VJ
ELOGE DE M LE PRESIDENT
Feu M. le Maréchal d'Efl:rées, aJors D ireéteur de l'Acaclémie Frans;oife, fe COI1- .
duifit dans ' cette circonfl:ance en Courtifan vertueux
&;
d'une ame vraiment élevée ;
iI ne craio-nit
rli
d'aburer de fon crédit ni de le compromettre; jI fO ll,tint fon ami
&
jufl:ifia
So~·ate .
Ce trait de courage fi précieux aux Letrres ,
fi
digne d 'avoir aujourd'hui
des imitateurs ,
&
{j
honorable
a
la mémoire de
M.
le Maréchal d'Efl:rées , n'aurolt
pas dtl etre oubli.é ?ans fon é l.üge.
' .
.
.
.
M. de MontefqUleu fut refu le
2-4
Janvler
r 72- 8;
fon Dlfcours efr un des mellleurs
gu'on ait prononcés dans une pareílle occafion; le mérite en efr d'autant plus grand,
que les R écipiendaires géné.s j.ufgu'alors par .ces
~orn~l1les
&
ces Eloges d'uFage aux–
quelles une
~fpec~
de prefC!lptlOl1 les,
alT~Jettlt,
!l
aVOlent encore.
of~
f¡'aoelm c.e cer–
ele pour tralter d auo'es fUJet s , ou n aVOlent pomt penfé du moms
a
les y renfermer;
dans cet éta t méme de contrainte íl eut l'avantage de réuffir. Entre 'plufieurs tralrs
dGnt br ille fon difcours , on reconno'i rroit. l'écrivain gui penfe, au feul portrqit du Car–
dinal de Richeli eu ,
qtÚ apprit
d
la Fral/ce le fl cret de .(es forces ,
~
ti
t' E.fpag1U!
celtti de
fo
foibte./{e , qtti óta
d
J,'
Attemagtte fes chafl1es
~
!tú
el1 d01t1ta efe tIOrtVe/–
tes .
II
faut admirer
M.
de MOfltefguieu d'avoir ffu vaipcre la diffi eulté de Jon fuj et,
&
pardonner
a
cenx qui n'ont pas eu ' le meme fucces.
Le nouvel Académicien étoit d 'amant plus digne de ce titre; qu'il avoit pel1 de
tems auparavan t· renoncé
a
tout aurte travaiI, pour fe livrer enrjerernenn
a
f
011
génie
&
a
fo n gou t . Quelql1e importan te que fUt la place
qu'
iI occupoit, avec guelg'ues
Iumieres
&
ql1elque intégrité qu'il en eut rempli les devoirs, il rentoit gu 'il yavoir
des objers plus dignes d'occuper fes talens ; gu'un Citoyen efi redevable
a
fa Nation
& ;\
l'Humaniré de tout le bien qu'il peut" leur faire;
&
gu'jl feroit plus mile
a
l'une
&
á
I'antre , en les é elairant par fes écrits, qu'il oe pouvoit l'etre en difcutant guel–
qucs contefiat;ons particuJieres dans l'ob[curité: tontes ées réflcxions. le déterminerent
a
~ndre
[a charge; il cea;, (retre MagiLlrat,
&
ne fut
pll~s
gu'Homme de Lettl'es.
Mais pOl1\" fe rendre utile p:1r fes ouvra ges aux diff"érentes
N~tioQ s ,
il é toit néce[–
faire qu'il les cOl1nl1t; ce fut dan s cene v6e qu'iL enn;eprit de voyager . Son but
é–
toit d'examine\: par-tout le phyfique
&
le moral, d'étudier les Lois
&
la coníl:itution
d e chaque pays , de viGter les Sava ns , les Ecrivains , les Artiíl:es célebres, de chercher
fur-tom ces hornmes rares
&
unguliers dont le cornmerce fupplée' guelqmefois
a
plu–
fieurs années d'obfervations
&
de féjQm. M. de Montefguieu
~lit
pu dire, comme
D émocrite: " Je n'ai rien oublié pour m'iníl:ruire; j 'ai gui tJté mOl) pays
&
parcouru
;, l'univers pour mieux connol tre la vé rité: j' ai vu tous les pe¡;[onnages illuíl:rés de
" mon tems ,,; rnais il y eut cette différence entre le Démocrite Frans;ois
8;.
eelui
de, Abdere , que le premier voyageoit pour irtíl:ntire les hommes,
&
le fecond
po.urs'en
mocquer.
Il
al1a d'abord
a
Vienne , on
ii
vit fouvent le cé lebre Prince Eugene; ce Héros
fi
fUl;¡ efl:e
a
la France
(a
laquel1e il auroi t pl1 e rre
fi
uril e) , ,lpreS avoir balancé la for–
~une
de Louis
XIV.
&
humilié la fierté Ottomané , Vlvoit fans faLle durant
la
paix ,
ai-
dre pas . Aveugles qu'i1s font! qu'i1s apprennent une foís
que jamais l'enfer ne prévaudrait fur elles
&
qu'i1 y
II
un
Dien vengeur des impies .
On taxe pour la meme raifon d'exceffive la multiplici–
té des Monafteres. Jls favent que J'églife
&
la religion y
onr trouvés de tout tems leurs défenfeurs ; c'eft pour en
dunmuer le nom!>re on les anéantir qu'ils voudroienr qu'
on reduis!t, ou qu'on fupprimar du tout les monafteres .
Jls cachent fous des raifons en apparence platúibles leur de[–
lei)1 impie ,
&
afin de les rendre plus ébloiiiff., ntes , ils les
tirent des avantages chimériques des états
&
des princes .
S'ils ont de J'empreOe ment pour le vrai bonheur des
é–
t~ts
pourquoi plútot que d'en aIler chercher un imaginai·
re dans les folitudes mmquilles des e1oltres, fe mire fur tant
de .chefs I'éels? Pourquoi ne difent plútot , ces prétendus e–
fpnts fom, qu'il n'y a pas Dieu, qne la religion n'eft autre
chof~
qu'un préjugé de I'éducation ? qu'aumoins dans ce
cas-la. ces blalphemes elfrontés combleroient d'une horrcur
• f.'\lut:ure Jes
leél.msfans danger d'etre feduits : mms pré–
tendre de les G.chor de les in{inucr adroitement eft une
trahifon qu'on ne pe;u fuffifement detef,er.
, .
PC\urquoi appelle-t-on exceffil'e la multiplicntion des
m;m'fteres , {i
no~
parce qu' on croir ¡nutile le main–
t.en&
la propaganon de la religion ?
&
ce ou en re–
prouva~t
du tout les, moyens dont elle depend, ou en
enant
~
la
fu~eti1u~tc
de ces mémcs moyens lorfqu'il
y
en el1 a fouhatler,labondance. Que
la
calomnie
&
la ma–
I!gmté vom!lfcl1t :1 leur gré ce qu'elles ont de plus fedui–
ja~1t
&
v~mllleux : .
elles ne ,fauront jamais fupprimer les
faas pubhcs, m
fu.reque
1
luf\cnre fe dément· puifque
¡¡on-feulement 1:1 T artarie , la Perfe
&
tour le' noul'eau
monde , mais les royaumcs
&
états les plus vaftes, les plus
connus
&
meme aujourd'hui les plus éclairés reconnojf–
fent des O'rdres reguliers leut conl'er{ion. Ce feront au–
tant de rémoins inconteftables pour convaincre qllÍ fe foit,
qu'il n'y a rien de lumineux
&
d'éminent dans l'Eglife que
ron n'en foit redevable " des gens de Cloltre . Parmi les
huir des fes principanx Doéleurs , fix font des moines.
Combien de T héologiens ! combien d'interpretes de r écri–
ture ! combicn d'expoGteurs du droit canon
1
combien de
mahres de la vie fpirituelle , célebres par leurs écrits
&
par la fainteté de k urs mamrs !
e 'eft pourquoi r Eglife par plulieurs mooumens fait ju–
!tice aux foins des reguliers comme
a
des miniftres infa–
tigables
&
lideles
&
pem-etre meme les plus utiles qu'el–
le air ; c' eft ]lourquoi l' héréfie les a toujours regardés
t omllle des ennemis les plus vigomenx
&
les plus redon·
tables. Et pendant que lout cela fait tam d'honneur aux
regulicrs , du moins" parmi
CC\lX
qui font animés d'ull vrai
,éle , recouvre de bH\me
&
de honte ceux qui laxent
d' exceHive la multiplication des Monafteres. G eft
ii
ces
prétendus beaux efprits que je parle : c'eft eux que je re–
me!s an' biíloires ; puifqu'ils cachent fous la fauffeté
é–
blouilfante des lems expreffions
&
fous h préfomption
dont font animé< , je comble d' tUle hontel1fe ignorance ,
que lors feulement on
apper~oit
qu'ils trouyent qui de–
mande rauon de ce qu'ils avancent. Pourql1oi done , fc–
Ion cux , eft-elle excellive la multiplication des MonaJle–
res?
Elle enle'Ut,
difent-ils ,
des fujelJ
a
l'
teat fans donner
a
Di,u des ndornt,"".
Mais , je repars , eft-eÍle générale
cetre propofition, on regarde feulement quelques- uns
~'entre
les reguJiers ? Si la premiere, ils ne méritent pour
tou-