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AME
pofées dans les
eor~s
vivans, eomme elles produi–
tent eelles de lem genération
&
de leur deftrufrion:
mais de ees lois réfulte le plus grand bien ele tout
le fyíleme immatériel,
&
des intelligenees qui lui
fOl1t unies; la fufpenfion ele ees lois renverferoit
tout. Qu'emporte done la jull:e idée d'un Dieu
hon
?
e'eíl que quand il agit il tende tOlljOurS
au bien,
&
produife un bien; e'ell: qu'il n'y ait au–
CUl1e eréature fortie de fes mains qui ne gagne
a
CXlftcr pllltot que d'y perdre:
01'
telle eílla condi–
tion des Mtes; qui pomroit pénétrer lem intérieur,
y trouveroit une compenfation des doulems
&
des
plaifirs, qui tomneroit toute
a
la gloire de la bonté
divine; on y verrolt que dans celles qui fouffrent
inégalement, il Y a proportio/1, inégalité, ou de
plalflIs ou de durée
~
&
que le degré de douleurC¡lli
pOllrroit renclre leur exillenee malheureufe, eíl pré–
cifément ce c¡ui la détruit: en un mot, fi I'on dédui–
foit la fomme des maux, on trollveroit totljollrs an
bout du calcul un réfidn de bienfaits purs , dont elles
font uniqnement redevables
a
la bonté divine ; on
verroit que la fageíI'e divine a
fU
ménager les cho–
fes, en forte que dans tout individu fenfirif , le de–
gré dll mal c¡u'il fouffre , fans lui enlever tout l'a–
vantage de fon exifrence, tourne d'ailleurs au profit
de l'univers. Ne nons imaginons pas aulIi que les
fouffrances des
b~tes
reíI'emblent aux notres : les be–
tes ignorent un grand nombre de nos m¡IUX, paree
qu'elles n'ont pas les dédommagemens que
1l0US
aVOJ,s ; ne joiii1Tant pas des plaiflIs que la raifon pro–
cure, elles n'en éprouvent pas les peines: d'ailleurs,
la perception des betes étant rerrfermée dans le point
indivifible du préfellt, elles fOlllfrent beaucoup
moins que nous par les douleurs dll meme genre ,
parce que l'impatience
&
la crainte de l'avemr n'ai–
grit point leurs maux,
&
qu'heureu(ement pour elles
. illeur manque une raifon ingénieufe
a
fe les groíI'II.
Mais n'y a-t-il pas de la cmauté
&
de l'injuilice
a
faire foulfrir des
ames
&
a
les alléantir, en c1étmi–
fant leurs corps pour conferver d'autres corps? n'eíl–
ce pas .lm renver(ement vifible de l'ordre, que l'
ame
d'une mouche, qui eíl plus noble que le plus noble
des corps, puifqu'elle eíl fpirituelle, (oit détnlÍte afin
.que la mouche (erve de pature
a
l'hirondelle, c¡ui el'It
ptL fe nourrir de toute autre chofe? Eft-il juíle que
¡'ame
d'lln poutet fouffre
&
meure afin que le corps
de l'homm.e [oir nomri? que
l'
ame
du chc'val endure
millepeines
&
millefatigues durant
fi
long-tems, pour
fomnir
a
l'homm,e l'avantage de voyager commo–
dément
?
Dans ceue
multitu.ded'
ames
qui s'anéantif–
fent tons les joms pOLII les be[oins paífagers des corps
vivans, peut-on reconnoitre cette équitable
&
fage
filbordination qu'UI) Dieu bon
&
juíle doit néceífai–
rement obferver? Je réponds
a
cela que l'argument
feroit viétorieux,
fi
les
ames des brutes
fe rapportoient
aux corps
&
fe terminoient
¡\
ce rapport; car certai–
nement tont etre Cpirituel eíl au-deíI'us de la matiere.
Mais, remanluez-le bien, ce n'eíl point au corps,
<omme corps , que fe termine.l'ufage que le Créateur
tire de cette
ame
(pirituelle, c'eft auhonheur des etres
intelligens.
$
le cheval roe porte,
&:fi
le poulet me
nourrit, ce font bien
la
des elfets 'Iui le rapportent
direétement
a
mon corps : roais ils (e temlinent
a
mon ame, parce <¡Iue roon ame feule en recueille
l'utiüté. Le corps n eft que pour I'ame, les avantages
du corps font des avantages propres
¡\
l'arné; tontes
les douceurs de la vie animale ne iont que pour elle,
n'y ayant qu'elle qui pl!iífe fenrir ,
&
par con(équent
etre fufcepcible de félicité. La queílion reviendra
donc 11 Cavoir íi l'
ame
du cheval, du chien , du pou–
let, ne peut pas etre d'un ordre a{fez inférieur
a
l'ame
hllmaine, pour que le Créateur employe .celle-Ia
a
procurer, meme la plus perite partie du bonhellr de
celle-ci, fans violer les regles de l'ordre
&
des pro-
AME
portions. On peut dire la meme chofe de la mouche
a l'égard de l'hirondelle , qui ell: J'une nature plus
excellente. POllr l'anéantiíI'ement, ce n'ell: point un
mal pour une créahlre qui ne refléchit point
fill'
fon
exiftence, qui eíl incapable d'en prévoir la fin,
&
de comparer, pour ainíi dire , l'etre avec le nOn'"
etre, quoique pou! elle l'exiílence foit un bien,
parce qtl'elle (ent. La mort,
a
l'égard d'une ame fen–
fitive, n'eíl qtle la (oufrrafrion d'un bien 'Iui n'étoit
pas dfl; ce n'eíl point un mal qui empoi(onne les dons
du Créateur
&
qtli rende la créahlre malheureufe.
Ainfi, quoique ces
ames
&
ces vies innombrables
qtle Dieu tire chaque jour dll néant, foient des preu–
ves de la bonté divine, leur deílmétion journaliere
ne bleífe point cet attribm : elles fe rapportent au
monde dont elles font partie; elles doivent fervir
a
l'utilité des etres qui le compofent; il fuffit que cette
utilité n'exclue point la leur propre,
&
qu'elles foient
heureufes en que!que mefure, en contribuant au bon–
heur d'autrui. Vous trouverez ce (yfteme plus dtve–
loppé
&
plus étendu dans le traite de I'e{fai philofo–
phique fur l'
ame des betes
de M. Bouillet, d'oü ces re–
fIéxions ont été tirées.
L'
AmufementphiloJophique dlt Pere Bougeam
Jéfuite
[ur le lal1gage des betes, a elL trop de cours dans le
monde, pour ne pas mériter de trouver ici fa place.
S'il n'eíl vrai, du moins il eft ingénieux. Les betes
ont-eIles une
ame,
oun'en ont-elles point? qtleílion
épinellfe
&
embarraíI'ante furtout pour un philo(ophe
chrétien. Defcartes fur ce principe,qtl 'on peut expli–
quer toutes les aétions des betes par les lois de ,la
méchaniqtLe, a prétendu qtl'eIles n'étoient que de
íimples machines, de purs automates. Notre raifon
femble fe révolter contre un tel fentiment: il y a
meme quelque chofe en nous qui fe joint
a
elle pour
bannir de la (ociété l'opinion de Defcartes. Ce n'eft
pas un fimple préjugé, c'eíl une perfuafion intime,
un fentiment dont voici l'origine. Il n'eíl pas poffible
que les hommes avec qtiÍ je vis (oient amant
d'auto~
mates ou de perroqtlets inílruits
¡\
mon infu. J'ap–
pen;ois dans leur extérieur des tons
&
des lnouve–
mens qui paroiíI'ent indiquer une ame: je vois régner
un certain lil d'idées
qui
fuppo(e la raifon : je vois de
la liaifon dans les raifonnemens qtl'ils me font, plus
ou moins d'efprit dans les ouvrages qtl'ils compofent.
Sur ces apparences ainfi raífemblées, je prononce
hardiment qu'ils pen(ent en elfet. Peut-etre que Dieu
pourroit produire un automate en tout femblable au
corps humain , leque! par les feules lois du mécha–
ni(me, parleroit,
feroit
des difcours fuivis , écriroit
des livres tres-bien raifonnés. Mais ce qui me rallure
contre toute erreur, c'eft la véracité de Dieu. Il me
fuffit de trouver dans mon ame le principe unique
qtu rélmit
&
qui expliqtle tous ces phénomenes qui
me frappent dans mes femblables, pour me croire
bien fondé
a
foflterur qu'ils font hommes comme
moi. 01' les betes font par rapport
a
moi dans le me–
me caso Je vois un chien accourir qtland je l'appelle,
me careífer quand je le fIatte, trembler
&
nlir quand
je le menace, m'obéir quand je lui commande,
&
donner toutes les marqtLes extériellres de divers fen–
timens de joie, de trifre{fe , de dOlllellI, de crainte ,
de deflI, des paffions de I'amour
&
de la haine ; je
conclus auffi-tot qtl'un chien a dans lui-roeme un
principe de connoiífance
&
de fenciment , quel qu'iI
foit.1I me fuffit que
l'ame
qtle je lui Cuppofe foit l'u–
ruque raifon fuffifante qui fe lie avec toutes ces ap–
parences
&
tous ces phénomenes 9ui me frappent
les yeux, pour que je (oís perfuade que ce n'eft pas
une machine. D'ailleurs une telle machine entrai<
neroit avec elle une trop grande compoGtion de
reíforts, pour qtle cela puiífe s'allier avec la fage{fe
de Dieu qui agit tOlljours par les voies les plus
íim–
pIes.
n
y a toute apparene que De[cartes, ee géníe