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160

S 1 B

Plutarque nous a con(ervé dans la vi€' de Démof–

thene , un de ces

or~c1es

qU\

cOl~r~ient

dans l,a Grec,e

fous le nom de la

SlbjLle

;

c eft a

1

oCCélflOn ae la de–

faite des Athéniens, pres de Chéronée ; on étoit, dit

Plutarque, dans une grande inquiétucle avant la, ba–

taille ,

el

cauCe d'un Ql'acle dont tout le monde s en–

tretenoit: .) Puiífai-je, di(oit-il, m'éloigner de la

" bataille du Thermodon , & devenir un aigle pour

,) contempler dl1 haut des nues ce combat, Olt le vain–

)) cu pleurera, &

011

le vainqueur trouvera fa perte

)~.

Il

étoit bien difficile d'appliquer cet oracle

a

la défal–

t e de Chéronée;

1

0.

ii,falloit trouver un Thermo–

don

aupr~s

du champ de bataille; & Plutarque qui

étoit de Chéronée meme, avoue qu'il n'a pu décou–

v rir dans les environs de cette ville , ni ruiífeaux, ni

torrent de ce nomo

2°.

Le vainqueur ne'trouva p<llint

fa perte

el

cette hataille, & meme il n'y fut pas bleífé.

Lorfqu 'on examinera les prédiaions des orac1es

les plus accrédités, celles de la 'Pythie, de Mufée ,

de Bacis, de la

JibylLe,

&c. rappo'rtées dans les an- ,

ciens on trouvera toujours que Cicéron ,

Li'Y.

JI.

n.

.5 6 . d: divinat.

a raifon de dire , que celles qui

n'on~

pas été faites apres-coup , étoient obfcures

&

équi–

voques, & que fi quelques - unes n'avoient pas été

démenties par l'événement, c'étoient au hafard qu'el,

les le devoient.

Quelque abfurdes que fuífent les

c~n~éq\.~ences

que les partifans du

furnat~rel

de la divlOatlOn fe

trolivoient obligés de foutemr dans les controverfes

philofophiques , ils étoient excufables jufqu'a un cer–

tain point. Le principe qu'ils défendoient , faifoit

chez eux une partie eífentielle de

la

re!igion commu–

ne ; ce principe une fois admis, l'abfurdité des COI1-

féquences ne devoit point arreter des hommes reli–

gieux. Mais que dire de ces rufés politíques , qui

pour couvrir les delleins de leur ambitiort, forgeoient

a

leur gré des oracles

Jibyllins?

C'eft ainfi que P. Len–

tulus Sura, un des chefs de la conjuration catilinaire

n'eut point de honte de femer comme vraie, une pré–

tendue prédiaion des fibyUes, annon<.rant que trois

Cornéliens jouiroient

el

Rome de la fouveraine puif–

fance.

Sylla & Cinna, tOllS deux de la famille Cornélien–

ne, avoient déja véritié une partie de la prédiélion.

, Lentulus ,qui étoit de la meme famille, répandit dans

le ptlblic que l'oracle devoit avoir fon accompliífe–

ment dans fa perfonne ; & peut-ettte eút-if réuffi fans

l'heureufe prévoyance de Cicéron? qui tit mentir

1'0-

racle.

Pompée voulant rétablir Ptolomée Auletes dans

fon royaume d'Egypte , la faaion qui étoit contraire

el

ce puiífant citoyen, prit le partí d'inventer une pré–

diaion fibylliJ1e qui portoit, qu'au cas qu'un roi c\'E–

gypte eut reCours aux Romains, ils devoient l'affif–

ter de leur proteaion , fans lui fournir de troupes.

Cicéron qui {outenoit le parti de Pompée, favoit bien

que l'oracle étoit {uppo{é ; mais

per~uadé

qu'il étoit

plus {age de l'éluder que de le réfuter, il tit ordon–

ner au procon{ul d'Afrique, d'entrer en Egypte avec

fon armée, de conquérir ce pays, & d'en gratifier

Ptolomée au nom des Romains.

Jules-Céfar s'étant emparé de l'autoril'é fouveraine

fous le nom de

diaateur,

fes parti{ans qui cherchoient

el

lui faire déférer la qualité de roi , répandirent dans

le public un nouve1 oracle

JibyLlin,

felon lequel les

Parrhes ne pouvoient etre aífujettis que par un roi

des Remains: Le peuple étoit déja déterminé

a

lui

en accorder le titre,

&

le fénat fe trouvoit contraint

d'en figner le decret , le jour meme que Céfar fut

aífaffiné.

Enfin cet abus de faire courir dans Rome & dans

tome l'ltalie des prédiaions

fibyLLines ,

alta fi loin ,

queTibere tremblant qu'on n"en répandit contre luí,

défendit

a

qui que ce fut

d'a~oir

aucun papier de pré-'

S 1 B

diaions

Jibyllines

,

ordonnant

a

tous ceux

qui

en att–

roient de les porter dans le jour meme au préteur :

JimuL commonefecit, Tiberius"

,9z:

ia

multa 'llalla

fub

¡¡.o–

mine celebri yu/gabantur ,fal/xiJje AuguJlum, quem in–

tul diem ad

pr~lOrem

urbanum deferrentur

,

neque habue

priyatim Liceret.

ee qui caufe mon étonnement, n'eft pas de voir

que les Romains cruífent aux oracles des fibyIles, c'é–

toit un principe de leur re!igion, quelque ridieule

qu'il ñtt en lui-meme; tnais je fuis toujours (urpris

que dans des tems éclairés, te! qu'étoit la fin du der–

nier fieele , la queftion du furnature! des oracles eftt

encore befoin d'etre traitée férieu(ement , & qu'une

opinion fi folle & contredite par les faits memes {ur

lefqnels on la fondoit dans le paganifme, ait trouvé

de nos joui's , pour ainfi dire,

&

dans le fein du chrif–

tianifme, des défenfeurs ues·zélés.

(Le clayalúr

DE

J.dVCOURT.

SIBYLLlNS, LlVRES,

(Hifl.

eccL.!J.)

1'ouvrage

mo~

derne'qui nouS eft parvenu {ous ce nom, eft une com–

pilation informe de propbéties différcntes , fuppofées

la plltpart vers le premier ou le fecond fieele du chri–

ílianifine, par quelqu es-uns de ces hommes, qnijoi–

gnant la fourberie au fanati{me, ne font point (eru–

pule d'appeller le menfonge

&

l'impoílure au fecours

de la vérité.

Les livres ou vers

fiby LLins

dont nous parlons, {ont

,encore remplis de chofes contre l'idolatrie

&

la cor–

ruption des mreurs des payens, mais on

a

eu

foinpo~r

accréditer ces prophéties , d'y inférer plufieurs cir–

coníl:anees véritables que fourniífoient les ancíennes

hiftoires qui fubúíl:oient alors, & que la barbarie des

fieéles poHérieurs

a

détruites.

Il

eíl: auffi faít mention

dans ces vers , d'une comete que l'auteur .annonce

devoír précéder certains événemens qn'il prédit

a–

coup-sur, puifqu'ils étoient al'rives ainfi que la co–

met ,plufieurs fie eles avant lui; mais on attend fans

doute de nouS quelques détails de plu,s {ur cette col.

leaion des vers

jib)'lfins.

'

'

Elle eft divifée en huit livres, & a été imprimée

pour la pre¡piere fois en

1545

{ur des manu{crits,

&

publiée plufieurs fois depuis avec d'amples commen–

taires, furchargés d'une érudition fonvent triviale ,

&

prefql~e

toujours étrangere an texte que c,es com–

mentaires éelairciífent rarement. Les ouvrages com–

pofés ponr & contre l'authenticité de ees livres

Jibyl–

lins

,

{ont en treS -grand nombre, & quelques - uns

meme tres-favans ; mais il y regne fi peu d'ordre &

de critique,& leurs auteurs étoient tellement denués

de tout efprit philofophique, qu'il ne refteroit

a

ceux

"lui auroient eu le courage de les lire , que l'en¡1Ui

.&

la fati gue de

cett~ ~eaure.

.

.

.

Le íavaht FabnclUs, dans le premler hvre de fa bl–

bliothe9ue grecque, donne une efrece d'analy{e de

ces differens ouvrages,

el

laquelle il joint une notíce

aífez détaillée des huit livres

,fibyLÜns.

On peut y

avoir recours; c'eft aífez de nous borner dans cet

artiele

el

quelques obfervations générales fur ces huit

liv res

fibyUins

modernes.

10.

11:ea vifible , qu'ils ne font autre chofe qu'un e

miférable compilation informe de divers morceaux

détachés , les uns dogmatiques, les amres

fupp~fés

propbétiques , & ceux -

ci

touj·ours écrits depuis les

événemens , & le plus fouvent chargés de détails

fa–

bu'leux ou du moins peu aífurés.

2 0 •

11 eft encore celtain que tous ces morceauJC

fOn! écrits dans une vue 'abfolument différente de

cdle que s'étoient propo{ée les atÍteurs des vers qui

compofoient le premier

&

le fecond des deux re–

cUt:~lls

gardés

a

Rome. Les aneiens vers

JibyLlins

pref–

crivoient les {acrifices, les cérémonies , & les fe tes.

par lefquelles les Romains pouvoient appaifer le cou–

r~ux

des dieux qu'ils adoroient. Le recueil moderne

eft au contraire rempli de déelamations tres - vives

coat-re