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CAL
~accwitiemens;
fi
la mort ne l'eCtt enlevé
apres
un
-regne de deux ans
&
quelques mois.
Ornar, dé.figné fon fucceífeur,
témo.ign~
d'abord
avoir de la répugnance pour une dignité que fon
ambirion dévoroit en fecret; il panlt ne fe rendre
qu'aux vceux unanimes de rarmée qui le proclame
empereur ou commandant des fideles, titre qu'il prit
&
qu'il tranfmit
a
fes fucceífeurs. Des qu'il eur le
front ceint du diademe, il fe fit une grande m 'ta–
morphofe dans fes mceurs. Jufgu'alors il
n'avo~t
reí–
piré que les cod1bats
&
le fang: fon caraétete féroce
s'adoucit,
&
au lieu
de
s'armer de l'épée, il fe con–
facra tout entier aux fonétions pacifiques de l'autel ;
mais toujours animé de l'efprit de Mahomet , il fe
fent également
~mbrafé
de l'ambition des conquetes.
Daos ce fiecle de gnerre, il s' 'toit formé des capi–
taines qui avoient fubfiitué une difcipline régnliere
aux mouvemens tumultueux d'une milice qui juf–
qu'alors n'avoit eu que
dt~ c~urage. <?m~r n~et
a
la
t ete de fes armées des generaux m aimo1ent la
guerre
&
qu~
favoien.t la faire,
&
dont les projets
bien concertes affurOient le fucces. Ce fut contre les
Perfes que les Mufulmans tournerent leHrs armes.
Ils s'avancent vers l'Euphrate pou'f déloger l'ennemi
des pofies qu'it occupoit. Arrivé devant Cadeíie,
vilte íituée
a
l'extrémiré des d ' ferrs de l'Irax, ils
y
livrent une bataille mémorable oit trente mille Per–
fans refient fur la place. Ceue bataille que les Muful–
mans comparent
a
celle d'Arbelle, fur vivement dif–
p 1t 'e : la capitale
&
la plupart des provinces de Perfe
fubirent la loi du vainqueur. L'Alcoran fut placé fur
l'aütel
oi1
bruloit le teu facré des mages; les forte–
reífes fnrent démolies : le mceurs amigues eífuye·
rent une révolution rapide,
&
des barbares diéterent
des loix fur le trone des dominateurs de l'Afie.
Une atltre armée de Muíldmans attaque les Ro·
mains jufque dans le centre de leur empire. Kaleb,
grand capitaine
&
Mufulman fanatique , les ren–
contre en re Tripoli
&
Harran,
i1
anime fes foldats
en leur difant: " Ne redoutez rien, le Paradis eíl:
~'
fous
1
ombre de vos épées
»
!
Ils engagent une
aétion
&
ils font vainqucwrs; le bnún fut immenfe,
chaque fol4at n'eut plus de mifere
a
craindre pour
le refie de fa vie. Ce fut la qu'on vit éclater ce zele
fanatiq~te,
gui faifoit connoitre que J>efprit de Maho–
met pr 'íidoit ·encore au milieu d'eux. On fut que
plufieurs foldpts avoient ttanfgreífé la défenfe de
boire du vin ; on pronon<;a une peine de quatre–
vingts coups de baton contre les prévaricateurs: le
général' qui ne pouvoit exécuter fon arret' paree
qu'il ne connoiífoit pas les coupables,les invita
a
faire
un aveu de leur fa ute: ces fanatiques, aífurés d'etre
punis furent leurs propres accufateurs,
&
fe foumi–
rent fans murmurer
a
un
ch~itiment
qui expioit leur
faute. Emefe
&
pluíieurs atttres villes confidé rables
ne prévinrent leur ruine que par une prompte foumif–
fion: les unes furent livrées par des traitres
~
d'autres
payerent des fommes auffi confidérables que íi elles
euífent été abandonnées
a
l'avarice cruelle du foldat,
apres un aífaut. Le nouvel empire ,.élevé fur les dé–
bris cle ceux des Perfes
&
des Romains , prenoit
chaque jour de nouveaux accroiífemens. Mais tant
de viétoires ne font point connoitre le
calife
qui
ne triomphoit que par fes lieutenans. C'eíl: daos les
détails de fa vie privée qu'il faut defcendre , pour
<.lévélopperfon caraétere. Sa tempérancefut un jeCtne
févere
&
perpétuel; il ne fe nourriífoit que de pain
d'orge' oü il meloit un peu de fel'
&
fouvent il fe
privoit de .cet aífaifovnement , pour ne pas trop ac–
corder
a
fes feos. Les pauvres
&
les grands étoient
admis indifiinél:ement
~
fa table , qui étoit une école
de frugalité, dont les rigides Spartiates auroiem ad–
miré la fimplicité; mais il étoit glorieux de rnanger
:avec
1.10
pontife roi. Ses habits étoient fales
&
dé-
CAL
12
chiré:S ,
&
la rnultitude en
ramaífo~t
des lambeau -
qu'elle révéroit comme de précieufes reliques ;
&
quoique couvert de haillons dégofaans , il étoit
. plus refpeél:é que les rois vetus de la pourpre.
u
pouífa fon amour pour la jufiice jufqu'a la dureté
~
les riéheífes
&
les dignirés n'étoient poiot un titre
d'impunité. Juge incorruptible , il frappoit de la
meme verge l'oppreífeur
&
le foible coupab!e. Fi–
dele
obfer~ateur
des traités, il puniífoit íes lieute...
naos convaincus d'avoir
iolé la fainteté de leurs
fermens. Les habitans de Jérufalem ne
oulurent re–
cevoir les articles de leur capitularion que de fes
mains, tant ils avoíent de confiance daos fa bonn.e foi
11
s'y rendir,
&
perfonne n'eut
a
fe plaindre. On fut
étonné de voir le chef d'un peuple de conquérans
fans aucun attribut di.fiinétif. Sa parure eflt été re- ·
hutante daos un homme d'une condition la plus ab–
jeéte ; on eOt dit
q~il
eftt vonlu ériger la mal-pro–
preté en vertu. Quoiqu'il fftt humain
&
populaire,
il exigeoit une obéiífance fdns r ' plique. Inacceffible
a
la crain_te
&
a
la défiance , il ne pouvoit
S
Íma•
giner qu'il eut des ennemis'
&
qu'il pftt s'élever des
r
' qelles.
Saos
1
'gions daos Medioe il diétoit des or–
dres a fes généraux gu'il
defiituoit
a
fon gré ' quoi–
qu'ils fuífent
a
la t''te des
armé.esdont ils étoient les
idoles. Ils fe foumettoien
t fans murmure aux capri–
ces de ·Ieur mairre ;
&
faifanr coniifier leur gloire
daos l'obéiífance; ils devenoient les lieutenans ref–
peétueux de leurs fucceífeurs. Sa taille haute, fon
teint brun, fa tete chauve, fon maintien auíl:ere;.
fa décence grave
&
réfervée infpiroient plus de ref–
peél: que d'arnour ; mais s'il fut craint, il ne fut ja–
mais ha!. Obfervateur fcrupuleux des cérémonies
les plus minutieufes de fa religion , il eut cette piété
crédule
&
bornée, qui daos un homme obfcur
&
privé , eft un frein contre la licence des penchans,
&
qui dans l'homme public, annonce !'incapacité de
gouverner. ll fit neuf fois le pélérinage de la Meq11e
pendant fon regne qui fut de dix ans; quoique fan3
éloquence de íl:yle, il éto it véhément
&
pathétique ;
&
comme il paroiífoit pénétré des maximes qu'il
annonqoit, illes iníinuoit fans effort; auffi fe livra–
t-il
a
la manie de precher;
&
tandis qu'il vivoit obf–
cur
a
l'ombre de l'autel 'fes lieutenans par-tout vic–
torieux, formerent le plus grand empire du mon–
de; le Tigre, le Nil
&
l'Euphrate coulerent fotts
fes loix. Les rivages du J
Otll
dain furent foulés par
des vaingueurs barbares, qui enleverent aux Juifs
&
aux Chrétiens le berc au de leur foi. Enfin, la
Palefi
, l'Egypte, le Korozan, la Perfe, l'Armé–
nie
~
&
pluíieurs vafies régions de l'Afrique, ne
furent plus que des provinces de l'empire Muful.:.
man. Ainíi , quoiqu'il n'ef1t que du zele fans lumiere
&
fans talent, fon regne ne fut qu'une
continnit~
de triomphes
&
de profpérités. La fuperfiition étoit
alors une épidémie nationale ,
&
plus il ét6it bot:_.né,
plus il fe rapprochoit de ceux
a
qui il aVOÍt
a
COffi-'–
mander. Un vérirablement grand
homme
eftt
échoué,
&
il r 'uffit, Ce
ealife
ignorant ,
&
ennemi
de tout ce qui pou voit l'éclairer, fit réduire en 'en–
dre la bibliotheque d'Alexandrie , monument de la
magnificence des Ptolomées qui avoient raífem-.
blé '
a
grands frais ' daos cet augufie fanél:uaire'
le plus riches produétiohs du génie ;
&
pour auto–
rifer cet anatheme contre les progres de la raifon,
il dit: (<Si les livres dont cette bibliotheque eft com–
pofée renferment les vérités déja contenues dans
l'Alcorao, ¡¡e font des
Ít
erfluités dont il faut fe d '–
barraífer:
'ils en combattent les maximes, ce font
des fources d'erreurs qu'il faut tarir ' pour arreter
la contagion
».Ses
viétoires ne purent le garantir des
coups d'un furieux, qui mécontent d'un jugement
rendu conrre lni, le frappa de trois coups de
poi ~
gnards daos la Mofquée, lorfqu il faifoit
la
pri~re