Table of Contents Table of Contents
Previous Page  480 / 970 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 480 / 970 Next Page
Page Background

4

68

S P 1

de cette géoéralité,

d,emando,ns-l~ur

ce qu'as

p~n(ent

des mirades rapportes dans 1Ecrlture. Ils en meront

abíolument tout ce qu'ils n'en pourront pas attribuer

a quelque tour de fOllplelfe. Laiffons-leur paírer le

front d'airain qu'il faut avoir pour s'infcrire en faux

contre des faits de cette nature, attaquons-les par

leurs príncipes. Ne dites-vous pas que la puiífance

de la nature efi inhnie?

&

la feroit-elle s'il n'y avoit

rien dans l'univers qui pllt redonner la vie a un hom–

me mort? la feroit-elle s'il n'y avoit qu'un feul moyen

de former des hommes , celui de la géóération ordi–

naire? Ne dites pas que la connoiffance de la nature

efi inhoie. Vpus niez cet entendement divin,

ou,

feIon nous, la connoiffance de tous les etres poffibles

efi rtÍunie ; mais en difperfant la connoiífance, vous

ne niez point fon infinité. Vous devez. done dire que

la natllre coon0it toutes chofes, a-peu-pres comme

1l0US

difons que l'homme entend toutes les langues.

Un feul homme oe les entend pas toutes , mais les uns

entendent celle-ci & les autres celle-Ia. Pouvez,volls

nier que l'univers ne contienne ríen qlli connoiífe la

confiruétion de notre corps? Si cela étoit, vous tom–

beriez en contradiétion , vous ne reconnqitriez plus

que la corinoiffitnce de Dieu

f('¡t

partagée en une in:

finité de manieres : l'artifice de nos organes ne 1m

fero~t

point connu. Avouez

~onc

, íi vous

v~~I~ez

raifonner

con(équemmen~

, qu 11 y a quelqlle modi/i–

cation qui le connolt ; avouez qu'il efi

tr~s-poffible

.

él

la nature de reífufciter

un

mort,

&

que votre l113itre

confondoit l\li-meme fes idées , ignoroit les fuites de

ron principe 10l'fqu'il difoit, que s'il eut pú fe perfua–

der la réfurreétion du Lazare, il auroit brifé en pieces

tout fon fyfieme, iI auroitembraíle fans répugnance

la foi ordinaire des Chrétiens. Cela fuffit pour prou–

ver

a

ces gens-la qu'ils démentent leurs hypothefes

lorfqu'ils nient la poffibilité des mirades, je veux

dire, afin d'oter tollte équivoque, la poffibilité des

événemens racontés daos l'Ecritnre.

Plúíieurs perConnes ont prétendu que

M.

Bayle n'a–

voit núllement compris la do6l:rine de

Spinoja

,

ce

qui doit paroltrebien étrange d'un efprit auffi'fubtil

&

auffi pé!'létrant. M. Bayle a prouvé,mais aux dépens

de ce fyfieme , qu'ill'avoit parfaitement compris. 11

lui a porté de nouveaux coups que n'ont pu parer les

JPinoj¡}les.

Voici comme il raifonne.

J'attrib~le

él

Spi–

noJa

d'avoir enfeigné,

10.

qu'il n'ya qu'une fub,fiance

daos l'univers ;

2

0

que cette fubfiance eH Dieu; 3

o.

que tous les etres particuliers , le foleil , la lune , les

plantes, les betes, les hommes, leurs

mouv~mens

,

leurs ídées, leurs imag,iaations, leurs deúrs, font des

modifications -de Dieu. Je demande préfentement aux

(pinofifies , votte maítre a-t-il enfeigné cela, ou ne

l'a-t-il pas enfeigné? S'iI.I'a enfeigné, on ne peut point

dire que mes objeétions aient le cléfaut qu'on nomme

ignoratio elenchi,

ignorance de l'état de la queítion.

Car elles fuppofent que telle a

été

fa doétríne ,

&

ne

l'attá~ent

que fur ce pié-la. Je fuis done hors d'affaire ,

~

.1

'on.Te

,trompe.

tOl!t~S

les foís 9ue Fon débite que

J

al refute ce que Je n al pas cQmpns. SI vous dites que

SpinoJa

n'a point

enfe~g\flé

les trois doétrines ci-deífus

articulées , je vous dema-nde; pourqlwi donc s'ex–

primoit-il comme ceux qui auroient eu la plus forte

paffion de perfuader au leéteur qu'ils eníeignoient

. ces trois chofes ?Efi-il beau

&

louable de fe fervir du

ftyle commun, fans attacher aux paroles les mell1es

idées que les autres hommes , & fans avertir du feos

nouveau auquel on les prend? Mais pour difcuter

un peu ceci, cherchons

011

peut etre la méprife. Ce

lJ'efi pas

a

l'égard du mot

JubJlance

que je me ferois

ufé,- carje n'ai point combattu le fentimellt de

Spi–

nofa

fur ce poiat-Ia, je lui-ai laiífé paífer ce qu'il {up–

pofe que pOlir mériterle noro c;le fubfiance il faut etre

i,ndépendant de :oute.caufe, ou exifier par

íoi.m~~e

4fternelli ment nece;{f

<ij.remeat.Je

nepenfe pas que1 'ale

s

P

1

pÚ m'af)Ufer en tui imputant de dire , qujil

n'y

a

qt1~

Dieu qui ait la nature de fllbftance. S'il y avoit done

de l'abus dans mes objeétiofls , il coníiíl:eroit unique–

ment en ce que j'aurois entendu par

modalités

,

mo–

dijieations, modes,

ce que

Spinofa

n'a point vou–

In íignifier par ces mots-la, mals encore un coup

íi je m'y étois abufé , ce·feroit fa faute. J'ai pris ce;

termes comme on les a toujours entendus.. La doc–

trine générale des philofophes eft qüe l'idée d'etre

contient fous foi lmmédiatement deux efpeces; la

fubfiance & 1 'accident, & que la fubílance fubíifie

par elle-meme ,

ens per

fl.

JubJiJlens

,

&

que l'accident

lllbíifie dans un antre',

ens in aLio.

Or fub!iíl:er par

foi, dans leurs idées, c'efi ne dépendre que de quel–

que fuj et d'inhéíion;

&

comme cela convient, felon.

eux , el la matiere, aux anges, a l'ame de l'homme ,il>

admettent deux fortes de fubfiapces, l'une incréée ,

l'atltre créée ,

&

ils fubclivifent en deux efpeces la

fllbfiance créée; l'une de ces deux efpeces eíl: la ma–

tiere , l'autre efi notre ame. Pour ce qui reganle l'ac–

cídent, il dépencl íi eílentiellement de fon flljet d'in–

héíion, qu'il oe '(auroit fubíifrer fans lui; c'efi fon ca–

raétere fpécifique. Defcartes l'a toujours ainíi en–

tendu. Or puirqlle

Spinof a

avoit été grand

carté!ien~

la raifon vellt que 1'on croié qu'il a donné el ces ter–

mes la lememe fens que De[cartes. Si cela eíl:, il n'en–

tend par modificatíon de fubítance qll'une fa<;on d'e–

tre qui a la meme relation a la fubfiance , par la figu–

re, le mOllvement, le repos, la íituatÍ-oo

a

la ma–

tiere,

6·e.

que la

doule.ur

, Faffirmation, l'amour,

&c.

él

l'ame de l'homme : car voila ce que les carté!iens

appellent

modes.

Mais en fuppofant une fois que la

fub11ance efi ce qUl exifie de foi, indépendamment

de toute caufe efllciente , il n'a pas

dire que la ma–

tiere, ni que les hommes fuífent des fubfiances ;

&

pllifque, felon la doétrine commune, il neodivifoít

l'étre qu'en deux e{peces , {avoir en fubfianc e & en

modincatioOl de fubfiance, il a

MI

dire que li!

matiere~

& que l'ame des hommes n'étoient que des moclifica–

tions de fllbfiance , qu'il n'y a qu'une fenle fubfiance

dans

l'uni~ers,

&

que cette fubfiance efi Dieu. II ne

fera p

!lIS

queí'ríon que de favoir s'il fllbdivife en deux

efpeees la modification de fubftance. Én cas qu'ilfe

ferve de cette fubdiviíion ,

&

qu'il veuille que l'une

de ces deux efpeces Coient ce que'les cartéíiens

&

les

alltres philofophes chrétiens

nommerrtfitbJlance

edé" .

&

que l'éllltre e(pece foit ce qu'ils nomment

accident

ou

mode

,

il n'y aura plus qu'une aifpute de mot entre

lui

&

eux ,

&

il'fera tres-airé de ramener

el

l'orth~dox1e tout fon fyíteme,

&

de faire évanouir tOltte–

fa feéte ; car on ne vellt etre fpino!ifie qu'a caure

qu'on croít qu'il a renverfé de fond en comble le fyf–

teme des Chrétiens

&

l'exifience d'un Dieu imma–

tériel

&

~ouvernant

toutes chofes avec une fouYerat–

ne liberte. D'oll nous pouvons concIure en paffant"

que les fpino!ifies

&

leurs adverfaires s'accordent

parfaitement bien dans le fens du mot

modification de

JubJlance.

lIs croient les uns les atitres que

SpinoJa

Qe s'en eíHervi que pour déíignerun etre qui ala me–

me natu-re gue ce que les Cartéíiens appellent

mod,

~

&.

qu'il n'a ]amais entendu par ce mot-Ia un etre qui

eltt les propriétés ?u la nature de ce que nous ap.

.pellons

fubJlan.ee

eréle•

Si 1'0n vent toucher la quefiion au vif, voici com–

me on doit raifonner avec un fpinoíifte. Le vrai

&

le propre caraétere de la modihcation convient-il

él

la matiere par rapport

a

Dieú', ou ne lui convient–

il point? 'Avant de me répondre, attendez que je

vous explique par des exem.ples ce que c'eft que le

caraétere propre de la modification. Ceíl: d'etre

dan~

un fujet de la maniere que le mouvement efi dans

le

cerps

&

la penfée dans l'ame de l'homme. Il ne fuffit

pas pour etre une modificatíon de la fubftance divi–

ne,

de

fub!ifter dans l'immenfité de Dieu, d'en

etre