D E L
A
F L O R l D
E~
Liv. III.
duc ou l'on rencontroit pluficurs maifons éloignécs les unes des autres, fans au..
cune forme de village. Les lndiens qui étoient dans ces maifons, fortoient de
furie fur les Chrétiens,
&
tachoient de les cuer. Mais nos gens irritez de
Ja
hardieffe des Barban.s ,
les repouffoient a travers champ,
&
les pere&oif"nt a
grand~
coupsde lances. lis n
1
en venoient
a
cene e ·tremité qn'afin de les reduire;
mais fort inutilement. Plus les Efpagnols montroiem de valeur,
&
plus le cou–
rage des l ndiens redoubloit.
Enfin, aprés deux lieues de marche
a
travers les terres cultivées , nos gens
arriverent a un ruiffeau tres-profond, bordé de part
&
d'autre d'un bois
fort
épais. Les ennemis qui s'étoient retranchez. en cet e9droit,
y
attendoient les
troupes pour les défaire. Mais il en arriva autr mcnt qu'ils ne fe l'étoient imaginé.
Les
Efpagnols ayant reconnu le pofte des ennemis, les Cavalíers les mieux
armez mirent pied aterre, gagnerent le pafTage l'épée a la main,
&
couperent
a
coups de hache les paliífades qui couvroient les Barbares,
&
empéchoient que
les chevaux
n•avan~affent.
Les Indiens chargerent alors rudement nos gens, dont plufieurs furent bldfés.
&
quelques-uns tuez. Le paffage étoit facheux,
&
les ennemis qui efperoient de
vaincre, faifoient un dernier effort
a
cauíe de l'avantage du lieu. Neanmoins
iJ¡
carent du ma1heur: les Efpagnols donnerent avec tant d'ordre & tant de courage,
qu'ils les forcerent fans perte que de fort peu des leurs. Enfuite ils firent encore
deux licues a travers les terres cultivées; mais les lndiens qui apprehendoient les
chevaux, ne les attaquerent point.Les Efpagnols fe logerent done dans
la
plaine;
cfpcrant qu'enfin la nuit ils. prendroient quelque repos; toutefois ils furent fruf–
trez de leur efperance. Les lndiens,
a
la faveur de l'obícurité, leur donnerent
fans ceífe l'alarme, afin de fofüenir leur reputation,
&
de pa1fer pour braves
dans 1efprit de leurs voifins. Le matin comme les troupes marchoient, on
fut
averti par les priíonniers que l'on n'étoit qu•a deux licues de la Capitale,
&
que le Cacique avec un grand nombre de fes fujets
y
attendoit les Chrétiens
pour les combattre. Le Général détacha au
meme
temps deux cens chevaux
avec cent fantaflins ,
s'avan'la vers )a ville,
&
commanda que fur la route
on
fit
main baífe par tout. Arrivé dans cette place, il la trouva abandon–
née,
&
que le Scigneur s'en étoit fui ; mais fur la nouvelle qu'il n•étoit pas
loin,
it
fe met a le chercher, court deux licues aux envitons de la vilJe,
t
ue
&
fait prifonnicrs plufieurs Indiens, fans qu'on piit attraper Capafi. C'eft ainfi
que le Cacique d'Apalache s'appelloit,
&
c'eft
le
premier qui jufqu'ici n•ait pas
porté le nom de
fa
Province. Le Général defefperant de prendre ce Barbare,
rejoignit] l'Armée qui étoit daos la Capitale. Cette place avoit deux cens cin–
quante maifons, Sot_o prit pour lui celle de Capafi qui étoit au bout de la Vil
1
e,
lk
llus élevée que les autres.
a Province d'Apalaché a, outre un grand n9mbre d'habitations éparfes
c;¡a
&
la
dans la
campa~ne,
plufieurs villages de cinquante
&
foixante feux chacun,
dont les uns font eloignez des autres d'une lieue,
quelquefois de deux ou
de trois. La fituation du
pays
efi: agréable
;
on
y
trouve plufieurs étangs. On
y
péche toute l'année,
8c
les habitans font proviíion de poiífon pour leur
nourriture. La contrée ne laifTe pas d'etrc fertile en toute autre chofe. Soto
&
fe