

exécu–

terent €n perfonne ces doubles fonaions. Ce qni n'é–

toit qu'accidentel dans fon origine, a été regardé

dans la fuite comme eífentiel. La plupart des anciens

l égiílateurs ayant trouvé qu'il éroit néceífaire pour

exécnter leurs projets, de

préte~dr~

a

quel'l

~le.in

[p~Tation

&

a

l'affiíl:ance extraorchnalre des dleux,

11

lenr étoit natllrel de meler

&

de confo ndre les ob–

~ets

civils

&

religieúx,

&

les crimes contre l'état ,

avec les crinles contre les die1\x fous l'aufp ice elef–

quels l'état avoit été établi

&

fe confervoit. D'ailleurs

dans le paaanifm e outre la religion des particllliers ,

il Y avoit

~m

culte

~

des

cér~monies

publiques inf–

tituées

&

obfervées par l'état

&

pour I'état , comme

érat. La religion intervenoit dans les afraires du gou–

vernement ; on n'entreprenoit, on n'exécutoit ríen

fans l'avis de l'oracle. Dans la {uite , lorf'lue les em–

pereurs romains fe convertirent

a

la religiort chré–

tienne ,

&

qu'ils placerent la croix fur le diademe ,

le zele dont tout nouveau profélyte eíl: ordinaire–

ment épris, leur tit introduire dans les iníl:itutions

civiles des lois contre le péché. Ils nrent pail'er dans

l'adminiíl:ration potitique les exemples &' Ies précep-:

tes de l'Ecl'.jture, ce qui contribua beaucoup

a

confon–

dre la difiinaion qui fe trouve entre la

Jociété

civile

&

laJociété

religieufe. On ne eloit cependant pas re–

jetter ce faux jugement fur la religion chrétienne ,

cal' la diíl:inétion de ces deux

Jociétés

y

eíl: fi expreífe

&

u formelle, qu'il n'eíl: pas aifé de s'y méprendre.

L'origine de cette erreur eil: plus ancienne,

&

on

doit l'attribuer

a

la nature de la religion jllive, Ol! ces

deux

Jociétés

étoient en quelque maniere inc;orporées

enfemble.

L'établiífement ele la políce civile parmi les Juifs

étant l'iníl:itution immédime de Dieu meme , le plan

en fut regardé commele modele du gouvernement le

plus parfait

&

le plus digne d'etre imité par des magi–

.:!hats chrétiens.Mais l'on ne fit pas réflexion que cette

jurifdiaion

a

laquelle les crimes

&

les péches étoient

aífldjettis, étoit une conféqllence néceílaire d'un gou–

vernement théocratique, OlL Dieu préfidoit d'une

maniere particllliere ,

&

qui . éto'¡t d'une forme

&

d'une efpece abfolument difFéreutes de celles de tous

les gouvernemens d'iníl:itution humaine. C'eil:

ir

la

meme cau{e qu'il faut attribuer les erreurs des Pro–

teíl:ans fur la réformation des états " la tete de leurs

premiers chefs fe trouvant remplit: des ¡dées de l'éco–

nomie judalque_On ne doit pas etre étonné que dans

,les pays ollle gouvernement

re~tlt

lll1e

Ilouyelle for-

TomeXY,

s

O

e

').57

l1?-e,en ml!tne tems que les peuples adopterent nne

re~

hglOn nouvelle , on ait afFeéte une imitation ridicule

du gouvern ement des Juifs,

&

qu'en con{équence

le

magiíl:rat ait témoigné plus de zele pour réprimer les

pcchés , que pom réprimer les crimes. Les miniil:res

prétendus réformés, hommes impérieux , en voulant

modéler les

~t

¡l.tS

1lLr

lem s vues théologiques , prou–

;rer,ent, de

1

aveu l1?-eme ,cl,es proteíl:ans

íen~és,

qu'ils

etolem auffi mauvals po[¡tlques que m,auvals théolo–

giens.

A

ces cauíes de la confuuon des matieres civi–

les

&

religieuíes ,on en peut encore ajouter plufieurs

alltres.

11

n'y a jamais eu de

j'ociJté

civile ancíenne

ou moderne , 011

iI

n'y ait eu une religion favorite

établ~e

&

~ro~égée ~ar

les lois ,

éta~liífement

'lui eH:

fonde fur

1

albance hbre

&

volontalre qui fe fait en.

tre la puiífance eccléfiaíl:ique pour l'avantage réci.

proque de l'un

&

de l'aLltre. Or en confé'luence de

cette alliance , les deux

fociétés

{e pretent en certaÍ–

nes occafions unegrande partie de lem pouvoir

&

iI

arrive meme quelquefois qu'elles en abufent

ré~ipro­

quement. Les hommes jugeant par les faits , fans re–

mónter

a

kur caufe

&

a

lem origine, ont cru que la

Jociété

civile avoit ,par (on eífence un pouvoir qu'–

elle n'a que par .emprunt. On doit encore obferver

que quelquefois la malignité du crime eíl: égale

a:

celle du péché ,

&

que dans ce cas les

homm~s

ont

peu conudéré Gle magiíl:rat puniífoit l'aaion comme

crime ou comme péché ; tel eil:, par exemple , le

cas du parjure

&

de la profanation du nom de Dieu

que les lois civiles de tous les états puniífent avec fé:

vérité. L'idée complexe de crime

&

celle de péché.

étant d'ailleurs d'U/:¡e natllre abíl:raite ,

&

comp'ofée

d'idées íimples , communes

a

l'une

&

a

I'autre elles

n ont pas été également diíl:inguées par tout le 'mon–

d~ ;

fouvent elles ont été confondues, comme n'é–

tant qu'une fe ule

&

meme idée ; ce qui fans doute

n'a pas peu contribué

a

fon~enter

l'erreur'de ceux quí

CODfondentles droits relpeDifs des

foc¡étés

civiles -&

religieufes. Cet examen fuffit pOLLr f,lire voir que

c'eil: le bur véritable d}! la

jociété

civile,

&

'luelles

font les caufes des erreurs oll 1'011 eil: tombe a ce

fuj et.

'Le

b~lt

final de la

Jociété

religieu{e eíl: de procurer

a

chacun la faveur ele Dieu, faveu r qu'on ne peut ac–

quérir que par la droiture de l'efprit

&

du cceur , en

{orte que le but intermédi'aire de

la

religion a pour

objet la perfeaion de nos facultés fpirituelles,

La ja:

elite

religiel1fe a auffi un but di!tina

&

indépendant

de ce1ui de

laJociité

civile, il s'enli.lit néceífairement

qu'elle en eil: indépendante ,

&

que par conféqucnt

elle eil:fouveraine en ron efpece. Car la elépendance

d'une

(ociíté

a

l'égard'de 1'autre , ne peut procéder

que de deux principes ,

&

d'une caufe naturelle on

d'une caufe civile. Une dépendance fondée {l:r la

loi de nature doit provenir de l'eífence ou de la

aé–

nération de la chofe.

11

ne {auroit yen avoir dan:'le

cas dont il s'agit par eílence ; car cette e{pece de dé–

pendance fuppoíeroit néceífairement entre ces deux

foúétés

une union ou un mélange naturel qui n'a lien

qu'aUlant que dellx

fociétés

[ont liées par leur rela-

tion avec un objet commun. Or lem objet loin d'e–

tre commun eíl: abfolument différent ['un de l'autre ,

la derniere fin de l'une étant le foin de l'ame ,

&

celle

de l'autre le foin du corps

&

de {es intérets ; I'une ne

pouvant agir que par des voies intérieures ,

&

l'au–

tre au contraire

~ue

par des voies extérieures. Pour

qu'il y ellt une dependance entre ces

Jotiétés,

en ver–

tu de lem génération, il faHdroit que l'une dut fop.

exiil:ence

a

l'autre , comme les corporations, les C0111-

munautés

&

les tribunaux la doiventaux vil/es on aux

états quí les ont créés. Ces différentes

Joc¡¿tés,

au–

tantpar la conformité de lelll'sfins

&

de leurs moyens,

que par leurs chartres_, on leurs lettres de ·creation

Kk