_CAL
les
"'&'
deL'h.ires,
&
la multitude en tn1Mf1'oit des
fam.
beaux qu'elle reveroit comme de pre'cieufcs reliques ;
&
quoique couvert de haillons degoucans,
ii etoit
plm refpeCl:e que Jes rois vecus de la pourpre.
u
poulfa
fon amou r pour la ju!l:ice jufqu'a la durete ; les ri–
chelfes
&
Jes dignites n'faoient point un titre d'impu–
nite. Juge incorruptible, i.l
frappoit de .la meme ver–
ge l'opprefiear
&
le
foible:: coupable. F1dele
ob~erva
tcur des traites , ii punilfoit fes lieutenans
convainc~s
d'avoir viole
la faiotete de leurs (ermens. Les hab1-
tans de JCrufalem ne voulurent recevoir les articles de
Jeur capitulation que de fes mains , rant ils avoient
de confiance clans
fa
bonne foi.
Ir
s'y rendit,
&
per–
fonne n'eut a
(e
plaindre. On fut econne de voir le
chef d'un peuple di: conquerans fans aucun attribut
diftinB:if. Sa parure ei'it ete rebutante clans un hom–
me d'unc condition la plus abjeCl:e ; on eut <lit qu'il
eut VOUJU eriger )a mal-proprete en Vcrt'u. Q.l!oiqu'il
fut humain
&
p9pulaire, ii exigeoit une obeiffance
fans replique. Inacrnffible a la crainte
&
a
la defian–
ce, ii ne pouvoit s'imaginer qu'il eut des ennemis ,
&
qu'il pOt s'elever des rebelles. Sans legions clans
Medine ii diC1:oit des ordres a fes generaux qu'il dd1:i–
tuoit
a
fon gre , quoiqu'ils fufi'ent
a
la lete des ar–
rnees done ils etoient Jes
idoles. Ils fe foumettoient
fans mormure aux caprices de leur maitre;
&
faifant
conGfter leur gloire clans l'obeiffance; ils devenoient
Jes lieutenans re(peCl:ueux de leurs fuccelfeurs. Sa taille
haute, fon teint brun ,
fa
te1e chauve, fon maincien
auftere , fa decence grave
&
rffervee infpiroient plus
de refpeCl: que d'amour ; mais s'il fut crainc, ii ne
fut jamais ha!. Obferv·ateur fcrupuleux des ceremo–
nies Jes plus minucieures de
(a
·rdigion, ii eut cem:
piece credule
&
bornec, qui. dans un. hommt: obrcur
&
prive,
dt
un frein concre la licence des penchaos,
&
qui clans l'homme public, annonce l'incapacite de
gouverner. II fie neuf fois
le
pelerinage de la Meque
pendant fon regne qui fut de dix ans ; quoique fans
eloquence de !l:yle, ii emit vehement
&
pathecique;
&
comme ii paroilfoit penetre des mai>iiin1es qu'il an–
non~oic ,
ii Jes infinuoit fans effort; auffi fe livra.t-il
a
la manie de precher;
&
tandis qu'il vivoft ob(cur
a
\'ombre de l'autel, fos lieutenans par-tOllt viC1:orieux,
formerent le plus grand empire du monde; le Tigre,
le
Nil
&
l'Euphrate coukrent fous fes
loix. Les ri.
vages du Jourdain fon:nt
foul~s
par des vainqueurs
barbarcs , qui enleverent aux J uifs
&
aux Chreciens
le
berceau de leur foi. Enfin, la Palefrine, l'Egypte,
le
Korozan, la Perfe, l'Armenie ,
&
plufieurs va!1:es
regions de l'Afrique, ne furnnt plus que des provin–
ces de !'empire Mufolrnan. Ainfi, quoiqu'il n'eC1t que
du zele fans lumiere
&
fans talent , fon regne ne
fut
qu'une concinuice de triomphes
&
de pro(perices. La
fuper!l:ition ecoit alm·s une epidemic nacionale,
&
plus
ii etoit borne, plus ii fe rapprochoic de ceux
a
qui
ii avoit
a
commander.
Un
veritablcment grand hom–
rne eut echoue ,
&
ii reuffit. Ce
califc
ignorant,
&
en–
nemi de::
tout ce qui pouvoit l'edairer, fit reduire en
ccndre la
bibliorh~que
d'Alexandrie, monument de la
magnificence des Pcolomees qui avoient ralfemble,
a
grands frais , dans cet augu!l:e fanCl:uaire, Jes plus ri–
ches produtl:ions du genie;
&
pour autoriftr cet ana–
th~me
contre k s progres de la
raifon , ii dit : ,, Si
Jes livres dont cette bibliocheque e!1: compofee renfer–
mcnt lcs verites deja contenues dans I'Alcoran , ce
font des fuperfluices dont ii fam (e debarralfer : s'ils
en combanent Jes maximes, ce font des fources d'er–
reurs qu'il faut tarir, pour arrecer la contagion,,. Ses
viCl:oires ne pul'ent le garantir des coups d'un furieux,
qui mecontent d'un jugement rendu contre ' Jui ,
le
frappa de trois coups de poignards dans la Mo(quee,
lorlqu'il faifoit
la priere publique. Cet alfaffin, avant
d'etre:: faifi,
enfon~a
fon poignard tout enfanglante dans
fon propre
fe.in.Omar ne furvecuc que trois jours
a
fa
bkffure; 11
tnouruc
a
l'aae de::
foixante-trois ans ,
fans vouloir dtfigner fon fuc';;erreur. Sa con(ciance de-
c
A L
I
19
iicare lui fiiifoit craindre de faire on mauvais choix ,
&
quaod on le prelTa de nommer fon fils: Helas
!
re–
pondic-il, e'en c!1: deja crop, qu'il s'en foic trouve un
dans ma famille, qui air ofe fe charger d'un auffi pc;–
fant fardea u, done ii faudra rendre compte
a
l'Eter~
nel au jour des vengeances.
Omar, avant que de mourir, avoit nomme lix oom–
pagnons du prophete, pour preuder
a
la nomination
de fon fuccefleur; Jes fuffrages
fe
reunirent pour Othr
man, qu'Omar en avoit Juge indigne,
a
cau(e de fo!l
avarice. Cene vile paffion prend des forces en
vieillif~
fant ,
&
el
le regm: fans rivales
a
mefure q ue ks au–
tres s'eceignem. Ceue elevation 'fut la fource des trou–
bles qui agiterent le nouvel empire. Les Alides
&
les
Abalfades, mecontens de voir dans d'autres mains un
fceptrt> qu'ils regardoient comme leur heritage ,
fo–
rent concraints de fe pro!1:erner devanc la nouvelle ido–
le ;
&
ne pouvanc brifer leur freia , ils
le
blanchirent
d'ecume:
le
nouveau
calife,
fans fe mettre
a
la rete
de fes artnees, remporta par-tout des viC1:oires,
&
fes
fucces impoferenc filence
ii
la cenfure. Ses. generaux
conquirent coutes Jes provinces de la Perfe
&
de la
BaCl:riane, qui re!l:oienc
a
fubjuguer; leurs armes vi•
Gl:orieu(es penetrerenc jufqut dans la Tartaric. Tandis
que ks empires de !'Orient font engloucis par ce de–
luge . des Barbare• , Moavie, parent du prophete
&
le plus grand capicaine de ce fiecle de guerre , emro
dans la Nubie,
&
foumet au joug Mufulman
tout
!'Occident de l'Afrique. Les iles de l'Archipel
s'epui~
fent en cributs pour fe racheter; celles que la nature
de leur fol , ou le dffaut d'indufl:rie avoient condam–
nees
'a
un.e fternelle indigence , furent le
~ombeau
_de
kurs hab1tans , crop pauvres pour alfouv1r
l'avance
de leurs vainqueurs. infatiables. Moavie , maicre de.
Rhodes, fait brifer le fameux cololfe, dont tout le
mt>rite etoit dans la
difficul~e
vaincue ;. &de fes. de•
bris, ii en charge neuf cens chamea.ux
~
dela fe re;
'paodant dms la Sicile, ii menace l'ltalie qui n'etoit
plm peuplee que de Sybarites
&
d'efclaves.
Le
calife ,
feduit par la fortune, fub!1:ituoit Tes de–
lices de la mollelfe
a
l'aufterice des mceurs antiques.
Sa vie ne fut plus qu'un fommeil qu'il goutoit dans
le lein des voluptes , done les plus innocences fcanda–
lifoient ce peuple farnuche; ii s'eleva bient&t des me–
contens qui palfr(ent rJpidement du murmure
a
la
Fe–
bellion. II choir regarde comme l'ufurpateur du pa–
trimoine d'Ali, par une fad ion d'aucant plus
redou~
table , qu'elle etoit compofee de devocs qui (avoienc
• ha'ir
&
perfecuter. On lui
reprocha de ne confier le
gouvemement qu'a d'indignes favoris , qui n'avoient
d'aucres titres que d'etre Jes· complices de fes debau–
ches;
&
que les crffors publics , fermes aux bt:foins
de l'etat
&
du merire infortune, . ne s'ouvroient que
pour enrichir fes parens
&
(es
flatteur&. Ces plaintes
bien fondees furent encore appuyees par la calomnie;
on fabriqua .des lettres rcvernes de fon fceau ,
&
adref–
fees aux gou verneurs pour leur o.rdonner de
fc::
failir
des mecontens ,
&
de Jes
faire empaler. Ces
lcttres
furenc renduts publiques. Les fedicieux. inveftilfent fon
palais, qui n'ecoic qu'une vile:: cabane. II n'a d'autre
efpoir que dans la proceCl:ion d'Ali <!)Ui, fans avoir au–
cun titre, emir tout-puiffant dans Medine. Ali Jui en–
voie fes deux fils qui, fans etre armes , defendenc l'en–
tree <le
fa
maifon pendant quarante-cinq jours: la qua–
lice de petits-fils du prophete en impo(e a la fureur
des mutins; 1:nais s'etant lln jour eloignes pour aller
chercher de l'eau, Jes alfaffins profitent de:: leur abfen–
ce ,
&
forcent Jes pones. Othman , age de .quacre–
viongc-deux ans, ne leur oppofe d'aucre boucl,1_er
q~e
l'Alcot'an qu'il plac;-e
fur fon e!1:omac,
&
qu tis
tc::t–
gnent de fon fang,
&
ii tombe perce de douze c?cps
de poignard. Son corps
re!l:a crois_j<;>urs fans
fc~~l
ture ; on ne daigna pas rneme le purifier,
&
on.1m–
huma fans Jui rendre aucuns honneurs funebres, avec
Jes memes habits done ii etoit vetu lor(qu'on l'avoit
poign<1rde. Othman ecoic d'une haute tailk :
fa
phy-