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CLA

(le

bien

faiíir la penfée précife de l'auteur, eíl: dans

fon difcours un défaut eífentiel centre la

clarté.

Diverfes caufes nuifent a la

clareé

du difcours;

r

0

le fu jet m"me qui fouvent efr hors de la portée des

leél:eurs'

&

qui' pour etre bien entendu' fuppofe

chez ceux a qui on l'adreíle , des connoilfances pré–

liminaires qui leur manquenr abfolument. Ainfi des

ouvrages de philofophie font obfcurs pour ceux qui

n'ont pas étudié les príncipes de cene vaíl:e fcience;

&

cependant

il

n'efr fouvent pas poffible, dans un

ouvrage qui n'efi pas élémentaire, d'expliquer tout

ce qui n'eft pas familier

a

tout le monde. Se plaindre

de l'obfcurité des difcours de cette efpece, c'efi fou–

vent fe plaindre de fa propre ignorance.

2

°:

L'emploi des termes de l'art, des expreffions

fcientifiques, font fouvent auffi une fource d'obfcu–

rité' meme pour des leél:eurs intelligens qui auroient

été tres-capables de comprendre le fens de chaque

penfée, &d'en fentirla vériré, fi l'auteur s'étoit fervi

<les termes communs

&

des expreffions ordinaires.

C'eft fouventune affeB:ation déplacée chez certains

auteurs, que l'ufage des termes d'art & d'expref–

fions fcientifiques, auxquelles ils pouvoient aifément

fub.frituer des termes & des

expreffio~s

d'ufage ordi–

naire, que chaque leél:eur un peu éclairé & qui fait

:fa lancrue, comprend·aifément. Souvent c'efr un jeu

<le la

~barlatannerie

des lettrés , ou. des artiftes, que'

l'emploi de ces termes barbares & étrangers, aux–

quels rép

ondent pa

rfaitement des mots communs, &

auxquels

peuve.nt

fupplée¡; des phrafes ordinaires-.

3

°.

La tr0p grande briéveté

e.fr

fou vent un obfra–

-cle

a

la

clarté.

Quelquefois un

aute

ur familia rifé avec

u.n fu jet qu'il étudie depuis long-tems, veut épar–

gner

du

tems & de la peine, prévenir l'ennui qu'ínf–

pirent les détails néceifaires

a

l'intelligence d'un fu–

jet'

a

une perfonne qui les fait trop bien; il fuppofe

que ces détails, ces idées intermédiaires qui lient le

príncipe

a

la conféquence' font auffi familiers

a

fes

•]eél:eurs qu'a lui-meme,

&

fur ce prétexte , il fe

difpenfe de les donner,

&

le lééteur qui n'e voit pas

la liaifon des idées, ne comprend plus ce qu'illir. Les

hommes profondément favans' font fujets

a

etre obf–

curs dans leurs difcours par cette raifon. Cependant

celui qui veut inilruire, devroit fe fouvenir que lui–

rneme au commencement' n'efr paífé d'une idée

a

·une autre éloignée, qu'en faifiíl'ant le fil des idées

rnoyen

nes

quien forment la liaifon . Abréger un dif–

cours

,

e.fr

ordinairement retrancher ces détails, ces

jdé.es moy

ennes, ces liaifons inutiles aux gens fort

intelli

gens, mais eírentícllement néceffaires anx lec–

teurs ordinaires. En forte que fouvent abréger, c'efr

<liminuer la

clarté

d'un difcours.

4°.

Le défaut de méthode efi une autre fource

d'

obfcurité dans le ditcours. Ne pas offrir les idées

dans leur rapport réel, dans leur vraie dépendance,

c'efi prefque toujours jetter de la confufion dans

l'efprit,

&

rendre impoffible l'intelligence de ce

qu'on dit.

_

5f'· Le défaut de

clané

du difcours vient fouvent

du défaut de

clarté

dans les conceptions,

&

de dif–

tinB:ion dans les idées de celui qui parle.

ll

eil: bien

rare que celui qui con<;o'it. bien ce qu'il veut dire ,

qui comprend bien ce qu'il doit exprimer , qui en a

une id

é'e ne

tte' ne l'offre pas de meme' quand il en

fait le

fuj.et

de fon difcours.

6°. Le défaut de fiyle produit ordinairement un

défaut de

clarté

dans le difcours. Des tranfpofitions

défav.ouées par la nature de la langue, des phrafes

trop longltes, des parenthefes infér ' es mal-a-pro pos,

ou trop confidérables, qui interrompent la peinture

de la penfée, des termes relatifs trop peu caraétéri–

fés ou mal placés, ·l'ignorance de la propri 'té des

termes, en un mor , toute faute contre les regles

CLA

453

de la la11gue, expofe le difcours au danget d'etre

obfcur.

7.cr

. Le trop grand defir de montrer de l'efprit,

ei!

fi

fou

vent une fource d'obfcurité, que l'on feroit

tenré de dire

a

tout écrivain qui prend la plume : ou–

hliez que vous pouvez avoir de l'efprir, pour ne

vous fouvenir que de la néceffité d'avoir beaucoup

de bon fens, & de l'obligation Oll

VOUS

etes de

VOUS

faire bien comprendre. Ce deúr démontré de

1'

efprit

produit l'affeélation du fiyle , l'emploi des termes

figurés & des expreffions recherchées

&

non naru–

relles ,

qui

font prendre la penfée d'un auteur dans

un tour autre fens que celui qu'il avoit

en

vue.

La premiere qnalité de tour difcours, c'eft d'etre

clair;

la

feconde, c'efi d' "tre vrai. (

G. M.)

CLASSlQUE

e

AUTEUR)'

.Art de La parole.

On

nomme

auteurs cla.fliques

ceux qui peuvent fervir de

modele

p~r

la

beauté.

&

l'exceHence du fiyle. Tout

a~teur

qur. pen,fe f?hdement

~

qui fait

.s'

xprimer

~une,

mamere a plan-e aux

pe~fonnes

de gofn, appar..

tlent a cette claífe : on ne d01t chercher des

auteurs

cla.fliques

que chez les nations Ottla raifon efr parv:e–

nue a un haut dégré de culture, on la vie fociale

&

le commerce des hommes ont porté l'enténdement

&

le bon goflt fort au-deffus des fens groffiers : ce

n'efi que

la

que les hommes commencent

a

trouver

du plaifir dans des objets inte!Ieétuels

&

dans des fen–

timens délicats ; alors ceux qu} font doués d'un juge–

ment & d'un goftt plus

exquis,~e

trouvent encouragés

a

confidérer avec plus d'attention des objets qui ne

tiennent pas immédiatement auxfens ;its découvrent

des rapp9rts plus déliés, que

~e

vulgaire n'appen;oit

pas : un nouveau champ de plaifirs pour la fociété

fe préfente a leurs,regards' & l'infinie variété des

objets rend cette fource inépuifable: le monde intel–

leétuel, les penfées, les fentimens , forment pour

eux une nolwelle nature, un autre univers fécond

en événemens intéreífans, en heureufes combinai–

fon~,

en

vnes riantes.,

& .

incomparablement plus

riche .en plaifirs que la natu

re

grofliere

gni

n'agit que

fur les fens extérieurs: celui qui a trouvé les avenucs

de ce monde invifible, porte avec foi tour"Ce qn'il

faut pour une (;:Onvedation agréable

&

des récréa–

tions honnetes; il développe dans le commerce de la

vie plufieurs fcenes de ce monde-la:

il

s'atrire l'at–

tention,

·&un

goftt plus délicat commence

a

fe ré–

pandre de tous cótés; on apprend

a

efiimer des cho–

fes que jufqu'alors on n'avoit pas meme apper<;ues.

On regarde ceux qui ont d 'cou vert ces nouvelles

fources de ·plaifirs honnetes

~

comme les bienfaiteurs

refpeB:ables de la fociété; l'honneur qu'on leur rend,

redouble leurs efforts ; ils font de no

u

velles obfer–

vations fur le monde moral,'

&

apportent tous le\lrS

{oins

a

communiquer leurs recherches aux a

u

tres, de

la maniere la plus parfaite: le bon ton, la raifon, le

goftt s'iQtroduifent dans les fociétés choifies: les au–

t eurs commencent

a

paroitre, &leurs ouvrages

de–

viennenr

cLa.fJiques

pour la pofrérité, paree qu'ils font

puifés dans la nature meme' dans la fource inaltéra–

ble du beau & du bon.

On efi tenté de croire que l'homme n'a re<;n qu'un

dégré déterminé de fagacité , pour pénétrer dans la

narure des obj ets moraux, qu'il ne {auroit aller plus

loin , & que clans chaque nation les meilleures tetes

ont atteint ce dégré-la. Nous voyons du mojns que

les écrits des hommes de génie de tous les fiecles

&

de tomes les nations, plai(ent par-tout Otl la raifon

efi déja parvenue a-peu-pres

a

ce dernier déoré de

culture : ce font-la les vrais

auteurs

cla.flique~

pour

toutes les nations de la terre.

Mais chez un peuple dont la raifon n

'e.fr

pas en–

cere culrivée au plus haut point, le t

neill

eur au–

teur qui s'y f01·mera , fera applaudi, plaira, de–

viendra célebre parmi fes contemporains ,

~