Table of Contents Table of Contents
Previous Page  243 / 902 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 243 / 902 Next Page
Page Background

AIR

d effein ,

&

qui fa it le charme de

l'air.

Un talent fa ns lequcl il

dl

impoffible de bien écrire

dans ce gc:n re, c'dl: le prffcntiment du chant, c'efr–

?l-dire, du carzél:ere que

l'aii'

doit avoir, de l'étendue

c¡u'il dema nde

&

du mouv ement qui luí e!l propre. ·

On a p rétendu que

la

fymmétrie des vers étoit inu–

tile au nrnficien ,

&

l'on fait dire a celui-ci : ,, com–

" pofez a votre fantaifie : le metre, le rhythme , la

,, p hrafc , le fryle concis ou périoélique , tout m'eíl:

,, égal ; je trouverai toíijou1•s le moym de fa ire du;

,, cliant ,,. Oui du chant rompu, mutilé , fan s deffe in •

&

fa ns fo ite ,

q~1i

tachera d'étre exprdiif, mais qui1

n'écant poi_nt mélod ieux. , n'aura ni la vérité de la

m tu re , ni_l'agréinent de

l'art.

L'ltalie a de\lX poetes

céleb res , Z eno

&

Mérafrafe : Zeno eft dramatique, il

a de la cha\c ur, de l'intér_et, du mouvemcnt

d~ ns

la,

fcone ; mais fes

1úi·s

font mal compofés; nul rapport , .

nu lle intell igcnce dans la coupe des vers

&

daos le

choix du rhythme ;· les muficiens l'ont abandonné.

M étaíl:afe au concraire a difpoié les phrafes, les repos ,.

les nombres ,

&

toutes les panies de, l'aii- comrne s'il

l'eC\t chanté. lu i-mecne; taus les muficiens

fe

forit don-

nés

a

luí.

.

'

Ce n'eíl: pas qu'un muítcien ne tire quelquefois partí

d'une irrégu lari té , comme un lapidaire habile fait .

profitcr de l'accident d'une agathc ; mais ce font

les hazards du génie ,

&

les hazards font fans confé.

q uencc.

.

Da

ns un opéra de R ameau n'a·t-on pas vu

ce mau–

vais vers.

Brillan/ Jo_leil , j amaís nos

yeux

dans ta carritre

,

produire un beau ddfein de chel!ur? Uhomme fans ·

t alent fe fait des regles de romc:s les excc:ptions , pour

excufer fes maladreffes

&

fe

déguifer

a

Jui -méme l'im–

pu \ffance ou il eíl: de fa ire mic:ux.

D u ·refte ce U:eíl: point telle forme de vers ni leur

égalité apparente qu i les rend favorables

a

un chant

mefuré ; re fon t les nombres qui les compofent; c'eíl:

l'arrangemc:nt fy fll métrique de ces nombres dans les

d ifférentes parties de la

p~riode;

c'eíl: la fac ilité qu'ils

donnent

a

Ja muúq ue d'etre fidelle en méine tems

a

Ja rnefure

&

°?1

la profod ie ,

&

de varier le rhythme

' fon$ alcércr le mou vement ; c'dt l'attention

a

placer

les repos ,.

a

.meforer !t:s .efp accs'

¡¡

ménager les

fuí–

pen.iions oll les cadenC-es au gré de: l'oreille,

& .

plus

encare au g ré du li::ntiment qui eft k jugc: de l'ex–

preffion .

Prenez la plus harmonieufe des odes -de M alherbe

ou de Rouffeau, vous n'y trouverez pas qu ittre vc:rs de

fu ire favo rablernent difpo[és pou r une phrak de chant:

c'eíl: bien le meme nombre de fy llabes ' mais nulle

correfpondance , nulle fymmétrie, nulle rondeur, nul le

affimilation entre les membrcs de la périodc , nulle

apti tude en fi n

a

recevoir un ,chant périodi9llc:

&

mé ·

lodiet1;c; le mouvement doone par

lt:

prea11c:r vers eíl:

contrarié par le feco nd; la coupe de

d 'air

-indiquée

p ar ces deux vers ,ne peut

pl u~

aller

a~)(·

deux au–

t res; ici la phrafe di: trop conc1fe,

&

~a

elle efr

t~o~

p rolongée ; d'ou il arrive que le .

m~fic1e~

cíl: ,ºb!1!?e

de faire fur ces vers un chant q u1 n a potnt d u

ni

te,

de motlf

&

de caraélere; ou .de n'avoir aucun égard

,11

la profod ie

&

au fens.

.

On a fai t

le

meme reproche aux vers de

~rnault,

les plus harrnonie ux ¡:ieut-etre qui foit:nt

dans~

notre .

lano-ue

&

fur kfquels il eíl:

i mpoffibl~

de f aire un

11ir

~

ce' q ui prouve bien qll: l' harmoni_e poéri_que .n'eíl:

p as l' harmonie muficale.

~inau lt

a fa1 t le mteu;c I:'of–

lible pour l'dpece de chant auquel fes

~ers , e1?1c_n~

ddtinés mais le chant .périodique dont ·11 s ag1t 1c1

n'étoi t pas connu de fo n tems ; il ne l'étoit pas me–

me en . I rnlie. On fait que le fameux Corelli n'en

avoit pas l'idée ,

&

Lulli , fon contemporain, l'igno-

roit comme lui.

·

'

L 'in vcntion de

l'ai1·,

ou de la période

m~fi.cal:, e~

regardée par les I tafans comme la plus pr1:c1•ule de–

'Iome.

J.

A

1

R.

'.127

¡; .

li

1

couverte qu on a1t 1a1te en mu 1que; a· gloire en

e!t

d ue

a

Vinci. L es Italiens en ont abu fé , comme on

;ibufe de tous k s plaifirs ; ils ont, fans doute ,' trap

négligé la vraifemb lance

&

l'analogie q ui fait le char–

me de

l'exprdiion, fur-tout dans · ces

airs

de bravou–

te ou l'on

a

brile la lang ue, dénaturé le fentiment, fa–

crifié la vraifemblance

&

l' intéret meme au plaifir d'en–

tendre une voix brillante bad iner fur une rolllade ou fur

un paffage léger. Mais il

y

a long-tems qu'on a die

q~e

l'abus ?es bonnes chofes ne prouve pas qu'dlc:a

fo1ent mauva1fes .

11

faut prendre des ltaliens ce qu'un

gout pur

&

fain , ce qu'un fc ntiment jufte

&

dél icat

approuve ; !eur lailfer

le

luxe

~

l'abus , fe garantir

de l'exces ,

&

racher de faire comme ils ont fait fou–

vent, 'c'dl:-a-di re, le mir ux poffible.

L'art d'arrondir

&

de fymmécrifrr la période mu- 1

(iq le, a été j ufq u'ici peu. connu dc:s

Fran~ois

,

ce

n'e(t dans kurs vaudevillc:s , ou la phrafe d'un rhant

donné a preferir

le

rhythme des vers. ·Mais par les

elTais qlle j'en ai faics moi- méme au gré d' un muficien

habile, j'ole alTurer que notrc langue s' accomude

fa–

<dlement

a

'cene fo rmule de 'chan.t. On commence

¡¡

k

reoonnoitr.e , on .commence meme

a

ft:ntir q ue le

charme de

l'air,

phrafé ·

·¡¡

l' ital ienne , manque a la

feme de l'op éra fran\:ois pour l'animer

&

l'embellir;

&

lorfqu'on faura l:y employer avec intelligence

&

:\Vec avantage, ainfi que le

duo ,

&

Je récitatif obli–

gé,

il

rn

réfultera , pour l'opéra

fra n~ois

fur l'opéra

icalien , une fupériurité que je ne crains pas de pré-

din:.

,

. ,

Mais, on aura toujours

a

regretter que les chefs.:

d'reuvrc: de

~inault

foient privésrde cet ornement;

&

celui qui réuffiroit a les en rendre fufceptibles, e? con–

fervant a ces poemes :ill:ws ·11nimitables beautés, ferojt 1

plus qu'on ne 'fauroit croire, pout' les

pFqgr.es

de la

mufique en Fraoce;

&

polir la gfoire 4'un thé&cre

0\1.

~inault

doit toujours rfgner. ·

,

~elque

mérite que l'on fuppofe

a.

Lulli, la faci–

lité , la nobkffc:, le naturel de: fon récitatif peuvent

ctre imicés;

&

daos tollt

le

rdl:e il 11'¡:¡ft pas d ifficile

d'etre ·fupérieur

a

lui . M ais ríen peut-etre ne rempla–

cera jamais les poemes de Thcfée_, de Roland

&

d' Ar–

mide;

&

toute nou11eauté qui ks bannira du théam:

nous lailTera de lo.ngs

regr~ts.

Le moyen le plus infaillible de nous rendre touc

a

COL1p paffionn és pour une

~nufique

DOll yd le,,

~e

fe.

roit done de l'adapter

a

ce~

poernes ehchanti:¡urs :

&

ce n'eíl: pas fans y avoir réfiéchi que je crois cela

tre~-.

poffiblc:. _

,

J'ai <lit .que l'égalité des vers n'étoit ,pas effentíelle

a

la fymmécrie du chant , foit parce q ue, dcux vers

inégaux p1uvenc avoir des mefures égab ,

&

quf le

fpondée·, par exernple ,' qui n'a q ue d!:ux 'fyll abt:s eíl:

l'équivalent du dalty le qui en a trois; foit qu' il ar–

rive auffi que le mu ficicn, par des file nces

0\1

par

des prolatio;is, fop plée au p ic:d qui , manque: a un

vers, pour egakr la longut l)r d' un autre, f91 t enfin

p arce que les phr.a(es de chanL c¡ui ne fo nt pas corref–

pondantc:s, n'ont pas befoi n d'avoir cnm: _elles une

p arfaite égalité. · M ais entre les mrn1bres tymmérrique–

menc oppofés d'unc: période , c'eft une chofe: pré-.

cicufe que l'égalité du metre ,

&

que l'ideotité des

nombtes:

&

l'aurem qui me fert de guide , en fait,

avec raifon un mértte

a

M étaíl:afe a l'c:xclulion· d'A–

poíl:~lo Ze~o

; voici

l'exempl~

qu'il <!n c:ite ,

&

ccc

c.xc

:;nple eft· une le\:on.

L 'o11da che mormorn

'Ira fponda e fponda

,

L'aura che tremola

<Ira fronda

e

fro11da,

Ji.'

mmo

i11jlabí!e

Del vojlro

cor.

P111·

/'

alme jimplici

Dei

f ol!i ama11ti

Sol per vci

JP

rgono

Ffz