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LIVRE QUARANTE-SEPTIEME.
commen~ail
a
se trouver fort embarrassé, car il
ne voulail pas lui déplaire, et il tenait aussi a mé–
nager les passions de son pays, bien qu'il fut loin
de les partager enlifremcnt. M. de Metternich
l'avait envoyé pour queslionner beaucoup plus
que pour parler ; il l'avail chargé surtout de sa–
voir quelle paix Napoléon serait disposé
a
con–
clure, et de lui insinuer que l'Aulriehe ne tire–
rait l'épée que pour la pnix, et pour une paix
tout allemandc. Dire cela
11
l'impétueux Napo–
léon, rayonnant de confiancc et d'ardeur, n'était
chose ni aiséc ni agréable. Aussi le prince de
Schwarzenberg n'avait-il accepté cctte mission
qu':l rcgrct, et ne
la
remplissait-il qu'avec une
sorlc de mfüvaisc gr:\cc. 11 n'arlicula ricn de
clair ni de satisfaisant, parla seulcment de la né–
ccssité de la paix, du déchaincmenl des esprits
en Allcrnagnc, et n'osa cxprimcr qu'unc trCs–
pelitc ¡m tic de ce <¡u'il élait chargé de <lire.
Napoléon <lu reste ne lui laissa ni le lcmps ni
l'occasion de s'expliqucr, chercha en Je carcs–
sant beaucoup a l'enlraincr dans ses projcls, Jui
montrJ une confiancc calculéc, et prcnant ses
états <le t1·oupcs qu'il avait toujours sur sa table
ii
travoil, s'cITorgade Jui persuadcr qu'il avait en
Fr:rncc, en Allemagnc, en ltalic, en Espngnc,
OllZC
oudouzc centmi lle hommes sous les nrmcs,
valaut bienenqualité les jcunes Allemandsqu'on
dcvait lui opposer, ayanl de bien nutres olTiciers,
etsurtout un bien aulrc général. 11 affirma r¡uiil
allail écraser les Russcs el les Prussicns, et les
jetcr au dclá de Ja Vistulc. JI lacha cnsuilc de
pcrsuadcr au princc que c'élail le cas pou1· l'Au–
tl'iche de rendrc la paix ccrtainc el immé<lialc
en se
pronon~~rnt
en f":wcur de Ja France, et
1le
la rcnd1·c en ontrc Ja plus avantagcusc qu'cllc
ctit
janrnis
concluc, en
acceplant
la Silésie, un
miIliondePolonais, et l'Jllyric, to11tcs chosesqu'il
c'tait prét
a
lui donnc1'. Le princc de Schwarzcn–
berg, quoiquc
doué
d'unc raison asscz
fcrme,
ful. to11ché des calculs de Napoléon, cssaya tou–
tcfois de lui dirc qu'il aurait
¡,
combattrc daos
la prochai11c campagnc des troupes animées <l'un
violcnt fonatismc, que ce ne serail pas !'affaire
d'une
OU
dcux balaiJlcs, qu'il scrait done sngc
a
lui ele
songcr
a
négocicr,
que
l'Autrichc était
toutc prClc
~
l'y
aidcr,
111;1is
qu'cllc ne
pouvait
ccpcndant pas se battrc contrc l'Europc, pour
un arr:ingcment qui ne scrait en
rico
conforme
aux Yooux el aux inté!'cts de l'Allcmagne. Mais
Napoléon était bcaucoup trop ardent pour qu'on
pút avcc de froidcs raisons l'arrctcr dans ses
élans. Le princc de Schwarzcnbcrg vit bien <¡u'il
voulait se battrc aoutrance, que rico ne J'en cm–
pcchcrait, que probablement il aurait des suecos,
et pensa qu'il fallait attcndre ces succcs, et en
connaitrc l'importance, avnnt de ricnaugureret
de ricn résoudrc. En conséqucnce il proféra
quclques mots saos force el sans suite, puis se
tut, n'osant pas meme dirc
a
Napoléon, sur un
poiut trcs-important, la vérité qu'il savait, et
qu'il eut été de sa loyautéde lui faire connaitre.
Ce poinl était rclalif au corps auxiliaire aulri–
chien.
L'
Autriche aITcctant de rcster fidcle au
traité d'alliance du H mars 1812, le corps
auxiliaircaulrichicndcvait toujours elre
a
Ja dis–
position de Napoléon, et de plus son entrée en
aclion étail fort désirable en ce momcnt. Napo–
léon <lit done au princc de Schwarzcnbcrg qu'il
allait cxpédicr á ce corps des ordrcs pom· qu'il
s'avan~at
avcc leprincePoniatowski vcrs la hauto
Silésie, et qu'il cspérait que ces ordres seraicnt
exécutés. Leprince <leSchwarzenberg, qui savait
bien que son gouvcrnemcnl ne voulait plus tirer
un coup <le fusil,craignit de J'avoucr aNapoléon,
et cut la faiblcssc de lui répondrc que le corps
autrichien obéirait.
Aprcs avoir vaincment tenté de convertir le
princc de Schwarzcnbcrg, Napoléon adrcssa
a
scsalliés Je grand-duc de llade, Jcprincc primat,
le duc de Wurzbourg, les rois de Wurtcmbcrg,
de Bavicre et de Saxe, la rccommandation de
préparer lcur contingcnl, et surtout de lui expé–
dicr ce qu'ils auraicnt de cavalcrie organisée. JI
insista particulicrcmenl auprcs du roi de Saxc,
retiré
a
Ratisbonne, lcqucl avait avcc lui les
2/>00 bcaux cavalicrs dont nous avons parlé, et
sur lcsquelsNti¡iuléon comptait pour lesadjoindre
au corps du nrnréchal Ncy.
11
fil ccltc demande
comme on donne un ord1·c absolu. Toutcs ces
clispositions tcrminées, et aprCs avoi1· rcgu les
dcrnicrscmbrassemcnts de l'Jmpfralricc, émuc,
désoléc de cctle séparation, il partil Je
'15
avril,
aussi ardcnt, aussi confiant qu'au début de ses
plus bcllcs campagncs
!
Heurcusc et fata le con–
fiancc qui dcvait produil'c de grandes choscs,
rnais, par son cxcCs mCme, nrncncr de nouvcaux
et irréparablcs désaslres!
l'll'i DU TOME QUATRIEME.