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CEL

de ménager les provifions dont

~

avoient befoin

dans leur retraite. Ce barbare confeJ.L fut ponfruelle–

ment exécuté. Chicorius qui luí fuccéda dans le com–

mandemenr, fit tuer vingt mille malades;

&

Bren–

nus fans attendre qu'on lui rendlt ce fervice inhn–

mai~

crut qu'il étoit plus glorieux de fe tuer lui–

mem~.

Aucun trait ne caraél:érife mieux leur féro–

cité, que ce qu'ils firent avant de livrer bataille

a

Antigone. Les arufpices qu'ils confulterent, ne leur

furent pas favorables,

&

prévoyant leur défaite ,

jls

tuerent leurs femmes

&

leurs enfans ,

&

allerent

enfuite chercher, comme des furieux, la mort qui

les attendoit dans la melée. Lorfque les Romains

iubjuguerent les Gallo-Grecs, ils furent étonnés du

rnépns que ces peuples avoient pour la vie,

&

de

leur horreur pour la fervitude. Les captifs mor–

doient leurs chalnes, ils fe tendoient la gorge l'un

a

l'autre'

&

fe rendoient le fatal fervice de s'étran–

gler réciproquement.

La frugalité leur étoit naturelle. La vie nomade

qu'ils menoient dans le tems de leurs premiers établif–

íemens, ne leur permettoit pas de rechercher les déli–

ces de la table. Ils furent long-tems fans connoitre

l'agriculture. Ce furent les Phocéens , fondateurs de

Marfeille, qui vers l'an 6oo avant notre ere, leur

apprirent

a

cultiver la terre,

a

tailler .la vigne

&

a

planter des oliviers: mais cet art fut Jent

a

prendre

des accroiífemens parmi des hommes perfuadés que

tout autre inftrument que les armes, avilifoit leurs

mains. U leur fembloit plus íimple

&

plus com–

mode de fe nourrir du gibier de leur chaíre, du lait

&

de la chair de leurs troupeaux. Ce ne fut que vers

l'an 6oo de la fondation de Rome, que l'agriculture

íortit de fon enfance dans la Celtique. Il fallut faire

,violence

a

ce peuple' pour le réfoudre

a

arrofer de

fa fueur un pénible íillon. La vie paiíible du labou–

a-eur rebut

oit len

r caraélere impatient. Ils aimoient

a

fatisfaire

leu.rs

deíirs auffi.tot qu'ils étoient formés;

&

la terre

eft le

nte

a

exécuter fes p-romeífes. L'eau

aífaifonnée de miel o u de lait, fut leur premier breu–

.vage. Des qu'ils eurent des grains, ils les employe–

J:ent

a

faire de la hierre ;

&

qu0ique les Phocéens

)eur euírent enfeigné l'art de cultiver la vigne, ils

furent long-tems üms en extraire la liqueur quiflatte

leurs defcendans. On ne buvoit dans toute la Celtique

~u

e des vins étrangers,

&

il n'y avoit que les com–

'men;ans qui euífent la facilité de s'en procurer. lis

prenoient leurs repas affis parterre, pres d'une table

trop petite pour y fervir beaucoup de mets. L'ufage

'de la couvrir d'une nappe ou d'un tapis , ne s'intro–

duiíit que long-tems apres l'ufage des étoffes. Leur

,vaiírelle

&

leurs vafes n'étoient que de bois on d'ar–

gile. Les feigneurs buvoient dans des cornes de betes

íauvages tuées

a

la chaífe ' les braves dans le cdine

d'nn ennemi tombé fous leurs coups; ils les portoient

fufpendus

a

leur ceinture, comme un monutnent de

leur viél:oire ; & c'étoit fur tout, dans les banquets

facrés , que les guerriers étaloient avec fafie ces

coupes rebutantes. 11

y

avoit chaque année des feftins

publics dans tous les cantons de la Celtique. Le plus

magnifique étoit celui que les feigneurs donnoient le

jour ott on élifoit le fouvcrain magifirat ou le

oéné–

ral. Les tables étoient fervies avec plus de

prof

~fi.on

,que de délicateífe; des jeunes gens de l'un

&

de

l'au–

tre fexe fervoient les convives. On voyoit pres des

tablesd'imménfes foyers garnis de broches

&

de chau–

dieres d'une grande capacité on cuifoient des ani–

nlaux entiers. Les morceaux les plus délicats étoient

fervis aux plus braves. Ce"t ufage enfanglantoit fou–

vent les fe res. Celui qui fe piquoit de bravoure, cho–

qué de la préférence , difputoit ces morceaux

a

la

pointe de l'épée: o u il faifoit périr fon adverfaire, ou

il p ' riífoit lui-meme.

n accufe les

Celtes

d'avoir été antropophages,

&

CEL

il

eft difficile de les en juílifier, puifque dans les fami–

nes, ils égorgeoient fans pitié les femmes les enfans

. '11

d

&

,

'

l

'

,

le~

v1e1 ay s,

,genera ement tous ceux qui n'é-

totent pomt en etat de poner les armes · mais des

faits parriculiers infpirés par le défefp-eir,

~e

doivent

point imprimer une flétriífure

a

toute une nation.

Tant que

les

Celtes

menoient la vie nomade, errans

&

vagabonds, ils ne

s~arretoient

que dans les lieux

oti ils trouvoient des fubíiftances : ainfi ils n'avoient

point de villes , ni d'édifices qui ne font u riles qu'a

ceux qui menent une vie fédentaire;

&

c~eft

la v ' ri–

table caufe pour laquelle il n'avoient ni temp1es,

ni

ftatues. Ce ne fut qu'apres avoir reconnu les avan–

tages d.e

l~agriculture,

qu'ils firent le partage des ter–

res qtu; JUfqu'alors , n'avoient point eu de poffef–

feurs

exclufi~s.

Ils batirent des granges pour y dépo–

fer leurs m01ífons. Ces premiers édifices donnerent

naiírance aux vil!es, que l'on ne f<;>rtiña que pour

y

co?ferver le

b~tm.

Les

C~ltes a~ro1ent

rougi de de–

VOir leur falut

a

des muratlles: tls cherchoient l'en–

nemi,

&

le caraél:ere de la lacheté éroit de l'attendre.

Ils. auroient cru fe

dés~ot?-orer

avec un cafque on une

cmraíre; leur adreífe et01t leur plus ferme bouclier.

Le premier des arts qu'ils cultiverent, fut celui dé

la guerre; c'étoit auffi le feul qui attiroit de la confi.–

dération. Dans les premiers tems ils alloient tout

nuds, ils n'avoient d'autre parure que leurs armes.

Les vieillards , dans les froids rigoureux , fe cou–

vroient de la peau des betes dont ils avoient dévoré

la chair. La lime

&

le marrean furent les prenñers

iníl:rumens connus dans la Celtique; on s'en fervit

pour faire des lances

&

des épées , avant de les ema

ployer

a

polir le foc

&

la beche deftinés

a

féconder

la terre. Le foin des manufaél:ures fut abandonné

a

des efclaves. Tout ce que nous appellons métier

ét,oit reg.ardé"comme

un~

<;>c,cupation avi!iírante, qui

degrado1t meme la poftente de ceux

qut

s~y

étoient

livrés. Un

Celte

fe croyoit né pour la guerre ,

&

il

ne vouloit devoir fa fubfifrance qu'a ion épée. Les

braves marchoient toujours armés' meme en tems

de paix. Le pillage étoit permis en tout tems. La poli–

tique avoit introduit cet abus , pour entretenir les

inclinations belliqueufes de la nation. Toutes les vio–

lences étoient autorifées, pourvu qu'on refpeélat la

cité dont on étoit membre. Ainfi la vie d'un

Celte

étoit un état de guerre.

Les métaux, qui font le deíl:in de la guerre , furent

auffi employés

a

décorer la valeur. Les guerriers por–

toient des bracelets d'or ou d'argent,

&

c'étoit de ces

métaux qu'ils garniífoient le bord des cranes humains

&

les cornes des betes fauvages, qui leur fervoient

de coupes. Les colliers étoient la diftinél:ion la plus

honorable; on ne pouvoit faire

a

un

Celte

un préfent

qui flattat plus fa ñerté. Leur front de bataille étoit

ordinairement

~ompofé

de ces hornmes

a

colliers' &

comme c'étoient ordinairement les plus vigoureux &

les mieux faits, leurs armées offroient un coup d'reil

également magnifique

&

terrible. O n voyoit toujours

quelques-uns de ces braves qui fortoient de leur

rang' pour défier

a

un combar particulier' des foldats

ennemis. Lorfque les

Celtes

eurent fubi le joug,

&

qu'ils fe furent enrolés dans les armées de leurs vain

queurs, les Romains mirent les bracelets au nombre

des récompenfes militaires : on en voit encore des

vefiiges dans les hauíres-cols , attrihnt diíl:inél:if de

1'

officier.

Leur poeíie remontoit au tems voifins de leur ori–

gine; & leurs poemes précéderent de beaucoup leurs

ouvrages en profe. Leurs poetes, appellés

bardes,

excelloient {ur-tout dans les ocles. Leur verve s'exer–

s:oit principalement fur l'origine des peuples, les mi•

grations' les guerres. Ils fe complaifoient

a

célébrer

la création des dieux & des hommes. Les pretres

avoient des poemes propres

a

tolltes les folernnités,