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DE LA BONITE .
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long rivage; les plus favorisés des voyageurs qu 'elle
emmenait
a
travers les mers avaient eu a peine le temps
d'entrevoir le pays, ses habitants et ses richesses natu–
relles. Quant a
l'
équipage, il avait du se contenter, la
plupart du temps, de voir la terre de loin sans y poser le
pied: c'est le sort habituel du marin. Et pourtant, chez
le plus grand nombre, le plaisir d 'aller visiter des con–
trées nouvelles ne laissait aucune place au regret de
partir sans avoir mieux vu celles qu'on abandonnait.
Leur pensée n'était plus aux plages américaines qu'ils
apercevaient encore a l'horizon; elle était tout entiere
aux iles Sandwich vers
lesquell<~s
tendait maintenant
leur voyage. Pareils au jeune homme ardent et insou–
cieux qui se lance joyeux dans la vie, ils ne portaient
point en arriere- leurs regards toujours fixés sur !'ave–
nir ; car pour l'esprit jeune dans la science, co!Dme pour
l'homme jeune dans la vie, il n 'y a point de passé.
Celui qui a beaucoup vécu est dans de tout autres
dispositions : l'avenir ne lui appa.rtient pas; il aime a
jouir du présent, a récapituler les ans écoulés ; le vieil–
lard, dit-on, vit de souvenirs. De meme celui que de
longues études ont habitué
a
la réflexion ne quitte pas
sans peine un travail ébauché pour courir apres des
idées nouvelles; il aime a lier ses observations d'aujour–
d 'hui aux connaissances qu 'il avait déja; il cherche l'en–
chainement des faits , les conséquences des données
acquises ; il ne se contente pas de remarquer en passant
un phénomene dans l'ord re physique ou dans l' ordre