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CH
A
tre Jes pieds fur !es
terres de France ; mais fuivant
I
»
maxirncs de ces prnples ·, un craice
n 'o?ligeoi~
que
cdui qui l'avoit conclu,
&
non pas Ia nation ent1ere:
auffi ils ne ce!ferent depuis ce terns d'y faire des cour–
fcs ' non plus pour piller' mais pour
y
former·des eta–
bl1{fonens.
Charles ,
par cet humiliant traite , s'attira le
mepris des peuples ,
&
fes complaifances pour le cler–
ge ,
le
firent deteller des feigneurs. Ce prince odieux
au corps des nobles •
fe tourna du co e des evcques
qui s'ernbarra(foient peu de la gloire de l'etat , pourv(1
qu'ils en partagea!fenc !es biens. Les eveques depuis le
depart des
Normand~
etoient affembles
a
Beauvais :
Charles
au lieu de prelider a leurs deliberations promic
d'y foulcrire. Ils ne pouvoient cependant porter plus
haut l'orgueil de leurs pretentions
!
toutes etoient fon –
dees fur quelque paffage de l'ecrirnre ma\ interprece ;
&
le roi euc bien pu connoicre, s'il eut eu quelque dif–
cernemenc, qu'ils ne tendoienc qu'a depoui\kr le crone
de fes plus precieux privileges. Apres la bataille de
F ontenai , on
Jes-
avoit regardes comme Jes difpenfateurs
du fccptre. Dans l'affemblee de Beauvais , ils prefcri–
virenc
a
Ieur nialtre la maniere done ii devoit en ufor,
apres Jui avoir faic jurer de garder le droit eccleriall:i–
que : chaque eveque exigea de
Charles
un ferment , done
on h1i .prefcrivit jufqu'a la
forme : jprez , promet–
tez ,
&c.
C'ecoit avec ce ton que l'on parloic au mo–
narque ,
fi
cependlnt on peut honorer de ce nom un
prince qui fe degradoit
a
ce point. Apres que les cve–
ques eurent re\:u ce ferment , chlcun en plrticulier,
ils fe reunirent pour en recevoir un general fur plu–
tieurs autres chefs. Les prelats fatisfaits de: la· foumif–
fion de
Charles
,
terminerent l'affemblee,
&
en indi–
qucrc:nc unc: autre
a
Mt'aux ,
ou
l'on devoit dreffer des
actes de ce qui venoit de fe paffer: mais Jes articles en
eco1cmt ri deshonorans' quc Jes feigneurs s'oppoferent de
tout kur pouvoir , ace qu'on les rendit publics.
Char–
le.c
rdta nemre dans un differend qui l'incere!foic plus
que pcrfonne. II fe rendit en Aquitaine ,
0~1
il fie avec
P epin fon neveu , un traite non moins honceu:< que ce.
lui qu'fl avoit fair avec Regnier.
Un elfaim de Normands reparidu dans la Sainton–
ge , caufa de nouvelles allarmes ,
&
fournit aux pre–
lats un moyrn qu'ils cherchoienc dcpuis long-terns ,
d'clever
l.1
voix contre Jes feigneurs , done la j11!1:e fer–
rnet• oppofoi t un frei n puiffant
a
leurs deffeins am–
bicieux. Ils publierent que Jes
frequen~es
defcentes des
N ormands ecoienc une preuve de la colere du ciel ,
indigne de l'opiniatrete avec laquelle on s'oppofoit aux
p ieuCes inteqtions du monarque. Voyant alors que le
bandeau de l'illurion couvroit les yeux du peuple en–
core plonge dans !cs tenehres
&
!'ignorance, ils fran–
chirent tous les ob!l:acles ,
&
rendirent publics Jes aCtes
du fynode de Beauvais. Comrne )'ambition ne garde
aucune mefure , ils
y
eralerent tout le fa!l:e de
la
leur:
ils fouteno1ent que
Charles
dcvoic prendre d'eux l'or–
dre
&
le lignal : fiers d'u.n p•ffage de M3lachie, ,, ils
recevront , s'ecrioient-ils d'un con prophetique, la Joi
de la bouche de celui qui ell dans le facerdoce, c'c:ll
l'ange du Seigneur des armees ,,. Cc procede offenfa
1i
nliblemenc Jes ft1gneurs , dont on attaquoit ouvene–
mrnt l'aurorite ; a!lemble
a Epernay ,
ils firenc des
remontrances
Ii
vives qu'ils parvinrent enfin a deffiller
les yeux de
Ch(Jrle.s
;
mais ce prince egalemeot dupe
de
fa
confiance
&
de fon relfentiment, mecontcota fes
fojers par une conduite oppofee a ccl\e qu'il avoic te–
nue jufqu'alors : incapable de moderation, ii alloit tou–
jours aux extremes; apres avoir comble les eveques de
biens
&
d'honneur , ii Jes fit chaffer tout-a-coup de
l'alfemblee avec ignominie: ils mericoient ce trairement
fans doure: mais ecoit-il de la politique de le leur fai–
re elfuyer
?
Ce corps orgueilleux
&
vindicatif Jui of–
froic une puilfance redoutable;
&
pour en triompher,
ii fe mc[roit dans la dependance des feigneurs, qu'il
ne pouvoit plus mecontenter fans peril : qu'1l cut
bien mieul( valu menager les deux partis
>
&
fans kur
faire de gran
biens , ne leur faire al.lcun outra e
!.
CHA
ii
k s auroit alors conduits
l'un par l'autre au biett
de l'etat. C'etoit ainli qu'en avoienc ufe Pepin
&
Char–
lemagne pendant le cours d'un regne auffi long que
gloricux. Cette faute euc de terribles fuites: les nobles,
tranquilles du cote des eveques mirent des conditions
a
lcur obei!fance ; ils deliberoienc lorfqu'il falloit agir.
Les Normaods faoienc daas la Sainronge, d'ou ils in–
fc!l:oient les pays voifins: ils etoient d'autant plus rc–
doutables , q ue Pepin facrifiant
tout au delir de fe
rendre independanr • etoit bien eloigne de s'oppofer
aux embarras de fon oocle. Ce fut pendant ces trou–
bles que Jes Bretons, conduits par Nomenon , auqucl
Louis le Dcbonnaire avoit donne leur gouvernemenc,
lenrenr l'etendard de la revolte. Ces peuples jaloux de
leur independance, avoient deja tence pluriems fois de
fecouer le joug des
Fra n~ois;
mais leur indocilite leur
avoit toujours ete funelle jufqu'alors. Charlemagne
&
L ouis le Debonnaire , avoienc epuife fur e\Jx cous les
traits de la plus terrible vengeance: plus heureux fomr
Charles le Chauve,
ils remporterenc fur ce prince
un~
vi–
Cl:oire eclatante'
&
le forcerent a demander la paix •
on ne fait a quelles conditions ; mais un roi qui con–
fent
a
demander grace
a
fes fujets ' renonce fans Joutc
a
s'en faire Bbeir. Nomenon cut peinc
a
confenrir au
traite; ii ell meme probable qu'il s'y feroic refofc '
fans une defcenre que firent Jes N ormands fur ies ter–
res : en effet, des q u'il Jes euc d<'farmes par un craitc,
ii
recommen~a
la guerre avec une ardeur nouvelle,
&
s'empara du cerritoire de Rennes, ainli que de celui
de Nantes; alors ne s'amul'ant point
a
fei ndre, ii prit
1~
diademe'
&
fe fit facrer par les eveques clans une af–
frmblec: narionale.
Ch.1rlcr
reclama contre l'ufurputeur,
ii le fit excommunier , mais ces foudres forent auffi vai–
nes que fes armes; ii ne toucha plus dans la fuite au
fctptre des Bretons, que pour
le
remettre avec plus
d'eclat encre Jes mains d'Erefpoge , fils du rebelle
1
non
feulement
Charles
couronna ErHpoge de fes propres
mains, ii ajouta encore It! rerritoire de R aiz au royau–
me que fon pere venoit d'ufurper,
&
done ii lui con–
firmoit la poffdTion.
Ce fu t au milieu de ces difcordes etrangeres'
&
ci.
viles que
Charles
implora le fecours de fes freres ; chan–
cellant fur lln crone agite par mille faCl:ions domelti–
qu~s,
non mains terriblcs que les
guerr~s
que Jui fai–
foic:nt
u
l'envi Jes Bretons
&
Jes Normands ,
ii leur
demanda une conference pour remedier aux maux qui
defoloient fes malheureux etats. L'empereur
&
le
roi
cle Germanie , cedanc
a
fes prieres, fe rendirent
a
Mer–
feo , oi'.1
ft:
tint I'.iffemblee genera
le.
Les trois "Princes
y
parurt'nt dans la plus grande incimite; on nlapper.
\:Ut aucune de ces divdions qui avo1enc lignale
le
com–
mencement de leur regne. ,, Sdchez , dirent-ils , aux
eveques
&
aux feigneurs , que chacun de nous cit
pret
a
voler au fecours de fon frere '
a
!'aider de fes
confeils
&
de fes
armes ,
tant au-dedans qu'au-de–
hors du royaume ,,. C'etoit unc menace indireCl:e de
les punir, s'ils abufoient davancage de leur autorite;
on oe pouvoit ufer d'une plus grande moderation :
la fierce des nobles en fut cc:pendant offcnfee,
&
l'~n
s'apper~ut
dans cette alfemblec-la meme , que leur pu1f–
fance etoic bien mieux affermie que celle des rois. Gi–
falbert, l'un d'eux, avoic enleve la fille de l'cmpcreur,
&
avoit ofe l'epoufcr publiquemenc malgre
fa
reclama–
tion. Quoique ce rapt blell3t egalement l'honneu r
~C!
fes freres, ii m: put en ob.tenir vengeance ; on
~ut
obli–
ge de diffimulcr leurs autres execs. Mais
ce
qui montrc
l'etat de foibleffc
OU
la monarchic etoicreduite, ce fut un
article qui declaroit quc:,
Ii
l'un des princes derogcoit
a
fes promeffes' Jes eveques
&
Jes feigneurs pourro!enc
l'en avertir conjoincement,
&
ordonner concre llll ce
qu'ils jugeroienc
a
propos , s'il refufoit de fe
readro
a
!curs remontrances. C'etoit rendrc les fujecs juges de
leurs fouvcrains : Jes puiffances intermediaircs avoient
fair un alfcz cruel abus de leur autorite , pour mon–
trer Jes con!Cquences d'uo femblable decree.
L'alfeqiblee de Merfc:n
crvi~
a
re!ferrer !'union d:s