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D E S E D 1

r

E U R' S.

iij

hommes, Loin de vouloir repandre des

nua~es

fut' une vérité reconnue des Scept'i.,

ques memes lorfqu 'ils ne difputent pas, laillons aux Métaphyftciens, éclairés

le

loin

d'en développer le princifle: e'eft

a

eux

a

déterminer, s'jl eH poffible, quelle gra–

dation obferve notre ame dansce premier pas qu'elle fait hors d'elle-meme, poufsée,

peur ainft dire, & vetenue tout

a

la foís par une foule de perceptions, qui d'un cóté

I'entrainent vers les objets extérieurs,

&

qui de l'autre n'apFartenant proprement

qu'a elle, femblent lui circonfcrire un efpace étroit dont elles ne luí permettent pas

de fortir,

'

De tous les objets qUl llOUS affeétent par leur préfence, notre propre' corps e{l¡

celui dont l'exiítence nous frappe le plus, parce qu'elle nous appartient plus.intime–

mellt: mais

a

peine fentons-nous l'exiftence de notre c<?rps, que nous nons apperct4.

vons de l'attention qu'il exige de llOUS pour écarter les dallgers qui l'ellvirol}nent.

Sujet

a

mille befoins,

&

fenliDle au dernier point a l'aBion d,es corps extérieurs, il

feroit bien-tót détruit, ft le foin de fa confervation ne nous occupoit, Ce n'eít pas

que tous les corps extél'iel'lrs HOUS faffent éprouver de fenfations défagréables; quel,

ques-uns femblent nous dédommager par le plaiftr que leur aélion nous procure,

!Y1ai~

tel eft le malheur de la condition numaine, que la dou1eur eft en nous le fen–

-timent le plus

vif;

le plaiftr nous touche moins qu'elle, & ne fuffit prefque jamais

pOUl' nous en confqler, En vain quelques

Philofo~he~,fout~ndiel~t,

en

retenant leurs

cris au milieu des fouffi'ances, que la douleur n étOlt pOlilt un mal: en vain quel–

ques autres plap"jcnr

le

bonheur fupreme dans la volupté, a laquelle ils ne lailroient

pas de fe refufer par

-la

crainte de fes fuites: tous auroient mieux connu notre na–

'(ure, s'ils s'étoíent contentés de borner

11.

l'exemptiol1 de la douleur le fouverain

bien de la vie prérente, & de convenir que fans pouvoir atteindre a ce fouverain

bieJi, il nous étoit feulement permis d'en approcher plus ou moins,

11.

proponion de

nos foins

&

de non:e vigilance, Des réflexions fi naturelles frapperont infaillible–

meni: tout homme abandollné

a

lui;-meme,

&

libre de"préjugés', foit d'éducation ,

foit d'étude: elles{eront la ü:¡ite de la premiere ímpreffion qu'i! rec(wra des objets;

& 1'011 peut

~es

mettre au nombre de ces premiers mouvemems de l'ame: precieux

pour les vrais fages, & dignes d'etre obfervés par eux, mais négligés ou rejettés par

la Philofophie ordinaire, dont ils démentent prefque toüjours les principes ",

La néceífité de garantir notre propre

cOl~pS

de la douleur & de la deftruBion,.

nous faít exan1Íner f1armi les objefs extérieurs, ceux qui peuvent nous etre utiles

ou nuifibles, pour recherchel' les uns

&

fuir les autres, Mais

11.

peine commenyons

1l0US

a

parcourir ces objets, que nous' découvrons parmi eux un grand nombre d'e–

tres qui nOllS paroiffent entierement femblables

11.

nous, c'€ft-a-dire, dont la forme

eft toute pareille

a

la nótre,

&

qui, autant que nous en pouvons juger au premier

coup d'reil, femblent avoir les memes perceptions que nons: tout nous porte done

a

penfer qu'ils ont auffi les rtlemes befollls que nous éprouvons, & par cons6quent

le meme intérct de les fatisfaire; d'ol! il réiulte que nous devons trouver.beaucoup

d'avantage

11.

nous unir avec eux pour démeler dans la nature ce qui peut nous con–

fervel' ou

n~s

miire, La communication des idées eil le principe & le foútien de

cette union,

~

demande néceffairement l'illvention des fignes; telle eít l'origine de

la formati<?l1 des fociétés avec laquelle les langues ont dü naltre .

:

Ce commerce que tam

de

tnot1f<

puiffans

nous

engagent a former avee les autres

hommes, augmente bien-tót l'étendue de nos idées,

&

nous en fah naitre de tres..,

nouvelIes pour nous, & de tn!s-éloignées, felon toure apparence, de ceHes 'lue

nous aurions eues par

nous~memes

fans un tel fccours, C'eít aux Philofophes

11.

JU–

gel' ft cette communication i'éciproc¡ue, jointe

11.

la reffemblance que nous apperce–

vons entre nos fenfations & cel1es de nos femblables, ne contribue pas beaucoup

a

fortifier ce penchant invincible que nous avons

a

fuppofer l'exiHence de tous \es

ebjets qtÚ n,ous frappent,

~our

me renfermer

da~s

mon fujet, je remarquerai feule–

roent que 1agrement

&

1avantage que nous trouvons dans un pareil commerce,

foit

a

fáire part de nos idées aux autres hommes, foít

11.

joindre les leurs aux n

tres~

, .doit n09s porter

11.

refferrer de 'plus en plus les liens de la fociété cornmencé ,

&

a

la rendre la plus urile pour nous qu'il eft poiIible:

M~is

chaque membre e la fo–

ciété cherchant ainfi

11.

augmenter pour lui,.meme l'utilité qu'il en recite,

&

ayant

a

combattre dans chacun des autres un empreffement égal au ften, tous nepeuvent

avoir la meme part aux avantages, quoique tous y ayene le meme droit,

Uri

droit

'fi

légitime eft aonc bielMót enfreint par ce droit barbare d'inégalité, appellé lo! dl1

plus fort, dont l'ufage ferilble nous confondre avec les animaux,

&

.dout il eít pour..

tant fi difficile de ne pas abufer, Ainfi la force, donnée par la nature

a

certains

hom~

n.es,

&

qu'ils ne devroient fans doutG employer qu'au foütien

&

11

la proteétioll

A2

des