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HISTOIRE DE LA CO NQ..UETE
Dans le milicu du Temple il
y
a trois rangs de caifTes fur des bancs fepa–
rcz.
Les plus grandes de ces caiffes fervent de bafe aux médiocres,
&
celles
cy
aux plus pee ices,
&
d'ordinaire ces pyramides font compofées de cinq ou
fix
caiífes.
Comme il
y
a des efpaces entre un banc
&
un autre, ce)a n'cmpeche
point d'aller
de
coté
&
d'autre,
&
de
voir dans le Temple tout ce qu'on veut.
Touces ces caiffes font remplies de pales, de forte que les plus grandes
ren–
ferment les plus groffes perles,
&
ainfi en continuant jufqu'aux plus petites,
qui ne font pleines que de femence de perles. Au refie la quantité des perles
étoit telle, que les Efpagnols avouerent qu'encore qu'ils fulfent plus de neuf
cens hommes,
&
eulfent trois cens chevaux, ils ne pouvoicnt tcus enfemble
emporter en une fois toutes les perles de ce Temple. On ne doit pourtant pas
s'en trop étonner,
fi
l'on confidere que les Jndiens de la Province apportoient
dans
ces caiffes depuis plufieurs fiecles toutes les perles qu'ils trouvoient,
fans
en retcnir ur.c feule.
~
t
de
la on peut juger par comparaifon , que fi
tout
!'argent qu'on a aporte du Perou en Efpagne, ne s'étoit pas rranfporté ail!eurs
les Et¡.1agnols pou 1
ro
ent aujourd'hui eouvrir d'or
&
d'argent plufieurs Eglifes.
Outre
cctte innon
brable quant1té de perles, on trouva force paqueb de
perles, on trouva force paquets de peaux de cliam
is
les uns d'une couleur,
&
les autres d'une aurre, fans compter plufieurs hab1ts de peaux avec
Je
poiJ,
tei1 tes différemmcnt, plufieurs vetemens de chats, de martres'
&
d'aucres
peaux auili bien paflees qu'aux meilleurs endroits d 'AlJemagne
&
de Mofcovie•
.t\utour de ce Temple, qui par tout étoit forr propre,
il
y
a
un grand ma–
gafin diviíé en huir falles de mefme grandeur,
ce
qui lui
apporte baucoup
d'
rnemenr.
Les Efpagnols entrerent dans ces
falles,
&
les
trouverl.ntpeine
d'armes.
11
y
avoit dans la premiere de longues piques fe1 r
' es d'un t1es· beau
cuivre,
&
garnies d'anneaux de perles, qui
f
nr
rro1s ou quatrc tours.
L'en•
droit de ces piques qui touche a l'épaulc efi: enrichi d
chamois de cou eur,
&
au
e cremitez
il
y
a des houpes avcc des perles qui contribuent b auc up
a Jeur b eauré.
11
y
:woit dans h fcc onde falle des malfues fembJables a cclJes des geans; gar–
nie.s d'anneaux de per les,
&
par intervalles, de houpes de diverfc s coukurs, avec
d es perles alc nt our.
D
ns la troifiéme on trouvoit des marteaux d a rmes enri·
chis commc les aur1cs ; da ns la quacriéme, d s épieux parez de houpes pres du
fer
&
a
la
po ignée ;
d .rns la cinqu iéme des efpeces de rames ornées de perles
&
de franges ; dans la fixiéme des ares
&
des fléches tres· belles. Quelques unes
étoient armées de picrre
a
fu
fil, éguifées par Je bout en forme de
poin~on,
ou en for·
me d'épéc, de fer de pícques, ou de pointe de poignard, avee deux tranchans. Les
ares éroient émaillez
de
di\ erfes couleurs, luífans
&
embellis de perles en di\·ers
cndroits. Dans la feptiéme falle il
y
avoit des rondaches de bois
&
de
cuir
de
vache aporté de loin, garnies de
perles
&
de houpes
de
couleur. Dans
Ja hui–
tiéme, des bouclie rs
de
rofeau"' tilfus
fon
adr lÍtement,
&
par
z
de h oupes
&
de femences de perles. Voila la defeription du Temple
&
du magafin d'armes
de Talameco que les Efpagnols, qui avoient écé au Perou,
&
dans les autrcs de
l'Amerique, admirerent comme
la
merve])Je du nouveau monde. Enfuite ils de·
ma.ndcrcnt aux
lndiens
ce
qui les
avoit
portez
a
amaífer
tant
de richefTes,
&
Hs
répon•