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e aveuglc de dogmes qu'il ne cpmptend pa's: les
v oiles myfiérieux qui les enveloppent ne font pro–
pres , dires - vo us, qu'a faire des fanatiques & des
emhouíiaíl:es. Mais raifonner ainíi , c'ell bien peu
c onnoí't-re 1'<1 nature humaine: un culte révélé efi né–
c
efraire aux hommes; c'eíl: le feul frein qui puifrc les
a
moter.Laplftpartdes hommes que la feuleraifon gui·
d
eroit , feroient des efforts impuifrans pour fe con·
vaincre des dogmes dont la créance efi abfolument
efrenticlle
~
la confervation des états. Dema ndcz
ame Socrates, aux Platons, aux Cicérons , aux éne–
ques, ce qu'ils penfoient de l'immortalité de !'ame ;
v ous les trouverez florans
&
indécis fur cette gran·
de quefiion,, de laquelle dépend toute l'ceconomie
de la religion
&
de la républiquc: paree qu'ils ne
vouloienr s'éclairer que du feul flambeau de la rai–
fon, ils,marchoient dans une roure obfcure entre le
néant
&
l'immorraliré. La voie des raifonncmens
n 'efi pas faite pour le peuple. Q u'o nr gagné les Phi–
lofophes avec leurs difcours pompeux, avec leur
fiyle fub lime , avec leurs raifonnemens íi artificieu–
femenr arrangés? tanr qu'ils n'ont montré que J'hom–
m e dans leurs di!i::ours , fans y faire intervenir la Di–
vinité,
ils
ont roüjours trouvé l'efprit du peupie
f ermé
a
tous les enfeignemens. C e n'efi pas ainft
qu'en agi«oient les légillateurs , les fondateurs d'é–
t ar, les iníl:imteurs de religion : pour entraí'ner les
efprits'
&
les plier
a
leurs de{[eins politiques' ils
ntettoienr entre eux & le peuple le dieu c¡ui leur
avoir parlé ; ils avoient eu des vilions noélurnes ,
ou des avertifremens divins; Je ton impérieux des
oracles fe faiíoi r fentir dans les difcours vifs
&
im·
p étueux qu'ils prononc;oient da ns la chalettr de !'en·
t houíiafme. C'efi en revetant cet extérieur impo–
f ant; c'ell: en rombant dans ces convulíions furpre–
n antes, regardées par le r.euple comme 1'effet d'un
p ouvoir furnaturel ; c'efi en lui préfentant l'appas
d'un fonge ridicule , 9ue l'impofieur de la Mecc¡ue
ofa tenter la foi des credules hnmains,
&
qu'il ébloiiit
l es efprits qu'il avoit flt charmer, en excitant leur
a dmiration, & captivant leur confiance. Les cfprits
fafcinés par le charme
vain~uenr
de Con éloquence,
n e virent plus da ns ce hardi
&
fublime impoíl:eur,
qu'un prophere qui agifroit, parloit, punifroit, o u
p ardonnoir en Dieu. ADieune plaife queje confon–
de les révélations dont fe glorifie
a
!i jufie titre le
Chrijlianij'me ,
avec celles que vantent avec oíl:enta–
t ion les autres religions; je veux feulement infmuer
p ar-la qu'on ne réuílit a échauffer les efprits' qu'en
faifant parler le Dieu oont on fe
dit
l'envoyé , foit
c:¡u'il ait véritablement parl
é comme dans le
Clzrijlia–
~ij'me
&
le Judaifme, foit
9.uel'impoíl:ure le fufre
p arler comme dans le Paga
nilme& le Mahométifme.
Or il ne parle point par la voix du philofophe déif–
l e
=.
~ne re_lig;i~n
ne peut d<;>nc etre util.e c¡u'a titre de
r eligwn revelee.
Voyt{
DEISME
&
REVELATION.
Forcé de convenir que la religion C hrétienne eíl:
r
la meilleure de toutes les religions po\tr les états qui
ont le bonheur de la voir liée avec leur gouverne–
ntent politique, peut-l!tre ne croyez-vous pas qu'elle
foit la meilleure de tO\ltes pour. tous les pays:
«
Car ,
-,. pourrez-vous me dire, quand je fuppoferois que le
,.
Chrijlianij'me
a fa racine dans le ciel , randis que les
,
autres religions ont la leur fur terre, ce ne feroit pas
,
une raifon
e
a
con!idérer les .:bofes en politique &
, non en théolo gien) pour qu'on dí'tt lui donner la pré–
,
fére nce fur une religion qui depuis pluíieurs íiecle¡;
,
feroit rec¡:ue dans un pa7s,
&
qt_ú par
c~mféquent
y
~
feroit comme naturalifec. Pour mtrodtUre ce grand
,. cba.ngement, il faudroir d'un
~oté ,compenfer
les
,, -av antages qu'une meilleure religion procnreroit a
,
l'état,
&
de l'autre, les_inconvéniens qui réfultent
, d'un changement de religion. C'efi la
com?inai~on
, ~ex¡¡éle
de ces
diye~
ayant.,ages
¡¡yec
c;es dtvers m-
Tom<
JI!,
e
HR
convéniens; toí'ij
-ours impofl:ible
a
faire, qui avoit
»
do~é
lieu
p~i
J.esancie ns
a
cette.
~axime
íi
fage,
,
qu
,¡
ne faut ¡am
ats toucher
a
la rehgwn dominante ..
d'un pays, paree que dans cet ébranlement
OtJ
l'on
,
met les efprirs, il efi a craindre qu 'on ne fubíl:i-
,
tue des foupc;:ons contre les deux religions'
a
une ,,
ferme croyance pour une ;
&
par-l.\ on rifque c;le
,
donner
a
l'état ' au moins pour quelque tems' de "
mauvais citoyens & de mauvais fideles. Mais une
,
autre raifon qui doit rendre la politique extrerr¡e-
,
ment circonfpeéle , en fait de changement de reli- "
gion, c'efi que la religion a ncienne eíl: liée
1t
la con–
íl:itution d'un état,
&
que la nouvelle n'y tient point
¡
,
que celle-la s'accorde avec le climat,
&
que fouvent
,
la nouvelle s'y refu fe. Ce fonr ces raifons,
&
autres
~~
femblables, qui avoient déterminé les anciens légif-
,
lateurs a confirmer les peuples dans )a religion de "
leurs ancetres' tour conva inc;us qu'ils fu«ent que ,.
ces reli9iGns
~roient
contraires p<rr bjen des endroirs
,
aux interó!ts politiques,
&
qu'on potlvoi.t les chan- "
ger en mieux. Que conclure de rout
ceci~
que c'eíl:
,
une tres-bonne loi civile, lorfqu e l'état efi fa risfait ,
de la religion déja établie, de ne point fouffrir l'éra-
,,
bli«ement d'une autre, ffir-ce meme la Chrérienne ,,
C'efi fans doutc une maxime tres-!en!ee
&
tres–
conforme
a
la bonne politique ' de ne point fouffrir
l'établiífement d'une autre religion dans un état oú
la rdigion nationale efi la meilleure de routes : mais
cette maxime eíl: fau{[e
&
devient dangereufe, lorf–
que la religion nationale n'a pas cet augufie carac–
tere; car alors s'oppofer a l'établi!lement d 'une re–
ligion la plus parfaite de tomes,
&
par cela meme
la plus conforme au bien de la fociété, c'efi priver
l'état des grands avantages qui pourroient
lui
en re–
venir. Ain!i dans tous les pays
&
dans tous les
tems~
ce fera une tres-bonne loi civile de favorifer , autant
qu'il fera poffible , les progres du
Chrijlianij'me;
par–
ce que cette
reli~on,
encare qu'elle ne femble avoir
d'objet que la felicité de l'autre vie, efi pourtant de
toutes les religions celle qui peut le plus contribuer
a notre bonheur dans celle-ci. Son extreme urilité
vient de fes préceptes
&
de fes confeils, qui tendent
tous a conferver les mceurs. ll n'a point le défaut de
l'ancien Paganifme, dont les dieux autorifoient par
\
leur exemple les vices, enhardi!Ioient les crimes,
&
allarmoient la timide innpcence ; dont les fetes
li–
centieufes deshonoroient la divinité pa¡ les plus in–
fames proíl:itutions
&
les plus faJes débauches;
dont les myfleres
&
les cérémonies choquoient la
pudeur; d
ont les facrifices cntels faifoiem frémir la
nature, en
répanda.ntle fang des viélimes humaines
que le fana
t ifme avoit dévoiiées
a
la mort pour ho¿
norer fes dieux.
IJ
n'a point non plus le.défaut du Mabométifme;
qui ne parle que de glaive , n'agit fur les hommes
qu'avec cet efprit defintéleur qui l'a fondé,
&
qui
nourritfes frénétiques
feélat~urs
dans une indifférence
pour routes chafes ; fui te nécefraire du dogme d'un
deíl:in rigide qui s'cíl: introduit dans cen e
1
eligion.
S'il ne nie-pas avec la religion de Confucius l'immor–
talité de !'ame, il n'cn abufe pas auíli comme o n le.
fait encare aujourd'hui au Japon ,
a
Maca«ar ,
&
dans plulieurs autres endroits de la rerre, ou l'on
voit des
fen;~mes
, de> elclaves , des (ujers , des:
amis, fe nter pour aller fet-vir dans l'aucre mQ_nde
l'objet de leur rc{peél
&
de leur amour. Cette cnrelle
cofttume íi d,eflruélive de la fociété , émane moins:
direélemem, felon la remarque de l'illufire aureur
de
l'efprit des lois ,
du dog_me de l'immortalité de
l'ame~
'];_.de cebú de la réfurreflion des corps;
d'qu
l'on;. tíré.
cett.e confl'quence, qu'
apr~s
la more un mi me
individ~&.
auroit
tes mimes
~efoins
,
ús mémesflntimens, tes mt–
m<.r
p ajJions.
Le
Chrijlianif'!'#
non
-feulem~nt étal?)i~
ce dogme , rr¡a},s)l fait enc;ore
a~mirab!ement
l¡ieq
C~:¡;