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MEMOIRES
SUR LES INCAS ET SUR LES LANGUES AYI\tARA-QUICHUA
(t).
Depuis la découverte de 1' Amérique, dont on a voulu en vain dans ces der–
niers temps dis'puter la gloire a Colomb, I'Europe n'a pas
cess~
de s'occuper de
ce pays, dont l'existence se líe cbaque
jour~davantage
asa propre destinée.
1\lais de toutes les contrées américaines, ce sont les premieres conquetes des
Espagnols , le Mexique et le Pérou, qui ont en pendant longtemps le privilége
de fixer l'atte)ltion des savants et des historiens. Cette.préférence s'explique
facilement ct par )'existence dans ce pays d'une ¡nasse énorme de richesses de
toute espece, qui ont attiré l'avidité des Européens, et par la civilisatiou
. avancéequ'on y trouva a l'époque de la découverte.
C'est a cetre époque memorable que le dernier des Incas, assassiné d'une
maniere cruellc par un aventuriet· espagnol, mit fin a la dynastie qui régnait
sur le Pérou.
Notre collegue
i\1.
V. Pazos, né dans ce pa-ys et consul général de Bolivie
a
Londres, a mis sous nos yeux un tablean apporté de Cuzco en Europe, tablean
qui représente les traits .originaux de tous les souverains incas depuis la fonda–
tion de cette dynastie. Ce tableau a été peint
a
l'huile, sur une toile a-yant trois
pieds de haut etquatrede large, par un natore! do pa-ys, d'apres des bustes en ten·e
cuite qui avaient été conservés
("2).
Les quinze ·portraits renfermésdans ce cadre
sont d'un dessinrcmarquable, d'un coloris fin, vif et naturel. Aú has dechacou on
lit le nomduroi qu'il représente et celui de la reine
(Ccoya)
son épouse. D'apres
ce documcnt curieux, ces princes auraient vécu de cent vingt
a
cent cinquante–
cinq ans, age indiqué d'apres les anuales du pays. Ces annales ou
quipos
n'étaient
autre chose que descordons dont les couleurs et lés nreuds, entremelés de mille
manieres di.ffércntes, rern plaqaient l'écriture et transmeuaiept
a.
la postérité le
souvenir des e;rands événements. 11 est inutile de dire que le peintre se trompe
lorsqu'il place le deuxiéme roi de la dynastie des Incas
a
l'époque de la naissance
de Jésus-Christ, tandis queJe dernicr prince de cette famille a été décapité pat·
les Espagnols en 1533. Les deux premicrs seulernent sont peints en pied. C'est .
d'ahord, agauche du tableau, une f'emme jeune, vetue d'une ·robe bleue et d'un
(•l)
G:.~rcilasso
de la Vega, l'hislol'ien le plus véridique du pays ; les publications de
~J.
Ter–
naux-Com¡)aus
¡
du
s~\'ant
i\1.
tfOrbigny ; de M. Lacroix, et surtout les rensrignemeuts de
l\1.
Pozos·Canqui, nous ont
scn·i
de guidcs dans la rédaction de ce MémiJire.
{2)
Les E..pugnol!l, en
tffa~;ant
autanl qu'il leurfut
po~sible
les souvenirs nationaux, ne réussi–
rent
p\IS
a clétruirc les affcctions du pcupl<'. Les bustes en tcrrc cuitc de leurs rois furcot soigneu–
semC'nt <:ntern..
~
par les Quichuas
a
l'époc¡~c
de la.
conquetc,
et ils ne furcut remis au jour qu'u
•
pt·~s
l'indé¡wndilnCl'.