S E N
mal, ;.;,médiatemenr .
&
fans que nous
~yons
au.
cune connoi!fance Ju fu jet de ce bien ou de ce mal,
de la maniere dont cela fe fair fentir,
&
des occa–
fions qui le font na!rre, E1ns voir l' utiliré ou les in–
convé11iens, dont l'ufage de ces objers peut erre la
caufe dans la fuite . La connoift1nce la pl::s parfaite
de ces chofes ne changeroir pas le plaitir ou la dou–
leur de la fenfarion; quoique cela pOt donner un
pla itir q_ui fe
f~it
fentir
a
la raifon. rres-difrinél du
plaitir leníible, ou que ceJa pur caufer une joie dif–
tinde, par la confidérarion d' un avantagc que l'on
pourroit atteudre de l'objet, ou excirer un fcutiment
d 'a•verlion, par l'appréhenlion du mal .
11
o'y
a
prefque ppinr
d'o~jct,
donr notre
~me
s'occupe, qui n e foir une occaúon de bien ou de mal–
l! rre: ainj¡ nous nous rrouverons agréablement alfe–
éh!s
d'une forme réguliere, d'une piece d'archíteélure
o
u de peinrure, d' un morceau de mu!ique;
&
nous
fentons inréricurement que ce plai!ir naus vient na–
turellemenr de la coo,templation de l'idée qui efl alors
prélenre
a
notre eíprit, avec raures fes cireonllan.
ces ; <JUOique quelque.s-unes de ees idées ne renfer–
mcnr rien en elles de ce que nous appelloos
p~rcep"
tion .feHfi'ble;
&
daos eelles qui le renfermenr, le
pl~i(J,·
vicnr de quelque uniformicé
1
ordre,
arran~ement
ou imication,
f,<
no.o
pas
~es
limpies idées de cou.
leur, de fon .
ll
p.ar
olt .qu'il s'enfuir dc-·I.L
que, quand l'inflru–
¿}ion, l'
éducari.on,ou qnelque
pr~jugé,
noos
fait
oalcrc des J efirs ou de6
répu~nances
parrapl~orr
a
un objec¡ ce delir ou cecre averíion fo.nt fondés (ur
_ l'opin10n de que]que perfeélion ou de quelque
dé–
- faur, .que o a us imdgiuons daos .ces qualicés. Par con–
féquenr ,
ti
quelqu'un privé
au.fbu
de la vue, ell
af-
,
fe~é
du dehr de beauré, ce
d~fir
doir nairre de ce
.qu' il fent quelque régu laricé dans la figure, quelque
grace daos
1~
voix, quelque douceur, quelquc mol–
lefre , ou quejques
~u
eres qnal icés, qui ne fnnr per–
ceptible• <¡ue par les
fiJ¡s
ditférens de la vue, !i111s au–
.cu¡¡ rapport aux idées de couleur.
Le teul plaitir de fencimeor, que uos phllofophes
femblenr con!id.érer, efl celui qui
accompa~ne
les
jimples
.idé~s
de fen fation . Mais
i1
y
a
1111
rre1-grand
nombre de fe1!timens agré4bl>s, dans ces idées com–
plexes des ob¡ecs, auxquels nous donnons
les non1s
de
bumx
&
d'bnrmonú11x;
que l'on appelle ce1 iMcs
de bcau ré
&
.d'harmonie , des perccptions des
{tnt
exrérieurs di! la vuc
&
de l'ouie, ou non, eela· n'y
fait ricn: on devroit plurót les appeller un
fint Íll–
ttrne,
ou un
fintiment intériellr,
nc fQc. ce feulement
qu~
pour les di!linguer des aurres fenE1rions de la
vue
&
de l'ouie, que l'on peur avoir fans aucu¡¡e
perccp.tion de beaucé
&
d:harmonie .
lc1 le prt'fenre une quelbon, f.woir, fi les
font
font
p our nous une regle de véri té .
C~la
dépend de lama–
niere donr nous les envifagcpns. Qu3nd nous vou–
lon¡ _donner aux aurres la
plu~
granae preuve qu'ils
accer¡cje~r
di" nous rouchant la vériré d' une chofe,
nous diloos que nous l.'avons vue de nos ¡reux;
&
{i
)'o¡¡
l'uppofe que f!OUS
l'avons yue en etfcr, on ne
p eut manquer d' y a¡ourer foi; le témoignage des
fi¡u
efl d011i: par cer endroit une premiere yériré ,
puif~
qu'Jlors
il
rieur lieu de
prem ie~
prinoipe., fans r¡u'on
r emonte , ou <¡u'on penfe vouloir remoncer plus haur:
c'efl de quoi rous conviennenr unanimement . D 'un
autre coté, rous conviepnent auffi que ·les
{e11s
fonr
trompeurs;
&
l'expérience ne permet pas (l•en dou–
ter . Cependant
f¡
nous fommes ccrt-ains dtune chofe
des.laque. r¡ous l'avons vqe, ·COIJl"1ent
le
¡¡,,
de ·la
vue peur-11 nous rrompcr;
&
s'il
peu~
nou• tro!J1per,
cOJ?menr
CQmm~s-nqus certain~ c!'un~
cno[e
pour l'a–
VOI[
vue?
L1
réponr~
qrdinaire
i
c~rre
difficulté, c'efl que
oorre vue
~
nos
fl'M
nous peuyent rron1rer, quand
ils nc font pas
~xercé~
avee
le~
conditiops rcqu:les;
f.woir
qn~
l'qrgane foit bien difpofé,
&
que l'obje¡
foit d1ns une
jull~ djll~nce .
Mais ce n'efl r-ien dire
1~
1
~n
_etfet'
a
quoi _terr de marquer pour
d~~
regles qUJ
¡ufl1fient le
¡~m01gnagc
de nos
fins,
des
cot~ditio,ns
que nous ne laur¡ons nous-memes ¿ufliijer, pour
l~<
·yoir quaqq
~l!es
fe reqconcrenr ¡ <.¿uelle regl e infail"
lible me donpe-t·On pour juger que l'organl'- de ma
vue, de ¡non ouj'e, de mon. odorat, efl
:¡~ueiJement
hien cjifpofé? Nos organes nc nous do11n,epr vne ccr–
titude parfaire que quand ils font
p~r.f~irement
for-
. més;. m1is
ps
r¡~
le font que pour
de~
ce111péramens
parfaJtS ;
~ coa¡n.1~ ceu~· Ci
font tre\ct:arcs, il s'en–
fu it qu'1l
111~fl pr~fque
aucun de nos o.rganes qui nc
foit
défeéh!~Ux
par quelque endroit.
-
·
S
E N
2.1
Cep:ndant quelquc évidenre que cerre conclu!ion
paro11le, elle ne détruit poinr une aurre vérité , fa–
voJr que J'on ell cerrain de
ce
que l'on voir . Cerre
concrariété mormc qu'on a laille ici quelque chole
a
dém~ler,
puifqu'une maxime fenfée ne lauroir
trn:
conr.raire
a
':me maxime _fenfée. Pour développer la
chofe,
ex;~mmons
en quo1 nos
fillt
ne fonr point re•
gle
de véri té,
&
en quoi ils lft font.
r
0 •
Nos feos oe nous
;~pprennent'
point en quoi
co~fifl.e
ccrce .difpofirion des c?rps
appell~e .qt~Dbf;,
qUJ fa1t tclle 1mpreffion fur 11101. J'apperso¡s évidem–
mem qu'il fe rrouve daos un rcl cGrps une <Jifpofi.
rion qui caufe .en moi
le
fen.timenr de chaleur
&
.de
pefanreur; mais certe difp(}Gtion, <.lans ce qu'elle.efl
en
elle-ro~
me , échappe ordin aireme11t
a
mes
fi1Js,
&
lon11enr
m~mc
a
m a raifon . J 'enrrevois l¡U':!Vec
cercain arrangement
&
cer.rain mo.uvemem dans
les
plus pecices parries de ce corps, il fe .trouv.e de
i:t
coovena
0
ce entre ce corps
13;.
l'impreffion qu'i l fait
fur moi. Ainti
je
cnnje2ure <¡ue la
faculr~
qu'a le
[o–
leil d'exciter en moi un fentim cnr de lumiere, con–
fille dans ccrrain mouvement ou impulfion de pctirs
corps au-rravers des pores de l'air ·vers la rérine
.de
mon ccil.; mais c'efl ccrre faculté
r~me,
oil
mes
yeux
ne voyent gourre,
&
oil
ma
railon ne voit guere
_,h.
vantage
~
2°.
Les
flllt
oe nous rendcnr aucur¡ témGignagc
d'un non¡bre infini de difpofirians
m~;ne
ancér1eúres
c¡ui fe rrouvenc dans
les ohjcrs ,
&
qui furpa!lent la
lagacicé de notre vue, de notre ou1e , de
notr~
o do.
rar. La chafe fe vérifie manifeflemenr par les micro(.
copes; ils nGus onr
f~ ic
décou11rir daus l'objer de la
vue une infiniré de di!'pofirions exrérieures, qui mar–
quent une égale ditférence daos les parcies inrérieu–
res,
&
qui form rnr autam de dilfértnres qualirés.
D es microfco!)es plus parfairs nous feroienr décou–
vrir d'autres dil'po!itions , dom nous n'avons ni
la
perception ni l'idée.
3•.
Les
jCIJ!
ne nous <lpprennent poinr l'impreffion
précife qui le fair par leur can1l el) d'autres hommes
que nous . Ces etfcrs dépendcnt de la d1fpoGrion de
nos
org-~nes,
laquelle efl
~-pcu-pres
aulli ditférenre
ddns
les
hommes que leurs cempéramens on leurs vi–
fa"es ; une m<!me qualicé exréricure !loit faire auf!i
dJJférenres impreflions de fenlation
en
dilférens 11om–
mes: c'efl ce que l'on voit rous les jours.
LJ
mt!me
liqueur caufe daos moi
un~
fcnliaion defagréable,
&
dans u11e autre une feniarion agréable
¡
te
ne
puis
done m'afrurer que tel corps
üO'e
pr~c,férr¡enr
(ur
rour autr.c que moi, l'imprellion qu'il fa ir lur rr¡oi.
m~
me . J e ne puis favoir
a
u
!Ti
fi
ce qui efl couleur
blanche pour mo.i, n'efl poinr du
rqu~e po~r
pn au–
rre que p0ur mol .
4
°.
!,:1 raifon
&
l'expérience
nou~
apprenanc que
les corps lonr dans un mouvemenr ¡¡u changemenc
co:1rinuel, quoique fouvenr
impercepcihl~ ~~ns
kuns
plus perites parries' nous ne pouvons
jyg~r
snrement
qu'un corps d'un jou r
a
l'autre ai r
précj(en¡~n¡
la
m"!me qualicé, ou la
m~me
dilj>ofirion
~ f~ir-e
l'im–
preffiQ~
qu'il failoi¡ auparavanr lur qous ; de
{o~ ~6-
té
il
lui arrive de l'altér:trion, 6¡
il
m'eQ arrive du
mien. Je pourrai bien rn'appercevoir du clungemenc
d'impreflion' mais de
f~voir
a
quni il fa u¡
l'a¡¡rjbu~r.
fi c'efl
a
l'ol>j
ct ou ii mui, c'efl ce que je ne
pui~
f4i·
re par le feul
rémoignage.de l'urgane de mes
fi'IS' .
s9.
11¡ous ne pquvons ¡uger par les
fl11t
¡¡i de la
grandeur abfolue des corps, ni de leur mouvement
a~folu
.
L~
raitQq en l!fl bien cJ¡ire . Con1me
no~
yeux
ne fonr poinr difpofés
d'
la
m~rne fa~on,
nous ne de–
yons
p~s
avoir la
m~me
idée fcnfibll! de
!'~~~n<luc
.d'un corps . Nous devons con!idérer que nos yeux ne
(ont
que des lunerres
n~Nr~lles,
que leurs. h,um.e-u_rs
funr le
m~
me e$!t
qu~
les verres dans les lu11e¡ces,
&
que telon la firuario11
~u'ilvgardent
entr'eux,
~
fe–
lo!\ la
~gure
du
cry~~llm ~
de fon éloignemenr de
la ré¡ine , nous voyons les obj ers Jilféremmen.t ; de
CoFre qu'on ne peut pas
~{\11rer
qu' il y'ait au fi\Onde
de4~
hornmes qui les
vo.yen~ précifénwn~
de
la
m~-
11\C
gran,deur , ou compofés <te femb\abii!S p,artics,
puifqu'or¡ ne peut NS all"urer- que leurs yeux foieuc
tou¡A-fait femb,la
bles. Une
con féqll~nce
aurli naru–
relle, c'ell que n,
o.usne pouvnns cnnnolrre la grau–
deur vérirable ou
abfnlu'"' ges
mouv~m.~ns
du corps,
mais fe\),lem.e[l t le
rappo.rr que ces mouverneus ont
les uns avec les aqtres ..
lle(\ conflanr que nou¡ ne
faurions iuger de la gra,\J,t;_ur d'un mouvem"nt d' un
corps que par la longueur de l'cfpace que ce meme
corps
a
parcouru • Ainfi puifque nos yeux ne nous
fonr