CAL
croyoit fortu ne quand ii avoit de& jeux
&
des (peCl:a–
cles. Le temple d'Augull:e
&
le theatre de Pompee ,
q ui avoient ete commences firus
le:
rcgnc: de Tiberi:,
furent acheves fous celui de
Caligola.
Ce prince
Ii
jull:ement chen, fi: depouilla tout-a–
coup de la doucc:ur de fon cara ere pour
fo
meta–
morpho(er en bete farouche , qui ne refpiroit que le
fang humain. Son orgueil airier fe plut
a
humilier les
rois : ii fut tente de prendre Jui-meme le diademe;
mais
ii
lui parut plus glorieux de s'arroge r Jes hon–
neurs de la divinite, <loot ii prit les attributs. II fit
apporter de G rcce l.1 O:atue de J upit.:r olympien , dont
ii
fit oter la tete pour
y
placer la !iennc ,
&
ii exigea
q u'on l'honortu fous
le
nom de
J11pi~e1'
latial.
On lui
dreffa des autels , oil des viCl:imaires immoloient des
poules de Numidic:, des faifans
&
d'autres oifeaux re–
cherches : Jes pretres confacres
a
fon culte etoient ma–
gnifiquement payes. La crainte
&
l'efp.C:rance multi–
plierent
(es
adorateurs : ii fe vanta d'entretenir un com–
merc.e particulier avec Jupiter, qui defcendoit fou vent
du ciel pour le vifiter. Un homme alTez
imbecile
pour fe croire un dieu , dc:voit rougir d'avoit pour
a'ieul Agrippa, qui , ne de parens obfcurs , avolt
cte l'artifan de
fa grandeur. Ce fut pour dHavouer
fon origine, qu'il deshonora la memoire d'Augull:e,
en d1fant que fa mere etoit le fruit du commerce in–
cell:ueux de cec empereur avec
fa
fille Julie. L e me.
me orgueil lui fie meprifer fon a'ieule Livie , fous pre–
texre que
fon a'ieul avojc etc magill:rat de Funde. L es
chagrin
qu'il lui caufa , abregerent fa vie ,
&
ii fut
foup~onne
de
l'avoir empoifonnee. Ce
foup~on
fut
autorife par le rt fus qu'il fit de re"ndre
a
fa memoi–
re les honneurs que
le
fenat
lui avoit dfferes ,
&
par le meurrre de fon frere Tibere
&
de Sillanus
fon beau-perc.
11 n'y el1t point de crime qui n'ife–
tl:ftt fon cc;cur: fes ince!l:c:s avec
fes
fceur~
furent pu–
blics ,
&
fur-tout avc:c Drufile , qu'il arracba du lit
de fon epoux pou r affouv ir
fa
brntalite. Ecant tcim–
be malade ,
ii la defigna fon heritiere
a
!'empire. Tou–
tes
les femmes celebres par Jeur beaute , allumerent
fes feux impudiques : ii enleva Livie Horiltele le
jou~
meme de fes noces,
&
ii q uitta
le
banquet nuptial
en
annon~ant
qu'il alloit coucher avec ell,e.
11
s'en
de–
go(na trois mois
:ipres ,
&
ayant fu qu'elle revoyoit
fon premier epoux, ii
pronon~a
l'arret de leur mort.
Cefonie parut fixer
fon
incon!lance; elle
'n'avoic ni
jnrneife. ni beaute '
&
meme el!e etoic mere de trois
1 lles ;
mais ces dffauts ecoient rachetes par fes rafine–
mens
&
JC:s decouverres clans l'art de reveillcr les vo–
luptes. Aprcs avoir fait l'dfai de fes cruautes fur fa
fami llc, ii en exer\:a de no"twellcs contre ft:s amis qui
l'avoieht eleve
a
!'empire '
&
contrt: ceux qui avoicnt
ere!
les complices de fes
debauches:
tous
perirent
d'une mort violence. II fit nourrir pendant long- terns
des bctcs fauvages , pou r Jes faire combattrc dans les
jeux qu'il donnoit au public. Ccuc depenfe fo t retran–
chee ,
&
au lieu de b€tes , ii lui p.irur moins ruineux:
de tirer des hommes des prifons pour les faire com–
battre
a
OUtl'ance. U n joul'' on
lui prelenta la !ilk
des prifonn iers accufes de crimes ; il ne ft: donna pas
fa
peine d'examiner lcs depofitions,
&
tous furent in–
d ill:inClement condamnes
a
la mort. Un flatteur en le
voyant malade , fit vreu de combattre
a
outrance pour
rcmercier Jes
i:li~ux
de l'avo.i r rendu aux Romains
~
C1illg11la,
qui auroit du le dirpenfer de ce vreu teme–
rairc , en ordonna l'accompli(fement,
&
le flatteur
y
perdit la vie. II .fit maffacrer cant de Gaulois
&
de
G recs, qu'il
te
glorifia d'avoir fubjugue par l'epee la
Gn_llo-Grece. II avoit pour maxime que celui qui pou–
~01t co~r
, avoit droic de tout enfreiAdre,
&
qu'il
1mport?1t peu d'etre ha! , pourvu que \'on flit craint.
. rue!
JUfques dans l'ivreife de l'amour , ii ne baifoii:–
,1amms. le cou de
fa
femme
&
de fes concubines , fans
Jeur dire : ,, ce joli cou fera coupl: auffi-tot que je le
,,
~omm::i~d~rai
,,. Ceux qui ne co:nmettent que des
.1ll.1ons crimmellcs , ont en avC'f'fion Jes ecriva.ins qui
'Io1,1c
11.
CAL
qr
les tranlinettent
a
la poll:erire"; c'efl: pourquoi
Caligaf11
voulut faire bri\ler les ouvrages d'Homc:re, de Virgile
&
de T ice.Live. II voulut etendre plus loin cetatten–
tat
litteraire ;
&
fous pretexte quc: la. raifon nature lie
eroit fuffiJante pour diltinguer la verite du menfonge ,
le jull:e de l'inj ull:e , ii ordonna de briiler tous Jes li–
vres de J urifprudence :
fa
volonte eiit ete la feule
des lojx. L envie , qui devore Jes ames baffes, fit le
tourmcnt de fa vie. L es premieres
families de: Rome
furent privees des diftincbons qui rappdloient la gloi–
re de leurs ancecres : les• Torquatus n!: ponerent plus
la chaine d'or, ni les Cincinnatus ,
la perruque;
le
nom de
grand
fut ote aux Pqmpee.
Ca!ig11!t1 ,
dont tomes
lc:s
paffions furent extremes;.
n'emprunta pas le 'voile de
la decence pour couvrir
frs infa mies. Ses amours monll:rueux: avec Lepidus
&
Nell:or.le-pantomime ne modererent point fon go('it pour
!es courtifannes ,
&
fur-tout pour .t'yzallide , qui don–
noit depuis long-terns clans Rome des
le~ons
de
lu–
bricitt!. Les dames !es pli!s refpeetables furent egale–
ment expolees
a
fes omrages.
Jl
les invitoit a des fe–
fiins avec leurs.-maris,
&
apres avoir lance fur chacu–
ne fes regards impudiques , ii quittoit la falle du fe–
il:in ,
&
envoyoit chercher celles qui l'avoient le plus
frappe. Des qu'il avoit aifouvi
fa
brutalite , ii fe re–
mettoit
a
table '
&
fe
felicitant de fon
triomphe' jl
inrultoit
a
la v1Cl:ime en prefence de tous Jes convives.
II
for~oit
quelquefois ces femmes, qu'il venoit de dc–
shonorer,
a
envoyer
it
lcur mari des lettres de divor–
ce qu'il avoit· foin
de
faire
inlerer
fur Jes
regill:res
publics. Ce fut fur-tout par fes profufions qu'il
fur~
paffa l tout ce qu'on avoit vu clans Jes !iecles ecoules,
II ne prenoit It: bain que .dans des eau·" de fenreur.
On ne fervoit fur fa table que des mets recherches. II
f<!:
plaifo it
a
avaler des pierres precieufes qu'il reduifolt en
poudre avec du vinaigre. II faifoit fervir
a
chaque con·
vive des pains
&
des viandes qui en effet etoicht des
m alfes <l'or
fa~onnees
, en difan t '
ii faut etre· econo–
mc
a
moins qu'on ne foit Cefar. Bifarre clans tous fes
gouts ,
ii n'aimoit
a
executer q ue ce qu i avoit paru
jufqu'alors impoffible. II
fit conllruire des galeres de
bois de cedre qu'il enrichit de pierreries ,
&
de voi–
ks de pourpre
&
Je foie: On
y
trouvoit toutes les corr,i–
modites,
&.
tout
le
luxe qu'on admire dans Jes plus
fomptueux: palais
t
&
meme ii y
fit
planter jufqu'a des
vignes
&
des arbres fruitiers, dont l'ombrage garan–
t'iffoit des ardei.Jrs du foleil.
Caligula
y
donnoit des fe–
ftins
&
des concerts qui attiroient la multitude fur
le
. rivage '
lorfqu'il fe rendoit a fes maifons de campa·
gne. II aimoit
a
repri.mer la mer par des digues,
a
batir dans fon fein des palais ,
a
percer des montagnes
&
a
Jes applanir fans aucun motifd'utilitc. Ce fut par
fes folles depenfes qu'il epuifa fes _trefors ' qui ,
a
la
mort de Tibere , contenoient foixantc- fept millions d'ar•
gent monnoy'e. Son avarice, egale
a
fa
prodigalite ,
eut bientot .rempli le vuide caufe par fes diffipations.
.11
contell:a le droJt de b<?urgeoi!ie
a
plu!ieurs citoyrns
qu'il for\:3 de le rachete1·.
II fuppofa des crimes pour
s'en~ichir
par des confitcations. ll annulla Jes te!hmens
~
oi.Jrfe fubll:ituer
a~x
legitimes beritii:rs. 11 enlcvoic
aux particulicrs leurs plus
rich~s
meubles , alleguant
que ce L.txe nc devoit fc:
tolerer que dans Cefar;
&
lorfqu'il les mettoit
en
ventc: , c'etoit lui-meme qui
norpmoit les acheteurs ,
&
qui fixoit le prix. II fai–
foit payer jufqu'a l'honncnr de manger
a
fa
tabl~.
II
mit des imp0ts fur tout ce qui avoit eEe refpecte 3uf·
qu'alors. Le commell:ible lui dut des droits. Les _POT·
re-fai x furent raxes
1i
lui rendre la buitieme part1e du
~roduit
de leur travail. JI etablit des lieux de_proll:i–
tution ou des courtifannes privilegiees lui payo1ent un
impot journalier pour. exert'C1" librement k ur
c~mmer•
ce. Les jeux de haf.ird fu rent permis , parce qu'1l pou•
voit
y
friponner avec impunite.
·
•
Trop alfoupt dans
Jes
debauches
po~r
etre fenlible
a
la "gloirc
ii
fe vit dans
la neccffite de porter la–
ouerre en Alkmagne. II fit a!fembler les legions
&
0
R
2