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L'UNIVERS.
les forces de l'empiL·e , lorsque les Es–
pagnols ne comptaient pas un seul
allié, lorsqa'ils n'avaient aucun poiut
fortifié, lorsqu'ils étaient ans provi–
sions et sans moyens de s'eu procurer,
ne laissait pas une chance de succes
a
l'armée d'invasion; toule temporisll–
tion, au contraire, lui permettait de
s'étendre dans le pays et de s'y donner
les mécontents pour auxiliaires. Moc–
tezuma se décida pour Je parti qui ser–
vait ses ennemis : il négocia. Et <l'a–
bord, pour se rendre
les pretres
favorables, il les invita a consulter les
dieux. Les <lieux répondirent qu'il ne
fallait pas recevoir lés étraugers, et
:Moctezuma se h1ita de transmettre
cette
répon~e
par un ambassadeur, en
l'accompa~nant
de .présents
ma~nifi
ques portés par cent hommes
(*),
et
destinés
a
adoucir ce que· son mcs–
sage pouvait avoir de désa$réable a
Cortes
i
mais
il·
avait affaire
a
un
}1pmme de volonté ferme, et qui
juge¡¡it 1léja son ennemi par ses len–
teurs. Ni les présents de l\loctezuma,
ni
l'adresse de ses néguciateurs ne
changerent rien aux projets du géné–
:ral; il déclara ré olument aux
envorésqu'il avait Ol'dre ele se rendre aup.re
de lem· maítre, et qu-'il s'y rend,rait.
Cette réponse n'était pas de nature
a
(') o·n trouve dans tous les écri,•ains es–
pagnols le pompeux dé1ail de ce riche pré–
sent, compasé d'étoffes de coton d'une
grande fin esse ; de quelqnes mosalques en
p)umes, représenlant des animaux, des
arbrP,s, des scimcs de la vie domestique;
de uraeelets, d'annea11x, de colliers en or,
de. hoites remplies de perles, de pienes
précieus
bien montées, el de deux grands
plals de forme ronue, !'un d'or massif,
représc:ntant le soleil
1
l'antre
d'ar~ent,
re–
présentanl la l1111e. Ce dernicr, s1 l'on en
croit Berna! Diaz, valait scul plus de
20,000
p esos ( 125,ooo f. ).
II
est probable
~ne
ces divcrs objets avaient été préparés
¡1ou1· Gi'ijal"ª• lors de son déban¡nement sur
lé
meme point , l'année précédenle'
et
qu'ils se trouvaient tout prcts lorsc¡ue Moc–
tezuma donna l'ordre au gou\'ernenr de
sa
pro\'ince de les offrir
a
Cortes. C'est du
moins re qu'on peut inférer du récit de
Gomara.
les satisfaire. Ce qu'ils avaient vu <le
la puissance des armes espagnoles leur
montrait la guerre comme le plus terri–
ble des fléaux, et pour l'éviter, s'il était
possible, ils prierent Cortes de sus–
pendre sa marche jusqu'au moment ou
leur ma1tre aurait fait connaítre ses
dernieres volontés. Cortes eucore une
fois ne se méprit point
a
de tels signes
de faiblesse.
Nous avons déja vu que plusieurs
années avant l'arri véedes Espagnols,de
sinistres présages, interprétés par l'igno–
rance et la peur, avaient jrté de
~rands
troubles dans l'ame de l\Ioctezuma. Ce
n'était plus ce prince prudent et forme
dorlt l'avénement au trone avait été
salué pard'unanimes acclamations; son
joug, a l'heure ou nous sommes, était
lourd pour tout l'Anahuac, et le pou–
voir vacillait dans sa main. A la nou–
velle du refus de Cortes de quitter le
pays, lui, prince absol u, dont les or–
dres étaient sacrés pour des mi!liers
d'hommes, ne put comprendre l'audace
de l'étrJn<rer; il e11t un moment d'éner–
gie;
il
mena~a
de le sacrilier aux dieux.
J\Iai cet écloir de co lere fut court; la
peur reprit bientot le dessus; les mi–
ni tres furent appelés au con eil; on
résolut d'e ayer encore une fois de
la diplomatie et des présents : les
memes ambassadeurs, avec de plus ri- ,
ches cadeaux, furent deµechés au camp
de Cortes.
Ce camp n'était pas non plus exempt
d'alarmes. Deux partis y étaient en
présence: d'un coté, les amis de Cor–
tes prets
a
tout risquer avec lui; de
l'autre,
les partisans de Velasquez
effrayés de leur désobéi sanee, et re–
doutant de s'avancer dans un pays in–
connu couvert d·une population guer–
riere, sans vi vres as. ures, sans places
fortes pour retraite. Cortes, au milieu
de ces difficultés, restait inébranlable,
caressant le so ldat, se montrant géné–
reux envers lui , l'excitant savs cesse
avec cette paro le gersua ive, cette élo–
quence militaire dont il avait si par–
faitement
le secrPt. II s'occupait
a
entretenir toutes les e pérances et
i.t
tout préparer pour l'inrn ion, lorsque
les ambassadeurs de l\loctezuma se