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666

COM

blance la fiáion de la réalité, l'atl:ion de la

<omJdie

nous étant plus familiere que celle de la tragédie,

&

le défaut de vraiífemblance plus facile a remar–

quer' les regles y doivent e tre plus rigourcufement

obfervées. De-la cette uniré , cette contimúté de

caratl:ere , cetre aifance, cette íimplicité dans le tiífu

<le !'intrigue, ce naturel dans le dtalogue , cette v é–

r ité dans les fentimens ' cet art de cacher l'art meme

Q.ans l'encha1nement des íituations, d'olt réfulte l'il–

luíion théatrale.

Si l'on coníidere le nombre de traits qui caraété–

tifent un perfonnage comique , on peut dire que la

eom&ie

efl: une imitation exagérée.

l1

efl: bien difficile

en effet, qu'il échappe en un jour

a

un feul homme

autant de traits d'avarice que Moliere en a raífem–

blés dans Harpagon ; mais cette exagératio n rentre

d ans-la vraiífemblance lorfque les rrairs font multi–

pliés par des circonfl:ances ménagées avec art. Qnant

;lla fo rce de chaque trait , la vraifie mblance a des

b o rnes. L'Avare de Plaute examinant les mains de

fo n va ler lui dit,

voy ons

la

troijieme,

ce

c¡ul

efi cho–

quant : Moliere a tradnir

L'autre ,

ce qui efi na tnrel,

atténdu que la précipitation de

1'

Avare a pftlui faire

oublier qu'il a déjil examiné deux mains ,

&

prcndre

cclle-ci pour la feconde.

Les

atUres,

efi une fa ure rlu

comédien qui s'eíl: gliífée dans l'imprellio n.

11

efi vrai que la perfpeétive du rhéatre exige un

colo ris

for~

&

de grandes touches , mais da ns de juf–

tes proportions , c'efl:-a-dire re!les que l'oeil du fpe–

él:ateur les réduife fans peine

a

la vérité de la nature.

L e

B ourgeois gmti/hornme

paye les ritres que !tú do n–

n e un complaifant mercenaire , c'efi ce c1u'on voir

t ous les jours; mais il avoue qu'il les pay e ,

voi/a

p our

Lt

M onfoigmur;

c'efi en quoi il renchérit fur fes

inodeles. Moliere tire d'un fo r l'aveu de ce ridicule

po ur le mieux faire appercevoir dans ceux qui onr

l'efprit de le diilimuler. Cette efpece d'exagérarion

d em:mde une grdnde juíl:eífe de raifon

&

de gour. Le

théarre a fo n optique,

&

le tablean efi manqué des

que le fpeétateur s'appen;oit qu'on a outré la nature.

Par la meme raifon, il ne fu ffi t pas pour rendre

l'"mtrigue

&

le dialogue vraiífemblable, d'en ex

el

u–

r e ces

a

parte,

que tout le monde entend excepté l'in–

t erlocuteur ,

&

ces méprifes fo ndées fur une reffem–

blance ou un déguifement prétendu , fuppoíition que

t ous les yeux démentent , hors ceux du perfonnage

qu'on a deffein de tromper; il fa ut e ncore que tollt

ce qui fe paífe & fe dit fu r la fcene foi t une peine

u

re

·fi

nalve de la fociété , qu'on oublie qu'o n eH au f¡Je–

él:acle. Un tableau efl: ma l peint , íi au premier coup

d'oeil on penfe

it

la toile ,

&

íi l'o n remarque la dé–

g radation des couleurs a vant que de voir des con–

rours , des reliefs

&

des lointains. Le preilige de

l'art , c'eíl: de le faire difparoitre au poi nr c¡ue no n–

feu lement l'illuíion précede la réfl exion, mats qu'elle

la repouífe

&

l'écarte. Telle de voit erre l'illu!ion des

Grecs

&

des Romains aux

com.Jdies

de Mt!nandre

&

de T érence, non

a

e

elles d'Ariil:ophane

&

de Plante.

O bfe-rvons cependant ,

it

propos de T érence, que le

poíftble 9ui fuffi t a la vraiJTemblance d'un caraétere

ou d'un cvenement rragique , ne fuffit pas

it

la vérité

des !Dreurs de la

comédie.

Ce n'eíl: point un pere com–

rne

il

peut y en avoir, mais ttn pere comme il y en

f. ;

ce n'eíl point un individu, mais un e efpece qu'il

1 aut prendre pour modele; conrre cette regle peche

e

cra~ere

un!que du

bourreau de

lui-mém~.

e n

ef1

pomt l.tne combinaifon pollible' a la ri-

gueur. e en u

¡· .

11 d'é

.

li

' .

d .

ne tute natnre e

venemens famt-

- ers qut on form

¡•·

.

d

1

,

J '

d

er

IntT•gue e a

comr:au

>

pnncx-

pe qtu con amne

¡•·

·

,

·

T'

d

rr

Lntngue de 1

H ecyre :

íi tourefOJS

.

erence a eu el.1ein

de

fai re une

com(die.

d'une

ac–

tton toute

pathét~que

&

d'ou il écarte juli u'

a

la fin

-avec une précauuon marquée le

íi

1

¡;

q

.

-pouvoit etre plaifam.

eu per onnage qut

C OM

D 'apres ces regles que nous allons avoír occaíl011

de développer

&

d'appliquer , on peut juger des pro-·

gres de la

<omédie

ou plutot de fes révolurions,

Sur le chariot de Thefpis la

com&it

n'étoit qu'un

tiífu d 'injures adreífées a ux paífa ns par des vendan–

geurs barbouillés de líe. Crates ,

a

l 'exemple d'Epi–

charmus

&

de Phormis , poetes Siciliens , l'éleva

fur

un théatre plus décent, & dans un ordre plus régu–

lier. Alors la

comédie

prit pour modele la tragédic in–

v entée par Efchyle , ou plutot !'une

&

l'autre

fe

formerenr fur les poéíies d'Homere ; !'une (ur l'ilia–

de

&

l'Odiífée , l'autre fur le Margites, poeme fa ty–

riqu e du meme auteur ;

&

c'efi-la proprement l'é–

poque de la

~~iJTance d~

la

comédie

Grequ

e.

On la divtie

e h

a nctenne , tnoyenne,

&

nou:vt.llt

_

rnoins par fes ages que par les différentes modiñca–

tions qu'on y obferva fu ccellivement dans la pein–

ture des moeurs. D 'abord on o fa mettre fur le théa–

tre d'Athenes des fatyres en aétion, c'efi-a-dire des

perfo nnages connus

&

nommés, dont on imitoit les

ridicules

&

les vices: te

U

e fitt la

comédie ancienne.

Les lois , pour réprimer cetre licence , défendirent

de nommer. La maligniré des poetes ni celle des

fpeétareurs ne perdit ríen a cette défenfe ; la relrem–

blance des mafques ' des v etemens, de l'ailion,

dé–

íignerent íi bien les perfonnages, qu'on les nom–

moit en les v oyant : telle fut la

comldie moyennc, oit

le poete n'ayant plus

a

craindre le reproche de

la

perlonnalité, n'en étoir que plus hardi dans fes in–

lit!

tes ; d'auranr plus ffll' d'aiUeurs d:erre applaudí

~

qu'en repaiífant la matice des fpeétateurs par la

noirceur de fes ponraits ,.il ménageoit encore

a

leur

v aniré le plaiftr de deviner

les~odeles.

C'eft dans.ces.

deux genres qu'Ariíl:ophane tnompha tant de folS

a

la honre des Athéniens.

·

La

comédi< fotyrique

préfentoit d'abord une Íace

avantageufe.

11

eft des vices contre lefqaels les lois

n'ont point févi : l'inaratitude , l'infidélité au fecret

&

a

fa parole ' l'ufu.?pation tacite

&

artificieufe. doi

rrré'rlte d'autrui, l'intéret perfonnel dans les alfall'es

publiques' échappent a la févé!ité des lois; la

coml.–

diej'atyrique

y artachoir une peme d'autant plus ter–

rible, qu'il falloit la fubir en

ple~n théa~re;

I:e

c~m­

pable y étoit traduit ,

&

le

publ~c

fe fa1fott ¡ulbcc.

C'étoit fans rlo ute ponr entretem;. une

tcrr~""

íi

fa–

lutaire , que non-feulement les poetes farynques fu–

rent d'abord tolérés, mais gagés par les ma.gdl:"ts

comme cenfem s de la république. Piaron

hu·m~me

s'étoit laiífé féd uire

a

cet avanrage apparent, lorf–

qu'il adrnir Ariílophane dans fon

banq~et,

íi toute–

tefois

1'

Ariíl:ophan e comique efl:

1'

Anfiophane d11

banc¡uet; cequ'on peut au

moi~

révoqu:ren dollte.

Il

eíl: v rai que Piaron confeillott a

D: ms

la letlure

des

comMies

de ce poete , pour

~or;~01~e l.e~

m_reurs

de la république d'

A

thenes ; malS c. etOit,!ttt

';'d1qu~r

ttn bon délateur , un efpion adro11 , qu

il

n en eih–

moit pas dava nrage.

Qua

m

aux fuf!Tages des

A thé,~iens,.un

peuple en–

nemi de toute domination devo1t cramdre fur-tout

la fupériorité du

méri

.te. La plus

fan~lante,

fatyr:

étoit done

ltll'C

d

e

plaiTe

a

CC

pettple ¡a(01L'I:

>

(orf.

qu'elle tomfioit fur l'objet de fa jalouíie.

n

e~

deu."

chofes que les hommes vain5 ne trouvent

Ja~(;alS

A

la med1 an-

trop forres; la flaten e pour eux-memes ,

' ord

a

ce contre les am res: ainíi tout concourur d

ab

favorifer la

comédie fotyrique .

On rte fut

pa~

lo':'g–

tems

a

s'appercevoir que le

ral~':'r

de cenfurer

e":"~

pour etre ut.ile devoit erre dm gé par la vertu

'e

que la liberté d; la fatyre accordée

a

un

!"alh~nn~e

homme, éroit un poignard dans les ':"'ams

?

un

rieux: mais ce furieux confoloit l'env1e. Voiia pour·

quoi dans Athenes , comme ailleurs , les mécha:;s

onr trouvé rant d'indu.lpence·,

&

les bons tanr

:'

févériré. Témoin la

comedí<

desNul<s ,

exemplcme·