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L'UNIVERS:
et dissoÜte:-Au-milieu de cet étrange
désastre, plusieurs capitaines, frap–
pés de stupéfaction et de terreur, n'o–
sent ni fuir ni combaltre. Pizarre re–
garde autour de tui et s'aperQoit que
tout espoir est perdu. Il consulte avec
anxiété les officiers qui sont restés
aupres de sa _per-sonne. L'un d'eux,
Jean d'Acosta, s'écrie : " En avant
contre l'ennemi , et mourons en Ro–
mains
! " -
.
«
Mourons plutot en chré–
tiens, " répond Pizarre consterné. Et
oubliant sa gloire passée , l'honneur
de son nom, le souvenir de son,
fre–
re, ses devoirs envers tui- meme, il
rend humblement son épée au p·remier
officier du yrésident qui passe pres de
lui. Tout etait fini, Gasea triomphait
sans avoir répandu une goutte de sang.
Le vieux Carvajal essay
a de s'échapper;
mais il tomba d11ns un
ruissP.aumaré–
.cageux, ou il
fut
pris
par ses propres
soldats qui s'empresserent de le li vrer
a
ses ennemis : exemple bien frappant
de l'immoralité profonde qui régnáit
parmi les hommes de guerre du l'érou.
' Ce fut
I~
un singulier et bien hon–
teux dénoument; et les premiers actes
de ce drame, si sérieux en apparence,
avaient annoncé une fin moins pi–
toyaole. Le ereur se souleve de rlégotlt
en relraQant des faits ou se montre
un si ignoble mépris de tout senti–
ment d'honn eur et de fid élité.
JI
sem.
ble, en vérité, qu'on écri ve l'histoire
d' une ba·nde de
condotlieri
qui défend
ou trahit le chef auquel elle a j.oué ses
services, suivant qu'elle est bien ou
mal payée, sui va nt
qu'~lle
a peur ou
que l'espoir d' une ri che récompense
soutient son méprisable courage. La
com~araison
n'est certes pas exagérée,
car la passion des richesses , la mau–
vaise organisation des armées et les
vices des chefs, avaient ravalé les
aventuriers du Pérou an niveau de ces
étres dégradés qui ont perdu toute
idée de moralité et de droiture.
Pizarre fot amené en présence de
Gasea, qui, suivant quelques histo–
riens, se permit sur sa situation quel–
, ques observations ironiques, f9r t dé–
placées dans un pareif moment. Il
parait que le vaincu répondit avec un
dépit qu' il ne prit pas la peine de clis–
simuler. Choqué d'un langage que,
pourtant, il avait provoqué , le prési–
dent ordonna qu'on éloignat le prison–
nier, qui fut déposé dJns la tente de
Diego Centeno, pour y attendre son ar–
ret. Exclusivement préoccupé de
es
devoirs de chrétien, Piza rre demanda
a
Centeno si on lui laisserait la nuit
pour se recueillir. Son gardien lui
ayant
ré.pondu afürmativement, il
passa le reste du temps qu'il avait
a
vi–
vre en oraisons et enconversations avec
son confesseur. Cependant ses ennemis
s'impatientaient et réclamaient tout
haut la mor.t du prisonnier. Enfin, le
lendemain de la bataille, vers le soir,
on vint annoncer
a
Pizarre qu' il était
condamné
a
etre décapité. La sentence
portait, en outre, que sa tete serait
portée
a
Lima, ou elle resterait pu–
bliquement exposée, avec cette inscrip–
tion :
«
Voici la tete de Gonzale Pi–
zarre, tra1tre et rebelle
a
son roi, qui
s'i)lsurgea contre son autorité au Pé–
rou, et osa livrer bataille, dans la val –
Jée de
Xaquixa~uana,
a
l'armée qui
111archait sous l'étendard de Sa l\lajes–
té
!
»
Pour compléter le chatiment, ses
biens devaient elre conllsq ués, ses mai–
sons ra ée jusqu'au sol, et il était dit
qu'on semerait du sel sur l'emplace-
ment qu'elles auraient occupé.
·
Pizarre fut extra it de la tente qui
Jui avait serví de prison, et monta,
couvert d'un manteau, sur une mule
qui l'attend ait
a
la porte. On tui laissa
les rnains libres, et il en profita pour
teni r et porter
a
ses levres une image
de la Vierge. Chemin faisant,
il
mur–
murait des prieres, comme aurait pu
le faire un crimine! tourmenté de re–
mords et effrayé sur le salut de son
ame. II demanda un crucifix, et un_
pretre luí en donna un, qu'il prit avec
une ardente dévotion , et qu'il tint
embrassé jusqu'a ce qu'il eut atteint
le li eu du supplice.
II
monta sur l'é–
chafaud, et, s'adressant aux soldats
qui l'entouraient, il leur rappela ce
qu'il avait fait pou.r eux, les ricbesses
et les di stinctions qu'il leur avait ac–
cordées; en retour de ces bienfaits,
il implora de
leur · cbarité quelques