CLA
·ae bien connoltre tous Jes
materiau~
qu'ils veulent em:
pl?yer ?ans leur. ouvrage, qu'a force de mediter leur
fuJet, 11
leur fo1t fi fami lier, qu'ils puilfent en faifir
l'enfemble d'un coup-cl'ceil. Celui qui aura vu
fi
fou–
vent ,
.~
en tant d'occafions differences, une P.erfon–
ne, qu 11 pourra fans peine s'en rappeller tous les traits,
Jes geftes , Jes mouven1ens, eft infiniment plus en erat
de bien decrire cette perfonne, qu'il ne
l'etoit a la
premiere vue: ii en eft de meme de tout autre objet
de nos perceptions : le temoin d'un evenement, qui
fe i'eft .fouvent rappelle depuis, qni en a chaque cir–
conftance bien prefeote a l'efprit.
ell plus capable
qu'aucun autre d'en faire un rccit afTez clair, pour
que ceux qui J'enrendtnt aient une idee diftinCle de
cet evenement; quand une fois on poffede bien
fon
fojet, que toUS les materiatlX neceffaires font raffem–
bJes . ii ne faut plus
a
l'artifte qu'un bon difcerne–
ment, pour faire la di!l:ribution
&
l'ordonnance: ce
fecond point Crane regle'
ii
ne lui refte qu'a bien me–
diter chaqlle chef principal feparement,
&
cette ope–
ration le conduira au troirieme point reqllis pour la
clartl ,
fa.voir, l'exporition diftincte des notions ca–
p icales.
-
En general, J'ordonnance que Jes plus grands pein–
· tres one fuivie clans leurs meilleurs ouvrages, leur art
de di(lribuer les figures
&
de les groupper ; la fcience
·d'eclaircir
&
de faire forcir Jes principaux grouppes :
voila les modeles du poere
&
de l'orateur , pour ce
q ui concerne Ja
cla1·ti
qui doit regner clans leurs ecrits,
(
Cet
qrticle
efl
tire
de
la 'l"hiorie
generate
des
Beaux–
/lrts de
M.
SULZER.)
C1 AR
TE
ou 01scouRs,
(Litter.
)
c'eft, comme on
' vient de
le
voir, la qualice par laquelle un difcours
c:ft propre a donner
a
ceux qui le lifont
OU
l'enten–
dent, la vraie connoilfance de ce que l'ameur vouloit
-leur faire penfer. Tout ce done qui empeche de bien
laifir la· penfee precife de )'auteur ,
ell:
clans fon di·
fcours un defaut d fenciel centre la
clarte.
· Diverfes caufes nnifent
a
la
clarte
du difcours;
1°.
le
fojet meme qui fouvent ell: hors de la portc!e des le–
cteurs,
&
q ui , pour etre bien entendu, fuppofe chez
'ceux
a
qui on l'adrdfe, des connoi!fances preliminai–
res qui leur manquent abfolument. Ainfi des ouvra–
ges
de philofophie font obfcurs pour ceux qui n'ont
pas etudie les principes de cetce vafte fcience;
&
ce–
pendant ii n'dt fouvent pas poffible, dans
i.lnouvrage
qui n'ell: pas elementaire, d'expliquer tout
cequi n'eft
pas familier a tout le rnonde. Se plaindre de l'obfcu–
rite des difcours de cette efpece, c'eft fouvent fe plain–
dre de
fa
propre ignorance.
2
°.
L'emploi des termes de )'art, des exprcffions
fcientifiques, font fouvent aum une fource d'obfcurite,
meme pour des
lecteurs
intelligens qui auroient ete
tres-capables de comprendre le fens de chaque penfee,
&
d'en
fentir
la verite '
fi
!'auteur s'etoit fervi des
termes communs
&
des expreffions ordinaires.
C'ell: fouvent une affetl:ation deplacee chez certains
auteurs, que l'ufage des termes d'art
&
d'exprtiffions
fcientifiques, auxquelks ils pouvoient aifement fubfti–
tuer des termes
&
des expreffions d'ufage ordinaire,
que chaque le&eur un peu eclaire
&
qui fair
fa
lan–
gue , cornprend aifement. Souvent c'ell: un jeu de la
-eharlacannerie des Jettres , ou des artiftes , q ue l'em-
ploi de ces termes barbares
&
etrangers, auxq uels re–
pondent parfaitement des ·mots communs,
&
auxquds
peuvent fuppleer des phrafes ordinaires.
3' . La crop grande brievcte ell: fouvent un obll:a–
cle
a
.la
clarte.
Q.Eelquefois un auteur fami liarife avec
\ln fujet qu'il ecudie depuis .long-terns , veut epargner
du terns
&
de la peine, prevenir !'ennui qu'infpirent
les details neceffaires
a
l'incelligence d'un fujet '
a
une
pi;rf?nne qui !es fait trop bien;
ii fuppofe que ces
?etails , ces idees intermediaires qui
lient le principe
a la conf.;quence' font auffi fami liers a fes
lecteurs
qu'a lui-mCim:,
&
fur ce pretexte ,
ii
fe
difpenfe de
Jes donner,
&
le letl:eur qui ne voit pas la liaifon dei
CL A
419
idees , ne comprend plus ce qu'il lit. Les
homm~s
. profondement favans ' font fujt:ts
a
etre obfcurs .
dan~
· teurs difcours par cette ralfon. Cependant celm qui
veu• inftruire , dcvrolt fe fouvenir que lui-meme at\
comr:nencement, n'd l:
pafle d'une idee
a
une
autr~
eloignee, qu'en fai!Hfant
le
fil <les iclees rnoyennc:s
.q~1
en ferment la liaifon. Abreger un d1fcours , di: ord1-
nairement retrancher ces details , ces iMc:s moyennes,
ces liaifons inutiles aux gens fort intelligens, mais
e(.
fentiellement nece!faires allX lecteurs ordinaires. E n forte
que fouvent abreger, c'eft diminuel' la
clarte
d'un dl–
fcours.
4
°.
Le dffaut de methode ell: une autre fource d'ob–
fcurite clans le difcours. Ne ·pas offrir !es idees dans
leur rapport reel, dans leur vraie dependance,
c'~!l:
prefque toujours jetter
de
la confufion dans l'efpnt.,
&
rendre impoffible !'intelligence de ce qu'on
die.
5°.
L e dffaut de
c!arte
du difcours vicnt fouvent du
defaut de
clarte
dans les conceptions ,
&
de dill:intl:ion
clans les idees de celui qui parle.
11
ell: bien rare que
celui qui con\:oit bkn ce qll'il veut dire,. qui com–
prend bien ce qu'il doit ex primer , qui en a une idee
nette , ne l'offre pas de rnemc: ' q uand
ii en
fait le
fujet de fon difcours.
6°.
Le defaut de ftyle produit ordinairement un de–
faut
de
clarte
dans le difcours.
Des
tranfpofitions defa–
vouees par la nature de la langue , des phrafes trop
Jongues , des parenthefes inferees mal-a.propos , ou trop
contiderables, qui interrompc:nt la peinrure de la pen–
fee , des termes relatifs crop peu carac1erifes ou mal
places, !'ignorance de la propriete des terrnes , en un
mot, toute faute contre les regles de la langue , ex–
pofe le difcours au danger d'etre obfcur.
7°. Le trop grand defir de montrer de l'efprit, ell:
fi
fouvent une fource d'obfcurire, que l'on feroit tente
de dire
a
tout ecrivain qui prend la plume : oubliez
que vous pouvez avoir de l'efprit , pom ne vous fou–
venir q ue de la neceffi te d'avoir beaucoup de bon fens ,
&
de !'obligation
OU
VOllS
etes de vous faire bien
comprendre. Ce defir de montrer de l'dprit produit l'af–
fetl:ation du ftyle , l'ernploi des termc:s figures
&
des
exprcffions recherchec:s
&
non nan1relles, qui font
prendre la penfee d'un auteur clans un tout autre fens
que celui qu'il avoit en vue.
La premiere qualite de tout difcours , c'ell: d'etre
clai r; la feconde, c'eft d'etre vrai. (
G.
M.
)
CLASSIQ_UE ( AuTEuR),
Art
de
la parole.
On
nomme
auteurs da.fliques
ceux qui peuvent fcrvir de mo–
dele par la beaute
&
!'excellence du ftyle. Tout
au~
telir qui penfe folidement
&
qui fait s'exprimer d'unc
maniere a plaire aux perfonncs de gout , appartient
a
cette claffe: on ne doit chercher des
auteurs tla.fliques
que chez Jes nations ou la raifon eft parvenue
a
un
haut degre de culture, ot1
la vie fociale
&
le com–
merce des hommes ont porte l'entendement
&
le bon
got1t fort au-defTus des fens groffiers: ce n'eft q uc:
Iii
que les hommes
comm~ncenc
a
trouver du plaifir Jans
des objets intellectuels
&
dans des fentimens delicats ;
alors ceux qui font doues d'un jugement
&
d'un gollt
plus exquis ,
fe
trouvent encourages
a
confiderer avec
plus d'attencion des objets qui ne tiennent pas imme–
diatement aux fens; ils decouvrent des rapports plus
delies , que le vulgaire n'apper\:oit pas : un nouvealf
champ de plaifirs pour la fociete fe prefente
a
Jeurs
regards,
&
l'infinie variete des objecs rend cette fource
inepuifable:
le
monde intellectuel, lt:s penfees
~
les fen–
timens , ferment pour eux une nouvelle nature, un
autre univers fecond en evenemens intere!Tans, en heu–
reufes combinaifons , en vues riantes,
&
incompara–
blement plus riche en plaifirs que la
n~cur~
groffien;
qui n'agic que fur Jes fens exterieurs: celu1 qui a r.rouve
Jes avenues de cc monde invifible, porce avec
fo1
tout
ce qu'il faut pour une converfacion agreable
&
des
recreations honnetes ; ii developpe dans _le
c_om!11e~ce
de la vie plurieurs 1cenes de cc .n.1onde-la :
ii
s
ar_rn~
!'attention,
&
un golit plus
dc.Jc. t commence a le