BAN
né par deux íl:igmates cylindriques, blanchai:res , ve–
lomés fur leur face intérieure. Cet ovai re, en
rnu rif–
fa nt, reíl:e' enveloppé de fon calice cornme d'une coef–
fe
conique ftriée comme ridée qui jaunit,
&
dev iene
une graine ovo'ide, lilfe , plus perite, plus pointue
que celle de notre chanvre , longue d'une ligne
&
de–
mie , grife-brune ou cendrée, Jujfante , cornpofée d'une
coque ou croute cartilaoineufe alfcz dure' fonnante '
qui peut s'ouvrir en
d~ux
portions en éqilles éga–
ks,
&
fous laquelle eíl:
line pell icu le verte tres-fine ,
qui enveloppe
l'embryon. Cdui- ci cft
recourbé en
demi-cercle ,
&
cenfiíte en deux cotyledons derni-ovol–
d es ,
appliqués )'un contre
l'autre ,
&
terminés par
une rad icule con ique qui pointe en haut vers le ciel.
C1d111re.
Le
bangi
croit dans tou te
l'lnde depuis la
Perfe ,
&
peut-foe l'Egypte , jufqu'a J ava.
A Am–
boi ne ,
&
dans
quelques autres ilks plus
orientales~
gn ne
le
culri\·e guere que par curiofité dans quel–
<¡ ues jardins,
&
la graine a bcfoin d'etre renouvellée
taus les deu1' ans , parce qu'elle perd
fa
fac ul té ger–
minarive ; on eíl: forcé d'en tirer de la nouvelle de
J ava. Des graines que l'on feme, on voit
lex~r
plus
de pieds males q ue de pieds frrnelles .
.
ff<J1alités.
L'odeur dt: toute la plante eíl: forre , ¡¡f–
fez frmblable a cdle <lu
tabac'
&
plus forre
d aq~
la
feme lle que dans
Je:
n1 ale. Lorfqu'on Ja couche, elle
lai!fe aux :nains une efpece de vifcofité aum force que
cellc que l'on retTent lorfqu'on cuei lle des feuilles de
tabac ,
&
qui porte rres-vivement
~
l'ooorat. Ses
f~u il
les machéts ont une faveu r apre ' aítringerite '
&
me–
lé.<: d'un peu d'ac reté ; fes grai nes au contnlire,
fon~
a!f~z
douces
&
huiltufes.
Ufages.
Les fils que l'on pourroit rirer de !'¿coree
du
bangi
font
fi
courts,
[¡
fins
&
fi
foible~,
qu'Qn
n'en fai t aucun ufage dans l'lnde,
&
qu'on ne peut
les fil er pour en faire des roi lc;s
cortirnc:
avec
no~re
chanvre,
·
Co,nme
fa
princ
ipale vertu confiíl:e
a
porter a la
tete '
a
déranger le
cerve.au,
a
lu1 procurer une efpe–
ce d' ivreffe qu i fait
oublier la triíl;dfe ,
en
procun\n~
une certaine gaieté, les Maures
&
les In:Jiens , ha–
bitans des contrées les plus chal1des
de
l'A, fie
&
de
l'Afrique, qui n'ont que rres-pc;u de reffources daris
le vio, parce que leurs palmiers n'en fourni!fcnt que
pendant une partie de l'année, ont de tout rems pro–
fité de cette propriété du
bangi.
l is ont memo ima–
giné d'augmen ter fa verru ou de la varier,
&
la plier,
pour ainfi dire,
a
leurs befoins' foiv<1nt
les circon–
fiances, en
y
melant d'autres drogues, comrne nous
le dirons ci-apres ; enfin ,
ils font parvcmus au point
de fe
p·rocurer , comme
á
leu r gré, foit une g<1ieté
paffagere d'un in!hlnt , foit une ivrdfe de longue du–
rée , fo it un courage qui
leur fait braver
lts plus
grands dangers ' foit des reves agréables ' foit un fom–
mdl qui leur fait óublitr des exces de triíl:clfe qui au–
roient pu les mcner
llU
tombeau. lis l'emploitnt aum
pour s'exciter
a
l'amour.
Pour fe procurer de la gaieté, ils expriment le fue
de fes feuilles
&
de fes graines,
&
en fo nt avec l'arec
une boilfon qui agi te beaucoup les fens. Lorfqtl'ils
vculenr augmen ter Ja fo rce de cette boilfon pour fe
procurer
l'ivrelfe , ils focent des fe uilles feches du
bangi
avec du tabac , ou bien ils en fument une pipe.
Pour éprouver des reves
ag~éa bles,
ou pour
fe
li vrer
a
un profond fommeil' il fuffit d'ajouter
a
ce fue
un peu de muftade , de macis , de girof\e. de cam–
phre & d'opium, pour en fai re cette compofition, que
les Indiens appdlent
majub ,
&
qui, fdon l'Eclufe ,
Clujius,
eíl: la meme chofe que le malac h des Turcs.
1
Is s'excitent
a
l'amour en rnelant enfemble la graine
de
bangi ,
le mufc, l'ambre
&
le fuere.
A l'égard de ce dernier effc:t,
il eíl: bon de re–
marquer qtJ'il ne contred it nullement les expériences
qui ont été fai tes depuis Diofcoride jufqu'a nous,
&
qui prou vent que ks feu illes du chanvre , ain!i que
celles du
~a11gi,
coagulent
Je
fperme , & rendent ceux
B
A N
749
qui en rnangent ímpuilfans; car, dans la .compofition
des lnd iens, on n'emploie que la grai ne dt'S cc::tce plan–
te; d'ailleurs on fak
q.oefo
Jnufc
&
l'ambre, qui
font la principale pa
rtie de
1
cette compofition, oñt
cette verrn dans un dégré érni nt nt. E nfin ce n'ert
qu'apres avoir fait ufage des autres
dro~ues
'!UÍ
m~t
tent taus leurs fens dans de grandes ag1tat10ns, qu'1ls
ont recours
a
cene dc:rniere. Au reíl:e, ríen de plus
pernicieux
qu~
l'u fage de cette drogue ,
&
J'r::xpérien–
ce apprend que ceux qu i en font ufage font bien-tiit
épui f~s ,
&
qu'ils dem.eurent exténués pour
le
relle
d~
leurs jours,
La manii:re done ces drogues agi!fent, varíe fui–
v an~
les
tempéramens, II paroit en général que c'eíl:
par une forre commotion des frns, par un ébranle–
ment gér.éral du
fyíl:eme nerveux ,. .qui ctérange
O\l
obfcurci r le. cerveau, qui eíl:
fu i
vi , pour l 'ordinaire,
d'une vraie man ie, d'une efpece de.. folie que les
In–
diens appellent
i mpropremen~
ivrejfe.
En voici qud-.
qu¡:s effets pri
0
cipaux , tels q1.1'ils ont été vus fur les
lieux par R umphe , ce fava nt médecin , cet e¡ccdlono
o~ferv a~eur
q
t1 i
con
0
oi(\oi~
fi
parfaiten1ent
l'art
el~
bien vo1r,
Parmi ceux qúi füment les feuilles- du
bangi
avec
celles du
tab,a~ ,
les u¡¡s deviennent furieux , .ne veu–
lent rien faire qu'a kur prop re volonté , ne cherchent.
qu'a fe battre , qu'il brifer to ur ce qui
fe
pré!t nte
fou s le1,1r
rpairi : ce font l\:s cernpéramens bouillans
&
fecs , k;s gens
fangui n~
-, qont le lyíl:eme nervcux:
eíl;
tendu. !.,es autres q'un tempér¡¡mr;:n t plus humi–
de, plus froid, moins (angoins , plus muus dans le
fyíl:eme n
erve1.1x, commencent
p~r
pleurer
&
finitTc: nt
par
Je
ris
fardon1q.ue&
¡:iar
1k~
menaces. Cette puif–
fance qui
agit ain (i fur les nerfs
&
qui ·porte
a
la
foreui', réf\de principa\ement d¡¡ns les feuil\es du
ba11-
gi,
car on peut manger une perite quantité
de:
fes
oraines fans
éprouv~r
le
moind re changemq1t
1
IX
leur
~ertu
eíl; conlidérablement corrigée par le mélange
des aromares done nous avons parlé ; & que ks Turcs ,
l,es Perfans
&
lc:s habitans du Mogol favent mie ux:
préparer que les Maures qui
ha,bi~ent k~
ilks
·Mo~
luquc:s.
·
C'eíl: un ufage
re~u
chez taus les rnilitaircs de ces
pays, depuis les commanc\ans juíqu'aux derniers ofli–
ciers, de prenprc journcllement une pcti te quantité de
cette compofü ion , pour
fe
procqrer une gaieté qu i
les délivre des fati gues & des inq uiétu des que cau(e
la guerre. A, uffi le dernir;:r (ultan de Camb.aye avoi c–
il coL1tome de qire que quand il vouloit fe · procurer
un reve agréable
&
voyager en .fommei l dan
le
P0r–
ruoal, le Bréfü
&
d'autres pª ys , il· lui fuffi fo it d'ava.
le::'
Ur\
0
peu de
btflgÍ
>.
IT\Clé ;\VeC le
fuere, le rnajoc:h
&
les aromares dorit n,ous avoqs parlé. On
foir que
les Turcs , lorfqu'ils vont au <;orpbat, r.rennent de
leur maílach qui eíl: rnelé d'opium • qui leur procu.
re une demi fu n;ur qu.i les rend intr.épides
IX
qui le11r -
fait a
ffronter les plm
grand~
dangers.
On
fa.irpar Galien ,
{ivre
l
,
de a(imentor11m
faml–
tatibu
s, que les anciem avoie(lt cou tumc: de fe fa irc
fcrvir, aux defferts c\e \eurs feíl:ins , la graino
rótie
du
chanvr~ .
c'eíl:-a dire ' le chcnevis , pou r exdter
a
la joie
&
a
boi re largemt;nt ; mais ce favant médccin
ajoute que ceux qui en mangerit ur¡e trap grand qu an–
tité, érrouvent au cervt;al.l
ele
la chaleur , une com–
:notion '
&
des nuages ' a-peu-pres commc: qu and
on maRge la graine c\e l'agnus-caíl:11s , c'eíl:-a-dire, du
vitex.
·
Les Malays fe procu
r.ent cene ivrdfc tempérée qu'ils
appellent
hayal ,
en f
a1fant macérer , c'eíl:-a-dire, en
verfan t fur une pincée des feuilles du
bangi
de
J'e~u
boui llante qu'ils boi vcmt a la maniere du .thé. lis pré–
tendent méme que l' ufage de cette boi lfon .ckvroir paf.
fer en mode chez taus ks rois de Ja terre , toutes
le$
fois que, fatigués du détai l de Icor gouvcrnement,
ils auroient befoin de
Í!;
procurer promptement de Ja.
dil1raétion
&
de Ja gaieré.